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Naoki Shiori

Données Spirituelles
Grade: Vice-Capitaine de la 2ème Division
Ven 2 Sep 2022 - 9:51 - Naoki Shiori

Naoki Shiori

Race Shinigami
Âge 42 ans


Grade Vice-capitaine de la deuxième division


Pouvoir

Miyatsuki


Sous forme shikai, le sabre prend la forme d’onglets (forme de plectre pour les instruments requérant l’usage individuel de plusieurs doigts pour gratter les cordes) métalliques donnant l’apparence de griffes tranchantes. Ces onglets sont accompagnés de cinq cordes pincées capables de résister au tranchant d’un Zanpakutoh. De portée courte, Shiori leur donne plusieurs formes dansant entre ses articulations et permettant de gêner les mouvements de l’adversaire s’il en vient à s’approcher de trop près. Ce style martial unique demande de se mettre au diapason de l’ennemi qui s’accorde alors comme un partenaire dans la danse dangereuse de la vice-capitaine qui en profite pour le blesser par effet de dislocations ainsi que de griffures.

La faculté de son Shikai tient à l’instillation d’un sifflement dans la tête de sa cible lorsqu’elle pince les cordes de ses onglets, présageant un malaise qui peut dans le meilleur des cas déstabiliser les sens, dans l’entre-deux, faire éprouver des hallucinations mineures et dans le pire, provoquer l’évanouissement.
Naoki Shiori P-shini

Descriptions


Shiori est une femme à l’apparence on ne peut plus singulière avec deux petites cornes qui laissent penser que ses origines auraient quelques accointances avec des affaires de Hollow. La vérité ? On n’en sait rien. L’apparence élégante, ses prunelles sont grisâtres. Sa peau ne montre aucune aspérité particulière. La silhouette gracile, on miserait sur sa fragilité. Et pourtant, son grade de vice capitaine laisse entendre qu’il faut toujours se méfier de l’eau qui dort. En tant que membre de la deuxième division, on pourrait aussi croire que sa personnalité laisserait à désirer. Les quelques personnes à avoir passé le pas des mauvaises impressions se verront frappées par l’accueil d’un sourire délicat qui ne présage pas d’arrières pensées particulières.

Oui, Shiori fait mentir les a priori. Des rumeurs approximatives tombent justes quant à son passé troublé qui l’aurait vue emprisonnée pendant de longues années. Malgré tout, sa réhabilitation est révélatrice d’un comportement que l’on aurait jugé compatible avec les valeurs du Gotei 13. N’en reste pas moins des histoires quelques peu douteuses sur son passé. Certains racontent qu’elle aurait été prise la main dans le sac après avoir massacré plusieurs habitants du Rukongai. Si cela était vrai, aurait-elle été incorporée au sein du Seireitei, quand bien même cette dernière institution se trouverait en manque de main d’œuvre ? D’autres ragots plus nuancés font dire que ses crimes seraient nées de contraintes remarquables ne permettant pas réellement de juger de ses mauvaises intentions. Seulement, à la fin, rien ne change quant au fait que le mal aurait été commis, non ?

Serait-elle donc à présent sur la voie de la repentance ? Regretterait-elle ses crimes passés ? En terme de constat facilement vérifiable, il est son attitude n’ayant montré aucune insubordination notable. Au contraire, s’il faudrait comparer avec son supérieur direct, les membres de la deuxième division évoquent bien souvent qu’il vaut mieux avoir affaire à elle qu’à celui la commandant. Aucun ne s’est jamais sérieusement plaint de ses méthodes de commandement, même si sa légitimité a pu être quelques fois questionnée. Après tout, son passage à l’académie a permis d’apprécier une période de vide où sa médiocrité donnait peu d’espoirs sur sa faculté à monter les échelons.

Il semble qu’une sorte de déclic se soit produit à mi-parcours, la voyant se tuer à la tâche pour progresser dans ses compétences. Ses efforts lui ont valu de gagner le respect de nombreux camarades, même si plusieurs d’entre eux ont également manifesté de l’inquiétude vis-à-vis de sa santé. Notamment, ses compagnons de dortoirs ont pu parler en quelques occasions de terreurs nocturnes donnant du grain à moudre aux spéculations ayant cours sur ses origines criminelles. Malheureusement, le caractère taciturne de Shiori a laissé peu d’indices sur la teneur réelle de ses expériences.

Ce n’est que depuis quelques années, lorsqu’elle maîtrisa le shikai, qu’une forme de paix la gagna. Une paix certes imparfaite, mais au moins, ainsi, elle devenait plus accessible vis-à-vis de ses compagnons. Attentive aux sentiments de chacun, sa bienveillance fut à la source de la loyauté qu’une partie considérable de la deuxième division lui voue. Seulement, parmi ceux qui s’en retrouvèrent à relever ses qualités de meneuse d’hommes, beaucoup craignent que sa retenue cache un mal plus profond que son air rassurant laisse croire.

Sur ses épaules pèse d’évidence un lourd fardeau qu’il serait plus sain de partager.
Naoki Shiori P-shini

Histoire (1/2)

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Une brise à faire bruisser le feuillage de la végétation rampante, des arbustes et des arbres dans la nuance des couloirs que les collines innombrables accordent dans le creux de leurs interstices. Ce vent vient accompagner les trajectoires aériennes à la source des chants d’oiseau oscillant entre ciel et terre. Et dans cette terre se tapissent les insectes invisibles mais non moins réticents à se faire entendre entre les grillons, les mouches et tout le consortium d’une biodiversité à l’origine d’une fragile harmonie. Les prédateurs lèvent le museau au bruissement d’une branche piétinée au mauvais pas d’un herbivore maladroit.

Ce concert de mère nature sature les tympans de tous à ton exception. Dis moi, quel serait le point commun entre toi et cette pierre juste devant ta silhouette agonisante ? … La mort de vos esprits respectifs. Pourtant, il subsiste une différence fondamentale. Cette pierre est toujours demeurée inerte, minérale. Quant à toi, tu es toujours vivante, organique. Cette mort de la pensée tient à peu de choses, en réalité. Tu es affamée dans un monde où la faim ne devrait pas exister. Contrevenant aux règles inhérentes à ce monde, n’est-il pas normal que tu en sois éjectée ? Tu peux bien n’être encore qu’une enfant, ne pas avoir de souvenir précis de tes origines, ne pas posséder de lien remarquable avec qui que ce soit ; la marginalité est excluante, c’est là une vérité aussi élémentaire qu’universelle.

Tu pourrais te dire que tu souffres. Tu pourrais regretter d’être si faible que la nourriture débordante de cette forêt n’arrive jamais à ta portée. Tu pourrais t’emmurer dans des remords de n’avoir pas saisi les rares opportunités qui certes, engageaient ta sécurité, mais valaient mieux que de céder à la facilité pour en venir au final à ce piteux résultat. Tu pourrais pleurer. Tu pourrais t’enrager. Tu pourrais éprouver n’importe quelle émotion. Or, tu en es incapable pour la limpide raison que la faim dévore tout. Elle dévore ton esprit. Elle dévore tes sentiments. Elle dévore ton identité.

À cet instant, serais-tu capable de me dire qui tu es ? Saurais-tu seulement m’entendre ? Non. Tu es seulement emmurée dans ce poids venant peser sur ton estomac. Chaque parcelle de ton corps investit le restant de son énergie pour économiser la moindre de ses fonctions. Simplement parce qu’il te donne la dernière chose que tu pourrais espérer dans ta condition : du temps. Un temps dont tu es déjà prisonnière. Un temps durant lequel tu ne saurais plus rien décider par toi-même. Un temps qui te met dans l’attente d’une chance irrationnelle. Après tout, pour être arrivée dans cet état, n’a-t-il pas fallu que cette chance t’abandonne, en premier lieu ?

– T’as l’intention de rester plantée là encore longtemps ?

Cette voix… est-ce la pierre qui vient de te parler ? La certitude, c’est qu’elle a su transpercer ce silence qui pesait profondément sur ton âme. Tu ignores encore combien de fois tu as vacillé de l’inconscience à la conscience. Peu importe, à ce stade. De toutes tes forces, tu soulèves ton poids pour le faire basculer sur le côté et ainsi coucher le dos sur l’herbe plutôt que le ventre. L’effort te fait remarquer la sueur perlant sur ton visage épuisé. Les prunelles levées au ciel, derrière toi, tu remarques qu’au sommet de cette pierre te toise un jeune garçon probablement de ton âge.

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– Tu vas bien ?

Une interrogation à quoi tu serais bien impuissante de répondre. Non, autant dire qu’à ce niveau, tu peines déjà à appréhender une question pourtant claire comme de l’eau de roche. Sans doute du fait de ce vertige qui attendait manifestement que tu cèdes à une telle errance pour te punir de ce nouveau voile d’inconscience. Ramenée dans cette obscurité, tu étais une nouvelle fois devenue cette pierre qui t’accompagnait dans ton royaume de solitude.

* * *

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À la levée des paupières, un nouvel environnement se dévoila. En lieu et place d’une forêt naturelle s’imposait à présent le décorum d’une pièce harmonieusement agencée. Allongée sur un matelas de pailles pressées et recouvertes d’une natte fine, la jeune fille émergeait pour faire la rencontre d’une élégante femme de chambre. Fragilisée par cette faim dévorante qui ne l’avait pas abandonnée, la crainte que pourrait amener un cadre inconnu ne ferait pas résonner d'écho dans son esprit. Au contraire, l’ambiance inspirait une telle tranquillité que la bienveillance pouvait naturellement trouver son nid dans cette scène de simplicité où un repas chaud était servi.

Dans cette renaissance de conscience faisant se relâcher le flot de ses pensées, les mots d’explication de la nommée Koharu trouvèrent une oreille attentive. Ce bâtiment recouvrait la fonction de refuge pour les enfants égarés du Rukongai. Ceux qui étaient venus au monde sans parents – une banalité au sein de la Soul Society – pouvaient trouver ici un semblant de repères grâce au mécénat du seigneur de ce district. Un homme apprécié de la population qui portait le nom de Yoichi Takeuchi. Quant à celui qui l’avait amenée ici, c’était lui aussi une âme esseulée résidant dans cet établissement en périphérie de la ville, à la frontière entre les collines verdoyantes et les infrastructures médiévales qui imposaient la règle architecturale dans ce monde.

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Plus tard, ce garçon dans le même âge que celle qui avait été sortie de sa silencieuse agonie lui rendit visite. Affublé du nom de Naoki, il faisait montre d’une personnalité plutôt étrange. La plupart du temps, il semblait absent à ses interlocuteurs, en phase avec des détails environnants qui lui prêtaient une attitude rêveuse ou contemplative. Pourtant, il surprenait souvent son entourage de remarques ou d’agissements affûtés sans s’enlever son air lointain. Pour lui, ce qui avait trait au second degré exprimait des non-sens qui n’appartenaient pas à la réalité de l’instant. Non pas qu’il l’exprimait ainsi ni même donnait de signe d’en être conscient. Simplement, son regard était toujours juste tout en se donnant un aspect dissonant voire tranchant de vérité. Ce pourquoi il mettait couramment mal à l’aise les adultes devenus prisonniers des apparences.

Pour cette raison, les familles qui venaient adopter un enfant résidant déportait souvent leur choix sur un garçon ou une fille moins bizarre. Shiori qui s’était récemment intégrée au milieu portait également une caractéristique autant si ce n’était plus dissuasive. Avec deux petites cornes sur le front, les suspicions allaient vite pour l’associer à l’affaire d’un Hollow. Peu de personnes étaient prêtes à attirer sur leur foyer le mauvais œil. Après tout, la vie spirituelle demeurait précaire même aux couches aisées. En effet, le positionnement du district se tenait dans un entre-deux faisant cohabiter des modes de vie pluriels. Dans les bois, on pouvait encore facilement rencontrer des brigands et autres rôdeurs dangereux jetant un climat d’insécurité sur la population.

Comme deux marginaux, Naoki et Shiori s’entendraient rapidement à en devenir inséparables. Toutes les conditions étaient remplies à cette fin. La faim n’avait-elle pas transformée la jeune fille en une page vierge ? Partant de là, son esprit ne pouvait que se reconstruire autour des repères les plus durables de son nouvel habitat. Aussi, le duo téméraire s’aventura-t-il plusieurs fois dans la forêt, Shiori se conformant aux activités de Naoki qui l’avaient vu la rencontrer pour la première fois. En parallèle, quelques réprimandes de Koharu viendraient punir ces prises de risques. Seulement, ce laxisme qui tenait pour beaucoup à sa façon d’être échouait souvent à faire entendre aux enfants sous sa responsabilité leurs limites.

Ainsi s’esquissait sa vie. Ainsi se forgeait son identité. Ainsi s’imposait sa tranquillité. Des expériences faites de hauts et de bas qui ne méritaient pas d’être contées. Du moins, jusqu’à ce qu’une visite en arrive à inscrire un souvenir plus durable dans sa mémoire.

* * *

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Un homme à la longue et douce chevelure de jais, le visage délicat et le kimono élégant tout en entretenant une forme d’humilité. Cet homme aimait visiter les orphelinats qu’il avait sorti de terre. Cet homme aimait demeurer proche des gens. Cet homme transformait les discussions en des notes musicales sublimées par le Koto. D’accoutumée, l’on prêtait cet instrument à cordes pincées aux dames. Était-ce parce qu’il exigeait une sensibilité étrangère à la gente masculine ? Était-ce que cela ne convenait pas au statut de pouvoir qui pouvait leur être dédié ?

À la finesse de ses mouvements, à la subtile maîtrise des vibrations capturant les sons pour en saisir la profondeur, à l’expression au diapason avec les couleurs de la mélodie qui se jouait, le musicien se faisait le maître de sa représentation. Son jeu s’incarnait suivant l’inspiration de ses expériences. Et de vécu, l’oreille affûtée en lirait une grande sérénité. Plus encore, l’épanouissement de ce sentiment merveilleux qui pouvait attacher deux existences entre elles pour l’éternité, même si quelques couplets traduisaient une nervosité fragile.

Sur son visage, un sourire s’esquissa à l’orée d’une jeune spectatrice curieuse de cette musicalité qui tranchait avec le silence dominant de son quotidien. Était-elle capable de traduire la parole évanescente de son âme ? À son âge, probablement que non. À la lueur sur ses prunelles, il s’affirmait l’observation d’un émerveillement enfantin qui lui vaudrait l’intérêt de ce musicien à l’instant où sa main viendrait se poser délicatement sur les cordes pour éteindre harmonieusement ce qui leur avait artificiellement donné vie.

– Tu es intriguée, petite ?

La regardant acquiescer d’un hochement de tête, l’homme reconnaissait à ses traits uniques un portrait que la responsable de l’établissement lui avait fait.

– Tu dois être Shiori. Koharu m’a parlé de toi. Avec ton ami, je crois que vous lui donnez quelques sueurs froides.

Le sourire évanoui, ses traits se faisaient si insondables que l’on pouvait y anticiper des remontrances propres à susciter quelques inquiétudes. Après tout, il était un étranger aux yeux de ces orphelins et de sa présence se dégageait un quelque chose ne permettant pas de le classer au même titre que tous les lambda en venant à passer le seuil de l’établissement. Pourtant, alors qu’il se levait pour s’approcher de la jeune fille, cette dernière ne révélait pas l’ombre d’une angoisse. Au contraire, son regard demeurait toujours aussi vif, comme s’ils étaient capables de regarder au-delà du discernable. Arrivé à son niveau, l’homme se baissa à sa hauteur, fort d’une proximité qui lui permettait de se faire une plus juste impression de qui se trouvait en face.

– Tu ne ressembles guère vraiment aux enfants de ton âge.

À cet instant, un changement léger s’opéra. Les yeux de cette enfant se couvraient d’une barrière invisible, davantage sur la défensive. Venait-il de déclencher quelque chose à quoi elle était souvent confrontée ? D’un geste, il approchait sa main pour la poser sur la tête de cette étrange orpheline qui n’avait opposé aucune résistance si ce n’était ce regard acéré qui surveillait ses propres yeux plutôt que ses gestes.

– Suis moi, veux-tu ?

Après un sourire, il se releva pour se diriger vers la pièce d’à côté. Fugacement, il perçut que Shiori jeta une dernière œillade vers son instrument avant de l’accompagner là où étaient cultivées des plantes de toutes sortes.

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S’approchant tour à tour des différents pots où se développait la végétation, l’homme passait sa main dans le feuillage. Il en découvrait la terre pour arracher avec soin les mauvaises herbes qui pouvaient nuire à leur bonne croissance. Puis, dans un rituel vieux comme le monde, il leur apportait un peu d’eau afin d’étancher leur soif.

– Vous autres orphelins qui vivez ici n’êtes pas bien différents. Vous êtes de jeune plants fragiles qui nécessitent une attention constante. Chaque jour, nous enlevons les petits désagréments qui vous retiendrait de révéler vos plus belles fleurs. Si vous deviez quitter votre pot, sans doute ne survivriez pas au danger banal d’un animal vous piétinant ou vous dévorant. Notre rôle est de vous y préparer, même si on vous préférerait dans un beau jardin plutôt que dans le monde sauvage. Je crois que tu as pu en saisir la cruauté avant d’arriver ici, je me trompe ?

S’entretenant dans son activité, nul écho ne venait conforter sa leçon. Malgré tout, il ne lui semblait pas en se tournant que ses mots tombaient dans l’oreille d’une sourde. Était-elle de nature à se taire et écouter dans l’insatisfaction de pouvoir retourner une réponse nourrie de la pertinence de l’expérience ? Cela pouvait être le signe d’un manque de confiance, ou bien d’une maturité juvénile appréciable.

– J’aimerais que chaque graine prometteuse puisse s’épanouir, même si je ne puis sincèrement condamner les aspirations de liberté qu’elle peut exprimer. Il faut qu’elle puisse survivre par elle-même à la sécheresse, aux tempêtes et toute autre épreuve que le jardin d’où elle est née ne saurait contrôler. Les blessures peuvent aussi bien détruire que construire.
– C’est parce que vous avez appris la musique que ces blessures vous ont construites ?


Pour la première fois, cette enfant rompait le silence à la faveur d’une question inattendue. Cette question confortait tout ce qu’elle lui avait inspiré depuis le moment de son irruption. Shiori possédait de cette empathie remarquable bien nécessaire pour s’approprier les leçons d’un vécu qui sortait du sien propre. Le visage paisible, Yoichi prendrait le temps de lui répondre d’une voix bienveillante.

– La musique permet de faire sortir de soi ce que les mots échoueraient à capturer. Est-ce à dire que la parole serait impuissante à transformer la souffrance en une énergie à même de nous construire ? Non, c’est simplement la voie que je me suis trouvé, que cette personne m’a montré.
– Vous pensiez à elle en jouant ?


Décidément, il pouvait être effrayant de cerner si justement les choses à son âge. Sona Hikari fut celle qui éclaira sa route quand l’obscurité d’un monde aux facettes cruelles le menaçait de perdre pied. Cette femme était à présent sa promise et sa première inspiration. Sa façon de vivre faisait d’elle une personne admirée de son entourage. Altruiste, elle était à l’origine de sa décision de bâtir ces orphelinats pour jeter plus de lumière sur un district où la vie pouvait bien être précaire. Proche de tout un chacun, son aura pouvait encore être sublimée dès lors qu’elle s’armait de son Biwa et enchantait son cœur. Chacun de leur côté, ils s’en allaient s’alimenter de scènes de vie qu’ils transformaient en une mélodie partagée dans une communion chaleureuse.

– Haha, oui. Je dirais qu’au-delà des instruments, c’est là le cœur d’une vie idéale. Vois-tu, d’expériences, il en existe des milliers d’autres qui se succèdent et se répètent. Il en est qui susciteront chez toi de l’indifférence. D’autres te bousculeront pour entrer en contradiction avec qui tu es. Elles te blessent, jusqu’au jour où elles deviennent impuissantes à t’atteindre.

Il y a également celles qui t’intriguent par des étincelles de qualité. Tu t’en rapproches et t’y attaches. Seulement, les années filant, l’intérêt que tu leur avais prêté finit par s’estomper avant de disparaître. Chez elles, tu avais investi une part de toi-même que tu te sentiras en mesure d’oublier. Une partie qui était de toute façon morte au rythme de ta croissance, à l’instar d’un arbre dont les feuilles tombent à l’automne pour voir succéder les suivantes au nouveau printemps.

Puis, enfin, il y a cette expérience qui transcende les cycles habituels des rencontres. Elle te renvoie un regard ne t’enfermant pas simplement à qui tu es à présent, mais à qui tu voudrais être plus tard. Ce regard t’incite à constamment t’améliorer, capable lui-même de grandir au rythme d’un investissement émotionnel inégalé. Cette expérience, tu consacres chaque parcelle de ton essence à l’entretenir, la sublimer, la porter à des hauteurs faisant de ta vie le rêve que tu eus à chaque moment de ton parcours où tu éprouvas l’angoisse d’un manque à combler.

Cette expérience te fait consentir à remettre ton âme à un endroit où tu ne saurais jamais plus l'oublier à l’avenir.


Tout le long de cette tirade, un sourire marqué d’une joie indestructible habillait son visage. À la certitude, l’attachement qu’il vouait pour cette personne était totale. Après avoir terminé de s’occuper de toutes ces plantes qu’il avait vu grandir, Yoichi se dirigea une nouvelle fois vers la jeune fille. Se mettant à sa hauteur, il formulait pour elle un vœu.

– Shiori, je te souhaite toi aussi de rencontrer cette personne. Ce jour venu, je n’imagine pas d’épreuve qui soit capable de t’empêcher de grandir.


* * *

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Le temps file et tu t’interroges parfois sur le degré de conscience que tu inspires à la moindre de tes actions. Défilent les mois, les années, les décennies et s’accélèrent les rémanences de ces scènes faisant la fadeur de l’existence. Tu t’ennuies ? Tu te dis que la vie pourrait être plus palpitante ? Tu te dis que c’est une matière réservée à qui se trouve posséder plus de chance que toi ? Quand se ferment les émotions et se lissent les sentiments, chaque stimulus te semble de plus en plus insipide, à t’interroger même si tu ne fais pas que suivre un schéma, au fond.

Ce que les anciens et superstitieux appellent destinée. Ce que les érudits et pragmatiques appellent déterminisme. Ce que les névrosés et anxieux appellent fatalité. Mais dis moi, toi qui te questionnes sur l’océan d’événements guidant tes expériences, as-tu déjà essayé de pincer l’instant entre le pouce et l’index ? Sens-tu le temps se figer ? Sens-tu le superflu dans l’écoulement de tes pensées ? Sens tu cette ressource inutile et précieuse à la conscience de soi-même ? Lui oisillon qui vient se poser au sommet de ce bâton de bois que je tiens en suspension, il ne se figure pas ma présence. Je suis un matériau inerte. Je suis un arbre. Je suis un nid.

Et pourtant, intérieurement, mon âme s’agite à l’instar d’un cyclone harmonieux. Hier, mes passions me blessaient. Aujourd’hui, mes passions m’échafaudent. Demain, mes passions alimenteront mes espoirs. Elles sont mon sabre et mon bouclier à la fois. Avec elles, de fragile, je passerai à indestructible pour la raison que j’incarne mon être plutôt que de le subir. D’un mouvement infime, je fais fuir le moineau qui avait confondu mon arme avec une branche. Me relevant, je sonde cet environnement que je domine. Mon regard choisit ce qui doit exister à mes sens. Ce jardin qui m’enveloppe, je ne le vois pas car je l’ai décidé. En revanche, ce bassin d’où se reflète ma silhouette trouve une place inoubliable dans le sanctuaire de ma mémoire.

Au travers de cette couverture aqueuse me servant de miroir, je discerne non pas ce que ce monde veut me montrer mais qui je souhaite voir. Je me vois ainsi recouvrir d’autres vêtements faisant mentir mes origines modestes. Sous le prisme de mon imagination, je m’esquisse un haori d’un blanc immaculé. Je me dessine un Zanpakutō qui renfermera mon pouvoir invincible. Je me peins une aura à même d’asseoir aux yeux des autres un puissant respect. Naoki Taichō, ainsi serai-je appelé par mes pairs.

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Un bruissement derrière vient exciter mes réflexes. Me retournant, je te regarde me faire face. Toi que j’ai rencontré mourante au pied de cette pierre et qui m’apparaît désormais bien vivante sur ce par-terre enherbé, m’assènerais-tu ce reproche sempiternel que je pèche par orgueil ? Suis-je ce narcisse aveugle de mon entourage comme on me fait si souvent la remarque ? Mériterais-je d’être ramené à cette place que ce monde aurait choisi pour moi ? Non. Je te sais me connaître mieux que ça pour la raison que j’ignore peu de chose sur qui tu es vraiment.

Me mettant en garde, tu viens mimer mes gestes martiaux. Comme d’accoutumée, nous partons pour échanger des coups, comme le verrait un spectateur impuissant à cerner cette essence ineffable à nos sens. Cependant, ce que nous confrontons une nouvelle fois tient pour des fragments de nous-mêmes que les mots seraient bien impuissants à traduire. Mieux que personne, nous nous comprenons. Or, tu demeures à ce moment mon contraire. Tu ne regardes pas en toi. Tu ne rêves pas au lendemain. Tu ne te définis pas par la violence. Bien sûr, de point commun, nous possédons ce mutisme trompeur à ma nature tranchante mais juste à la tienne glissante.

Si nous ne nous sommes pas approchés l’un l’autre pour nos similarités, nous l’avons fait pour notre complémentarité. Avec toi à mes côtés, il me paraît que rien ne m’est impossible. Simplement parce que tu as su me comprendre et me faire exister par ces yeux qui m’invitent à cette amélioration constante plutôt qu'à ceux de tous les autres qui m’entretiennent dans mes faiblesses. Tu es cette énergie stimulante qui fait que je te veux près de moi quand ma foi insaisissable se sera cristallisée en un accomplissement que nul ne saurait contester. Seulement, si les paroles sont inutiles à notre harmonie, tu sais quelle valeur je prête à la vanité.

Shiori, je te souhaite toi aussi de trouver ce rêve qui me verra m'émerveiller de ce qu'un autre pourrait accomplir de grand.

* * *

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Je regarde devant moi. J’apprécie la banalité d'une contemplation que l’on peut trouver dans la récurrence de paysages paisibles. J’aimerais que ce temps dure perpétuellement. Pourquoi faut-il toujours que cette inspiration dans la parenthèse d’une pause paisible ne soit que momentanée ? Se le figurer revient au couronnement de la vanité. Sans doute, si tu m’entendais dans mes pensées intimes, me renverrais-tu à une autre de ces injonctions. Que je me tienne à l’écart en dépit du sang versé pour des raisons que je ne saurais appréhender. J’attends. Je me dis qu’à cette seconde, cette vie que je sens disparaître sera la dernière. Pourtant, la suivante vient toujours à tomber, accompagnée d’une nouvelle autre, indéfiniment. Mais cela finira bien par s'arrêter, n'est-ce-pas ?

Non, c'est sans fin. Et le constatant, je me pose cette question innocente : puis-je attendre plus longtemps en mon âme et conscience ? Jusqu’à quel point devrais-je considérer que ces pertes sont encore à un niveau acceptable ? Je pourrais me protéger derrière le confort de l’ignorance. Toutefois, même de cela, j’en suis incapable. Du haut de ma tour d’ivoire, j’apprends plus que je ne le voudrais des informations que la raison commande de condamner.

Des shinigamis de la douzième division. Des tueries justifiées par une obscure nécessité de rééquilibrer la balance entre les mondes. Devrais-je donc me rassurer que ces massacres se réalisent pour la plus raisonnable des justifications ? Ces visages, je les ai vu se répéter des centaines de fois dans mon train de vie. Des discussions. Des regards. Des concessions.

À chaque rencontre, nous investissons une partie de nous-mêmes, dit-on. En effet, ne nous déstructurons nous pas à chaque moment où une relation se termine par l’instant d’une relative ou absolue séparation ? Plusieurs fois, au son de mon Buwa, je me retrouva à te partager la profondeur de ce vide me rongeant incessamment. Je voudrais que ce mensonge de tranquillité me berce et m’endorme. Hélas, à l’instant où je songe à fermer les yeux, j’investis mon imagination dans l’expérience horrible de cette ultime vision avant qu’une fin brutale et étrangère ne vienne m’arracher à tout ce que je bâtis depuis le jour où je naquis.

Alors, ton tour vint de me répondre de ton Koto. De ces dialogues emportant nos sentiments et que les émotions viennent bousculer, évaporer puis transformer en une matière propre à ce que la sensibilité accueille. Tu me connais. Tu sais quelles erreurs je pourrais faire. Tu crains pour les conséquences qui viendraient à me frapper. Mais malgré tout, cette inquiétude échoue à vraiment métamorphoser mes notes prenant au contraire une substance plus pesante. Ce fardeau, tu ne saurais cette fois simplement le soutenir d’artifices, aussi raffinés soient-ils. Sans doute le réalises tu. Autrement, ta musique ne traduirait pas à présent de cette fragilité angoissée. Je sentais dans leur essence de ces accompagnements harmonieux qui s’étaient construits sur ma partition. Pourtant, comme il put arriver rarement, tu échoues à la rediriger là où tu saurais trouver la dernière mesure à même d’arrêter ta musique.

Au lieu de ça, tu finis sur cette maladresse dissonante. Pendant ce temps, je poursuis sur une route que tu ne voulais pas me voir emprunter. Mes émotions m’orientent vers une détermination à même de transformer ton angoisse en peur. Pourquoi ne veux-tu pas voir que dans cet écoulement, je suis la plus paisible alors que j’étais partie la plus tourmentée ? Si tu me comprends, alors tu me laisseras poursuivre jusqu’au terme de ma représentation. Si tu me fais confiance, alors tu me laisseras passer des intentions aux actes. Si tu m’aimes, alors tu garderas de ce présent un héritage qui verra ces souffrances injustes s’estomper.

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Yoichi, alors que des nuits nous séparent de cette discussion muette, je puis confirmer que tu me comprends, que tu me fais confiance, mais d’amour… je voudrais que tu le changes en espoir s’il devait t’abandonner. À ces pensées, je voudrais m’encourager, mais je réalise au contraire qu’il pourrait me faire facilement défaut à la confrontation avec les loups. De shinigamis, ils m’apparaissent désormais comme tels. Des agents naturels de destruction qui pour survivre s’en retrouvent à exécuter froidement le rôle que ce monde leur a voué.

De toute mon âme, je veux leur faire entendre raison. Mais au fond de leurs yeux, je ne distingue plus aucune lueur d’humanité. L’auraient-ils perdu pour se protéger après la peine infligée ? Ils m’effraient. Ils m’effraient, mais malgré cela, je n’arrive pas encore à leur vouer le plus petit sentiment de haine. À la place, je ne suis que plus renforcée dans la certitude qu’aucuns de mes gestes, de mes choix, de mes mots ne sauraient parvenir à faire vaciller leur sombre résolution. À ce stade, je comprends avec une limpidité désarmante quel danger me guette à m’exposer si près de leurs crocs.

Il faudrait que je me retire, que je fuis, que j’obéisse à ce que me murmure puissamment cet instinct de conservation qui s’éveille en mon être. Mais alors, ne deviendrais-je pas à mon tour un animal incapable de changer le cour des choses ? Lorsque je me tourne vers les innocents réduits à l’état de proies déshumanisées, je m’arrête et réalise quelle erreur je ferais à m’échapper maintenant. Si je ferme à nouveau les yeux, alors rien, absolument rien ne changera. Pour jeter le plus infime mouvement d’aiguille dans cette tapisserie sinistre, il me faut marquer l’initiative irrationnelle d’un risque désintéressé. Ce pourquoi je me retrouve à étouffer cette terreur et m’armer d’un courage me voyant me confronter à ces prédateurs.

Cette action me vaut de discerner une suspension momentanée dans l’écoulement du temps. Derrière la figure monstrueuse de ces bourreaux, je parviens à lire un fragment d’humanité. Eux-mêmes sont traversés de ces émotions les faisant douter. Cette fraction de seconde suffit à me soulager, me rassurer, quand bien même, au terme de cette révélation, je finis brutalement à terre, impuissante à agiter la moindre parcelle de mon corps. Faiblissante, je souriais intérieurement. J’étais morte en étant demeurée moi.


* * *

Naoki Shiori Pnj-210

Dans la résidence du seigneur endeuillé se jetait une averse nocturne. Koharu observait, larmoyante, son maître jouer seul de son Koto sur la terrasse submergée du jardin intérieur. Tandis que la pluie fouettait violemment ses vêtements trempés, son geste ne montrait le moindre signe de tremblement. La musicalité de ses notes, pour tumultueuses pouvaient-elles apparaître à son unique spectatrice, trouvait une toile vierge sur laquelle peindre des émotions terrifiants de présence. Son caractère paisible que l’écho d’un Buwa charmait d’accoutumée se perturbait d’une solitude brutale que la musique échouait cette fois à exorciser.

À compter de cette nuit, le fond des pensées de Yoichi deviendraient insondables à quiconque l’avait connu jusqu’à maintenant. Les discussions se transformaient en ordres. Quant à ses sentiments, cela serait la dernière fois qu’une personne se trouverait à en apprécier un aperçu inquiétant. Ses nombreux orphelinats avaient vu sortir plusieurs adultes prêtant une foi aveugle envers leur bienfaiteur. C’était sans parler tous ceux dont la vie tragique avait été sauvée par la générosité inspirée de cet homme.

Pour cette raison, aucun n’avait trouvé de motif à ignorer l’appel à l’aide silencieux de ce noble qui contrastait avec tous les autres enfermés entre les parois de luxe qu’ils s’étaient évertués à amasser autour d’eux. Par ailleurs, une plaie béante s’était ouverte dans le cœur de chacun aux crimes impardonnables des agents du Seireitei. Combien d’âmes innocentes étaient mortes sans aucune justification apparente ? Plusieurs dizaines de milliers ? Non, encore davantage ? Peu importe le nombre, cela n’enlevait rien à l’exclusivité de la souffrance que chacun pouvait éprouver à la perte d’un parent proche. Les survivants savaient eux-mêmes quelle peine similaire pouvait présentement frapper celui qui les avait invités à se réunir.

Naoki Shiori Pnj-710

Seulement, plutôt que de retrouver le seigneur Takeuchi, un vieil inconnu venait les accueillir et porter les volontés de celui qui en était venu à faire appel à ses services. Kenzo Tanaka, à la lumière de ses propres présentations. Un mercenaire aux origines mystérieuses mais à la force incontestable, qui ne trouvait étrangement peu de différence avec celle des officiers du Gotei 13. Certains s’épandaient en des rumeurs quant à ce que celui qui les formaient au combat contre les shinigamis en comptait lui-même autrefois. Un déserteur ? Oui, cela semblait plausible.

Seulement, aucun n’était parvenu à en apprendre davantage. Au creux de cette forêt profonde qui s’était constituée en un terrain d’entraînement, la seule information parvenue aux plus curieux était que plusieurs autres camps de cette nature avaient été constitués. Une supposition confortée des nombreux va et vient de ce maître d’arme qui paraissait avoir une charge bien plus grande que de simplement leur enseigner à eux l’art du sabre. Car de sabres, il leur en avait été fournis à chacun. Peu s’en retrouveraient à s’interroger sur la manière dont ce Kenzo était parvenu à s’approvisionner de ces armes normalement interdites aux communs du Rukongai. Les avait-il tous volés du cadavre de plusieurs shinigamis ? C’était là une supposition plausible qui ne devait pas mériter d’être creusée davantage.

En effet, l’important consistait à transformer une rage intérieure en une force extérieure à même de venger la dame défunte du seigneur ainsi que tous les autres sauvagement massacrés dans ce génocide d’âmes errantes. Motivés d’une même volonté, ceux qui s’entraînaient développeraient rapidement un solide esprit de camaraderie, sensibles aux passions lancinantes que chacun partageait. Parmi eux, comptaient Shiori et Naoki. Deux âmes sœurs qui pouvaient définitivement se lier pour une cause commune.

Une nuit glaciale où Kenzo considéra que tous étaient parvenus à un niveau suffisant, l’ensemble des révoltés s’en verraient réunis dans la gorge d’une cavité souterraine. À l’intérieur, plusieurs bougies étaient allumées, éclairant faiblement les lieux. Armés de leurs katanas, tous s’attendaient à recevoir les dernières directives qui les avait vu se retrouver.


* * *

Naoki Shiori Pnj-1210

– Vous voulez vivre ? Entre-tuez vous jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un seul.
– … Que racontez-vous maître Tanaka ? Vous… Vous devez plaisanter, hein ? C’est une mauvaise blague, c’est ça ?!

Une expression de stupeur sur la figure de chacun. Parmi les personnes en présence, certains ne voulaient pas y croire. Pourtant, ce que Kenzo avait montré de sa personnalité jusqu’à maintenant n’avait jamais laissé suggérer qu’une telle plaisanterie était impossible. Ce pourquoi le sang de chacun se glaçait. Quant à ceux qui refusaient d’accepter la situation se profilant, leur représentant s’avançait vers le vieil homme, un sourire crispé.

– Soyez sérieux un peu, ça ne fait rire personne vous voyez bien ! Dites nous plutôt ce que le seigneur Takeuchi attend de nous ! Si nous nous sommes entraînés à en cracher du sang, c’est pour venger dame Hikari et tous les autres ! S’il vous p-…

D’un mouvement vif, l’homme désespéré qui s’était approché de trop près était pourfendu de haut en bas. Une effusion de sang jaillissait de sa plaie profonde. La seconde suivante, son corps s’effondrait au sol pour ne plus montrer aucun signe de vie.

– Pauvres sots… Vous ne m’avez pas entendu ? Entre-tuez vous. Je ne me répéterai pas une troisième fois. L’entrée de ce sanctuaire ne sera pas libérée avant que je ne sente plus qu’un unique reiatsu parmi vous. Vous avez compris à présent ? À vos sabres, alors !

Éberlués devant cette scène surréaliste, nul autre n’osa s’avancer vers le maître qui se reculait désormais pour sortir et laisser ses subordonnés bloquer le passage avec une pierre. S’ils s’étaient rués vers lui tous ensemble, seraient-ils parvenus à se sortir de ce traquenard ? Rien n’était moins sûr. Après tout, pendant le temps de ces entraînements, tous avaient pu voir que le maître Tanaka se trouvait dans une toute autre catégorie de combattant. Sans doute était-il en mesure de tous les éliminer à lui seul s’il le voulait. Quand bien même cela serait faux, il aurait fallu que le choc s’évanouisse suffisamment rapidement pour que tous puissent bouger d’un seul corps.

Quant à moi ? J’étais demeurée interdite. À l’instar de la plupart, je ne pouvais réellement mesurer le poids qui venait de s’abattre sur nous. Tout au plus pouvais-je percevoir la menace qui s’affichait en mon dos. Avec un temps de retard, je me retournais vers l’un des guerriers dont le regard s’était perdu dans une terreur assassine. Shun. Le cadet de notre groupe que je m’étais retrouvée plusieurs fois à rassurer lorsqu’il en venait à douter sur ses capacités. Plutôt que de préparer la riposte, je me laissais distraire par cette réminiscence fugace qui m’empêchait de l’identifier comme un ennemi.

Fermant un instant les paupières, inconsciemment, je me préparais à recevoir le coup. J’avais de toute manière manqué de cette force d’adaptation pour survivre. Du moins, le pensais-je, jusqu’à ce qu’une autre ombre surgisse afin de s’interposer, chassant la lame de Shun avant de le trancher à la gorge. Sitôt, mes yeux suivaient ceux désemparés du garçon qui s’échouaient par terre. Les relevant vers celui qui m’avait défendue, je reconnaissais le dos découvert de Naoki.

– Que fais-tu Shiori ?! Ce n’est pas le moment de lambiner, tu vois bien ! Protèges mes arrières, j’en ferai de même pour toi, ALLEZ !

Une injonction puissante qui eut l’effet de faire trembler mon esprit et éveiller dans mon être une adrénaline à même de me faire serrer le manche de mon arme. Une lueur vive dans les yeux, j’offrais mon dos à Naoki comme il l’avait fait pour moi, sourde à la possibilité qu’il en profite pour me piéger. Cela aurait fait mentir tout ce que j’avais connu de lui depuis le jour où nous nous étions rencontrés. Nous possédions un tel lien. Et alors que je me défendais avec un sourd enragement vers les amis qui s’étaient mués en bêtes sauvages, l’ouverture que je laissais derrière ne me verrait accueillir nulle blessure.

Il demeurait à présent l’unique personne en qui je pouvais vouer une confiance aveugle, de quoi me permettre de basculer entre peur et colère, entre tristesse et dégoût dès lors que s’éteignaient un à un les éclats d’énergie spirituelle que j’avais appris à apprécier. Je pouvais hurler, pleurer, trembler… Cependant, l’impulsion que Naoki m’avait lancé faisait s’évanouir toutes ces ombres de faiblesse qui auraient pu décider de ma fin autrement. Devant les enchaînements ininterrompus et chaotiques d’affrontements à mort, mes pensées mourraient à la faveur de mes instincts les plus enfouis. Je devais survivre. Et sur cette seule détermination, je coupais le fil de destinée de tous ceux en qui j’avais investi une partie de moi-même.

Je voudrais rencontrer femme qui me corresponde et fonder avec elle une famille me faisant oublier les malheurs du temps.

C’est ce que tu me dis, Yugo.

Je voudrais ouvrir un restaurant d’où je pourrais accueillir des scènes de joie que la misère étouffe trop de fois.

C’est ce que tu me dis, Hiroshi.

Je voudrais que mes toiles soient reconnues des personnes qui m’entourent et celles que j’admire. Que je me sente acceptée, comprise.

C’est ce que tu me dis, Hana.

Ensemble, nous avons rêvé. Ensemble, nous avons ri. Ensemble, nous avons pleuré. Vos visages avaient contribué à me figurer une famille que je ne m’imaginais pas rencontrer un jour. Mais à cet instant, tout ce que m’inspirent vos visages sont ceux de loups blessés amenés dans leurs derniers retranchements. Je suis pour vous la chasseresse vous forçant à chercher à me mordre la jugulaire par élan de désespoir. Mais dans ce mouvement destructeur, le tragique de cette situation fait que je n’ai d’autre choix que d’éprouver ce même sentiment à votre encontre. Alors, je blesse. Alors, je tue. Alors, je marche sur vos cadavres. J’oublie ce que j’ai vécu. J’oublie ce que je pense. J’oublie ce que je ressens. Je concentre chaque parcelle de mon être à faire bouger ma lame pour donner à ma main la sensation de trancher dans des linges humides.

J’aimerais qu’ils ne soient que cela plutôt que votre chair.

Puis, après le tintamarre des chocs de métal, des cris de fureur, des râles d’agonie, le silence finit par peser. Épuisée, je chancelle. Déséquilibrée, je manque de tomber en arrière. Mais au lieu de ça, je sens que mon dos s’adosse sur celui d’un autre ennemi. Ainsi, il en resterait un dernier. Haletants, nous reprenions tous les deux notre souffle dans une fraction de temps qui semblait se suspendre à l’infini. Finalement, nous nous dégagions l’un de l’autre afin de nous faire face. Ce faisant, mon regard s’en allait traduire un bouleversement ineffable.



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– Tu ne dois pas avoir peur, Shiori. Ne le vois-tu pas ? Nos armes ne sont que des bâtons de bois. Souviens toi, combien de fois avons nous joué cette scène depuis notre enfance ? Tu ne dois pas trembler. Sinon, tu vas perdre.

Je m’interroge. Comment ta voix peut-elle être si calme à ce moment ? Ta posture est douce. Ton regard n’exprime aucune haine. Au contraire, il me semble que tu cherches à me rassurer, me guider vers le bon état d’esprit. À t’observer, je balaye la pensée de la fatalité qui nous guette. Tu as toujours été ainsi. Peu importe jusqu’à quel point je sus sonder ton esprit, il est toujours demeuré une partie énigmatique à ma perception. De fait, je finis par me tranquilliser, maîtriser ma respiration, contenir mes tremblements et te sourire en réponse au tiens. Je lève cette lame que j’imagine de bois et me mets en garde. Le monde est tel que nous l’imaginons, n’est-ce-pas ce que tu me disais toujours ? Alors jouons, Naoki.

– Je vois que tu es fin prête, j’arrive.

Et là-dessus, nous cesserions de discuter par les mots. Nous retrouvions de ce langage complice à l’orée des gestes. Dans cette danse martiale, nous nous comprenions vraiment. Nul ne souhaitait blesser l’autre. Nos charges n’étaient pas imbibées de cette aura meurtrière. Pourtant, de blessures, je les sentais s’additionner à toutes celles qui étaient venues marquer leurs empreintes sur mon corps depuis que ces tueries avaient commencé. Elles devaient me rappeler le sinistre de la situation. Seulement, pour une raison que je ne m’expliquais pas, j’étais extérieure à ces tracas.

Tandis que je ne dépendais plus que de mes instincts primaux pour survivre à chaque nouveau combat, ici, je sentais que mes pensées, mes émotions ainsi que mon humanité se recomposaient. Plutôt que de me concentrer dans le mouvement de mon sabre, je m’enveloppais dans ces souvenirs agréables que j’avais partagé avec toi. C’était là le poids des coups que tu m’adressais. Ce mouvement, je le connaissais. Il était parvenu à me faire trébucher et tomber dans le bassin. Piteuse, je me souviens comme nous avions ri à cet instant. Ici, je dérivais mon pied sur le côté pour ne pas perdre l’équilibre. Comme si j’allais me faire avoir deux fois par le même coup. Toi-même, tu le réalisais et me souriais devant la répartie que j’opposais à ta taquinerie.

À mon tour alors de prendre les devants et de chercher à te dépasser sur le côté pour te frapper le poignet de mon bâton. De cette façon, j’étais parvenue à te désarmer alors que tu t’imaginais m’impressionner avec l’une de tes bottes secrètes. La rupture remarquable entre la vantardise qui s’annonçait et la déconvenue qui s’imposa ne manqua pas encore de prêter à une scène amusante. Cette fois, tu parvenais à reculer d’un pas et baisser juste assez ta garde pour te donner l’opportunité de me couper superficiellement au ventre. Toi-même, tu n’étais pas de nature à te faire avoir par quelque chose que tu avais déjà vu.

Comment pourrais-tu prétendre devenir capitaine au sein du Gotei 13, autrement ? Depuis petite, j’ai été éblouie par la grandeur de tes espoirs. Et pour être honnête, j’ai toujours été persuadée que rien ne t’empêcherait d’y arriver. Peu importe le nombre de fois où tu pus rencontrer l’échec, tu as toujours su trouver en toi de cette énergie pour te relever et toujours plus gagner en force. Tu n’as jamais cessé de progresser, de dépasser tes limites, de corriger tes défauts. Aussi, comment pourrais-je bien m’imaginer que tu pourrais échouer à la fin ?

Quant à toi, tu as toujours voulu sortir de moi le rêve que je pouvais renfermer. À cela, je ne t’ai guère vraiment donné d’occasion d’étancher ta curiosité. Mon défaut n’a-t-il pas toujours été de manquer de mots pour exprimer ce que j’avais en moi ? Je préférais éclairer mon quotidien de ce que tu pouvais me montrer d’accomplissements. Manquais-je alors de personnalité ou d’ambition ? Peut-être. En tout cas, c’est là quelque chose que tu ne m’as jamais reproché, même si tu as toujours souhaité que j’en vienne à trouver un trésor qui me serait propre.

Malgré tout, tu dois bien le ressentir maintenant que nous échangeons à cœurs ouverts. Tout ce que j’ai dont j’ai toujours rêvé, c’était de demeurer près de toi, où que tu ailles. Après tout, ne m’as tu pas sauvée dès l’instant de notre rencontre ? Je te vois encore perché sur cette pierre. Et depuis, tu m’as toujours semblé sur une hauteur que je ne saurais être en mesure d’atteindre. Tu es mon inspiration. Tu es la voie que j’ai choisi, Naoki.


Comme si tu avais entendu ma dernière pensée, je ressens à cet instant que le temps cesse de tourner. Interrompue dans mon introspection, je réalise que ma lame a trouvé la voie de ta poitrine. De la commissure de tes lèvres s’échappent des traînées de ce sang suffisant à me réveiller de mon songe. Sans doute dois tu percevoir sur mon visage le tremblement venant rompre la sérénité que nous étions parvenus à construire tous les deux. Et certainement est-ce aussi pour cette raison que tu viens attraper doucement ma tête pour la poser contre toi.

– Cette voie que tu t’es trouvée… il semble que je ne pouvais pas la vaincre, finalement. Quel capitaine médiocre aurais-je fais, autrement.

Tremblante, des larmes débordaient de mes yeux sans que je ne sois capable de les contenir. Je souhaitais que le temps s’arrête. La pensée de ce qui pouvait advenir dans les dix prochaines secondes me terrifiait et nouait ma gorge, impuissante à faire sortir le moindre son de mes lèvres.

– Je suis satisfait. J’ai enfin pu faire sortir ce que tu avais en toi. J’ai gagné, Shiori… désolé.

Cette voix qui me venait jusqu’à l’oreille, je la sentais s’éteindre. Cette main qui me tenait la tête, je la sentais se relâcher. Cette énergie qui te tenait debout, je la sentais s’estomper. Les yeux baissés, mon champ de vision torturé par l’obscurité et l’anémie me faisait voir une image que mon esprit refusait d’assimiler. Mes genoux frappant au sol, je te retournais pour chercher un soupçon de vie sur ton expression. Au lieu de ça, je trouvais un masque inerte où il ne m’était plus permis de te sentir. Tu n’étais plus là, jetant sur mon environnement un silence écrasant. Choquée, je me reculais brusquement pour me relever maladroitement.

L’équilibre fragile, des vertiges me prenaient. Perdue, je regardais mon environnement, tourmentée par ces silhouettes familières qui avaient constitué mon quotidien. Désœuvrée, je hurlais à m’en déchirer la voix. Ce faisant, s’en allaient les pensées, les émotions et les sentiments, ramenée à cet état où je ne me sentais plus humaine. Horrifiée, un son s’affirmait plus loin là où Kenzo avait scellé la sortie. Des silhouettes sombres m’apparaissaient à cet endroit, différentes de celles qui nous avaient laissé ici. Prise de vertige, j’eus le réflexe incontrôlé de faire deux pas en avant. Baissant les yeux dans cette impulsion, je levais dans le même temps mes mains, saisie par ce sang qui maculait le bout de mes doigts. La seconde d’après, je perdais connaissance, dégagée de ce cauchemar insoutenable.
Naoki Shiori P-shini


Dernière édition par Naoki Shiori le Dim 11 Sep 2022 - 12:14, édité 6 fois
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Naoki Shiori

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Naoki Shiori

Données Spirituelles
Grade: Vice-Capitaine de la 2ème Division
Ven 2 Sep 2022 - 9:51 - Naoki Shiori

Naoki Shiori


Histoire (2/2)

Naoki Shiori Pnj-110

Dans le silence éternisé de mes pensées, je finis par m’efforcer de sortir de ma mémoire les couplets harmonieux que j’entendis plusieurs fois aux moments où le seigneur Takeuchi nous rendait visite. Il me semblait toujours que le tumulte des tracas s’évanouissait lorsqu’il jouait de son Koto au sein de la résidence. Je perdais mon attention vers des passions qu’il ne m’était pas possible de capturer avec des mots. Une seule conviction dominait dans mon champ de perception : cet homme était foncièrement bon. Et aujourd’hui encore, je n’arrive pas à le détester malgré l’affliction qui me saisit au songe de cet événement dramatique.

À mon réveil, je me trouvais dans cette geôle. Je comprenais que des forces des unités spéciales du Seireitei avaient découvert le pot-aux-roses trop tôt ou trop tard. Cela devait dépendre d’où on se plaçait. S’ils étaient arrivés ne serait-ce qu’un peu plus tôt, Naoki aurait-il survécu ? S’ils l’avaient fait plus tard, serais-je devenue un instrument de guerre sans émotion ? Dans ce juste milieu, étaient-ils arrivés au meilleur moment ? À présent, je pouvais endormir ma peine dans ce terrain neutre où n’écloraient plus les rencontres si ce n’était celles superficielles des quelques gardes que je voyais passer devant ma cellule.

Mutique, je gardais pour moi mes sentiments, j’ignorais les interrogations. Moi-même, j’échouais à vraiment expliquer ce qu’il s’était passé, encore embourbée dans la fosse illusoire du déni. En conséquence, on me laissait moisir ici un temps que je ne serais plus capable de mesurer. Que se passait-il dehors ? Qu’est-ce qu’il pouvait s’y dire sur moi ? Parfois, j’entendais fugacement les termes de « potentiel dangereux ». Une dénomination revenant moins souvent au gré des années où je n’avais montré aucun signe d’hostilité.

Je me refusais simplement de céder à une fragilité humaine que je me refusais. Dans mes songes, je demeurais prisonnière de ces instants où j’affrontais pour la dernière fois Naoki.

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Nous nous étions figurés que notre combat ne différait en rien aux coups que nous nous échangions en jouant. Son esprit possédait une telle force à dénaturer la réalité pour nous faire transformer nos sabres en des matières inoffensives. Pourquoi fallait-il alors que depuis, je ne sois plus capable de me représenter autrement cette scène que pour ce qu’elle possédait de cruellement réelle ?

Par moments, je songeais aux mots que m’adressa le seigneur Takeshi alors que je n’étais qu’une enfant. Il me disait ne pas imaginer d’épreuve que je serais incapable de relever en rencontrant la personne qui me ferait consentir à y investir toute mon âme. Alors… qu’était-ce que cela ? À présent, je me sentais morte. Dépossédée de qui j’étais. Était-ce qu’il avait réalisé son tort à la perte de dame Hikari qu’il changea à ce point ? Je peux bien imaginer à présent la souffrance qui dut le gagner. Malgré tout, pourquoi est-ce que je ne parviens pas à le maudire ? Cela doit-il signifier que je lui offre mon pardon ? Rien ne saurait être moins sûr. J’ignorais moi-même quel genre de réaction me prendrait si je devais le trouver devant moi.

Était-ce plutôt que je me plongeais encore de trop dans le poids de la perte de Naoki ? Son rêve m’avait toujours ébloui, autant que sa manière d’être. Mais maintenant que j’avais mis un terme à cette destinée admirable, je me laissais ronger par un naturel sentiment de culpabilité. Pourquoi avait-il fallu que ce soit moi qui survive ? Mais encore, pourquoi ne ressentais-je pas de cette rage qui me sonnait si évidente ? Était-ce donc qu’il ne m’avait pas laissé de tel héritage ?

Exclue du champ de vie qui faisait s’enchaîner les nouvelles expériences, je consacrais mon temps infini à réunir les fragments brisés de ma raison pour me retrouver. Dans l’alchimie de cette méditation, je me recomposais si bien que d’artificiel, mon calme trouvait une aura surnaturelle. À savoir maintenant jusqu’à quand ce dernier s’entretiendrait.

Un jour qui ressemblait à tous les autres, l’on m’ouvrit la cellule et me libéra les poignets de leurs entraves. Une personne que je ne connaissais pas avait intercédé en ma faveur pour me réhabiliter dans les armées du Gotei 13. Quelle ironie que me soit ouverte cette destinée… En ce cas, à compter de ce moment, je me ferais appeler Shiori Naoki. Ainsi, j’allais rester près de toi. Et de cette manière, peut-être parviendrais-je à réaliser ce rêve que tu m’exprimas tant de fois. Tu me disais souvent que Naoki Taichō sonnerait bien. Restait à voir si mon caractère me porterait à de telles fonctions de premier plan. De cela, j’en doutais fort. Mais qui sait ce qu’il pouvait se passer à l’avenir.

* * *

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Si je te disais que ton histoire pouvait mourir sans que tu ne t’arrêtes de respirer, comment réagirais-tu ? Sans doute me laisserais-tu apprécier de ton expression une forme de surprise. Laisse moi te préciser ma pensée… Te souviens-tu cette discussion que tu eues avec le seigneur Takeuchi dans ton enfance ? Il te parlait de ces rencontres que tu serais amenée à faire au cour de ton existence. Koharu, Yoichi, Yugo, Hiroshi, Hana, Shun et même Naoki. Envers tous, tu investis une partie de toi-même pour qu’à la fin, tu n’existes plus que par ces discussions banales qui s’étaient imposées dans ta routine. Un lecteur extérieur, comme moi, te demanderait alors : quel intérêt d’avoir tant vécu ? Que reste-t-il de tout ça à la fin ? Qu’en as-tu gardé ? Plus important, qu’as-tu laissé derrière toi ?

Il y eut cette remarque optimiste mais incomplète :

– Shiori, si tu devais en venir à rencontrer cette personne te faisant consentir à remettre ton âme vers un point de non-retour, alors je n’imagine pas d’épreuve qui soit capable de t’empêcher de t’élever à des sommets inégalés.

L’incomplétude réside dans une vérité aussi simple que tranchante : cette personne est morte. Tu l’as tuée. Et à présent, te voilà amenée dans une académie sur une recommandation qui t’est en tout point étrangère. Dans les nouvelles conversations partagées avec ces camarades de promotion, tu demeures une spectatrice distante qui réalise soudain l’inanité d’un vécu sans écho. Bien sûr, quelques curiosités t’ont quelques fois invitée à ranimer les vestiges de ton identité d’antan. À ces moments, tu te laissas submergée par une souffrance silencieuse qui te voyait éluder subtilement ce que furent tes épreuves. Maintenant que tu y songes, comprends-tu enfin le fond de mon observation ?

Dans le contraste des expériences, tes réminiscences ne sauraient plus jamais être déterrées de la terre où elles ont été profondément enfouies. Tu es morte, Shiori. Cette réalité te revient à chaque exercice où l’on attend de toi que tu assimiles les bases élémentaires du Kenjutsu. Autrefois, tu étais une épéiste talentueuse. À présent, ces scènes répétées où l’on vous conduisait à simuler les duels qui seraient amenés à se produire à l’instant où vous incorporeriez les armées du Gotei 13 suscitait en ton âme et conscience une forme de tétanie empreinte d’une culpabilité te faisant voir son visage en lieu et place de celui de tes adversaires successifs.

C’était sans compter ce malaise grandissant à mesure que tu progressais dans ton apprentissage. Combien de fois te répétas tu ce cauchemar à susciter des paniques nocturnes inquiétantes pour tes simulacres de relations ? Ce rêve, tu lui as volé. Et ramenée sur cette voie, un verrou inconscient scellait ce que tu forgeas au miroir que te renvoyèrent leurs regards. Ta mémoire devint ta malédiction, un poids insurmontable où il te fallait renaître pour la cruelle raison que ton âme était brisée. Un processus long qui suscita probablement quelques formes de déception envers le mystérieux inconnu qui avait plaidé en ta faveur pour que tu sois sortie de l’isolation.

Tu n’étais pas de ces génies qui marquaient rarement l’histoire de cette académie qui t’accueillait, même si parfois, quelques fulgurances faisaient la circonspection de tes exterminateurs. Tu étais devenue un potentiel imprévisible que les douleurs fantômes éveillaient ou endormaient invariablement. Étais-tu médiocre ou prodigieuse ? Une récurrence provoquait ces divers changements. Il ne suffisait que d’un regard posé sur toi pour qu’un effroi ineffable te frappe et te fasse reculer de deux pas quand tu avais avancé d’un seul.

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Seulement, une unique chose te retint d’entrer dans cette complaisance de souffrance qui menaçait alors la courbe de ton évolution : la lueur d’une attention qui ne te considérait pas pour ce que tu révélais de façade mais pour ce que tu avais suggéré de toi par ces fractions de talent que tu avais laissé voir furtivement en l’occasion de quelques instants fugaces dans tes entraînements. Eishun Ishikawa était un enseignant aguerri de l’académie qui savait sortir des schémas classiques de sa fonction pour raisonner selon les éclats inhabituels que certains élèves pouvaient montrer. Comme enseignant, il avait fini par assimiler la force d’un courant naturel par rapport au détour forcé d’une rivière qui pouvait bien irriguer un temps les rizières mais échouer à son rôle dans le caprice d’un lit fluctuant.

Tu avais besoin d’être ainsi considérée pour jouir de la faveur d’un environnement dont l’essence tenait à reformater qui tu étais. L’académie possédait ce pouvoir de transformer une page blanche en une préface à même d'engager une nouvelle histoire. Aussi, par ses lumières, te retrouvas-tu à outrepasser une partie de tes verrous afin de redonner un sens à ton existence. À quoi cela rimait de demeurer prisonnière de lignes qu’une sinistre tragédie avait rayé ? S’il pouvait encore te voir, ressentirait-il de la satisfaction à ce que tu méprises le présent qu’il te fit au prix de sa vie ? Bien sûr, tes tourments n’allaient pas se taire si facilement. Pourtant, Eishun porta à ton attention une sagesse que tu pouvais bien accueillir à l’orée de cette seconde chance qui t’abandonnerait si tu devais te refuser à la saisir.

– Laissez-moi vous partager mon observation, si sévère puisse-t-elle vous apparaître. Vous gâchez votre potentiel, Shiori. À la lumière de ce que j’appris à la lecture de votre dossier, je ne devrais pas être surpris. Je n’imagine pas que l’on puisse se remettre si simplement d’une telle expérience. Vous êtes une marginale et en d’autres temps, les autorités du Gotei 13 n’auraient jamais toléré que vous puissiez être réhabilitée.

Pourtant, vous êtes là devant moi et suivez mes cours au même titre que tous les autres élèves qui occupent les bancs de cet amphithéâtre. Vous pourriez penser qu’entre tous, vous ne méritez pas votre place ici. Entre nous, je vais vous le dire comme je le pense : cela ne dépend que de vous. Si je prends la peine de vous consacrer de ce temps, c’est que j’ai discerné dans votre profil des qualités rares que j’aimerais voir s’épanouir.

Oubliez donc ce que vous avez vécu. Consacrez-vous à vos études. Garantissez-vous un avenir. Je le répète, mais si vous êtes ici aujourd’hui, c’est que l’opportunité qui se présente à vous est bien réelle. Ne réfléchissez pas, quitte à vous tuer à la tâche. Travaillez jusqu’à l’épuisement si cela peut vous soulager. Mais ne gâchez pas votre potentiel. Comprenez que la vie possède le sens qu’on lui donne.


Ces mots n’étaient pas de la compassion. Ces mots n’étaient pas de la pitié. Ces mots n’étaient pas de la prévenance. Ces mots capturaient ton ressenti avec une justesse propre à te pousser en avant. Le point de départ d’une réécriture qui transformait ta peine en une énergie autodestructrice au commun mais salvatrice à ton traumatisme.

Il est naturel que dans l’ombre d’une tragédie, un cœur humain se décourage, s’apitoie et désespère. Il est admirable qu’en dépit de ces blessures mortelles, une aveugle détermination génère les actes propices à dessiner une explosion de progression. L’expérience a pointé du doigt quelle épreuve pouvait te retenir de grandir malgré que tu aies fait la rencontre précieuse d’une personne en qui tu as investi l’entièreté de ton essence. Survivre à cette perte, c’est t’ouvrir à l’opportunité que l’on trouve à sauter dans le puits de l’abysse. Dans cette obscurité, tu ignores quelles sont tes limites. Dans cette obscurité, tu ne ressens plus la douleur de ton fracas sur des parois invisibles que tu aurais évité en des temps ordinaires. Dans cette obscurité, tu traverses les barrières interdites de la raison à la faveur d’un territoire inexploré de ton subconscient.

Dans cette chute inconsciente, tu as grandi à une hauteur qui aurait certainement dépassé les attentes de celui qui commença par t’inspirer pour finir par te détruire.

* * *

Naoki Shiori Pnj-1810

À l’origine, je n’étais qu’une page vierge. C’était là inhérent à ma nature. Pour autant, quelle ne fut pas ma surprise de réaliser que tu m’étais semblable à l’instant où j’ai rencontré le creux de tes mains ? Comprends tu quel a pu être mon désarroi à cet instant ? Après tout, ne suis-je pas née pour me constituer au reflet que me renvoyait ton essence profonde ? À l’instar de la surface d’eau d’un bassin, tu m’évoquais une image dénaturée par les frémissements des vaguelettes. J’échouais à te capturer telle que tu étais. Comprends tu qu’ainsi, tu me condamnerais à une existence malheureuse ? Alors que tu me maniais, j’angoissais au constat que tu te fermais à moi. Pouvais-tu comprendre que ce mur levé entre nos deux sensibilités nous retenait de grandir ?

À la vérité, même si je me heurtais à ta solitude, j’avais déjà hérité d’un fragment de ton âme qui me permettait de saisir la peine qui t’enracinait à cette terre de stagnation. Le silence était le meilleur investissement que je pouvais te consacrer, comme une offrande nourrie de l’espérance que le temps venu, tu consentirais à me regarder, m’entendre et m’accepter. Alors, je t’observais dans la parenthèse de ton abattement. De cette manière, j’esquissais les sonorités de ta fragilité comme les indices d’une énigme dont la résolution me verrait t’apporter la ressource à la faim te tétanisant. Patiente, je devinais ton histoire par les signes extérieurs qui attrapaient ton intérêt, par les émotions qui portaient tes déterminations, par les signes qui pouvaient faire l’inspiration de tes décisions. Avançant ainsi dans l’exploration, je me découvrais une personnalité qu’une pierre brute n’aurait pas dû posséder. Était-ce que déjà, tu m’avais influencée avant même de me rencontrer ?

Intérieurement, je souriais aux couleurs que prenaient mes sentiments. Et d’embellissement, j’en trouvais pour façonner ton univers. À cette fin, une énergie désespérée en venait à alimenter mes efforts. Une énergie que je devais transformer en un refuge à tes tourments. J’ignorais vers quoi tu te ruais exactement. Cependant, j’avais l’intuition de ton besoin. Pour le changer en une matière fondatrice, il me fallait simplement apprendre à lire en moi. Car si je crus d’abord à ton indifférence, bientôt, je me rendis compte de ce lien aussi fragile que fertile né de ton esprit inconscient.

Une nuit que je sentis ta pensée errer dans les couloirs de l’introspection, je t’ouvrais la porte. Je t’accueillais dans ton monde. Ainsi, découvrais tu pour la première fois cet environnement paisible par où s’épanouissaient librement des arbres aux allures oniriques et dont le feuillage s’agrémentait de pierres luminescentes à la source d’un éclat bleuté délicat. Pour te guider, je matérialisais des cordes pincées dont je jouais pour t’inviter dans l’amorce passionnée de mon identité que je te dois.

Naoki Shiori Pnj-610

Quelle ne fut pas ma joie à la lumière de ton expression émerveillée la première fois que nos regards se rencontrèrent. Je te dévoilais l’apparence d’une jeune femme aux cheveux courts, les prunelles ambrées, un rouge de cinabre sur les lèvres et vêtue de vêtements raffinés qui devaient emprunter à la noblesse japonaise. La silhouette gracile, j’engageais un chant de nature à découvrir le toit végétal à la faveur d’un ciel étoilé. Derrière moi, se levait l’astre céleste aux dimensions qui ne pouvaient appartenir qu’à une douce rêverie romantique de laquelle je me révélais à toi. Dans cette représentation, je ressentais quelle raison m’avait gagné à préférer les passions mélodieuses aux paroles réglées.

Et au jugé des larmes qui débordaient de tes yeux, je comprenais que le miroir suggéré par l’architecture de mon âme avait su capturer un écho que j’avais imaginé de toi derrière l’ombre de tes actions. Par cette connexion symbiotique que je percevais entre nous, je sentais que tu pouvais enfin entendre mon nom.

Miyatsuki

Ainsi, me ferais-tu jouer pour accompagner l’élan de ta destinée. Ce faisant, je sortais de ma posture de spectatrice pour te suivre dans tes réussites successives. Bien sûr, je m’attristais encore d’un verrou qui t’empêchait de m’accepter lorsque je recouvrais mon apparence de sabre. Avec le temps, je comprenais plus justement ce qui te retenait d’éveiller ton potentiel enfoui. À présent que je pouvais te parler, je m’enrichissais de l’authenticité de tes expériences. Tu avais choisi de rejoindre la deuxième division du Gotei 13. Rapidement, tu gravissais les échelons jusqu’à te ranger au service du capitaine Igarashi Sora. Dans cette fonction, j’identifiais quelles motivations pouvaient inspirer tes choix. Seulement, de choix, tu ne saurais parvenir aux réels accomplissements avant d’affronter tes démons.

Ce pourquoi j’attendais avec la même patience qui précéda notre premier échange. Silencieuse, je façonnais, plus précise, le décorum qui te verrait t’élever vers une toute autre dimension.

Shiori, je te souhaite d’aimer le sens que tu donneras à ta vie.
Naoki Shiori P-shini

HRP

Avatar : OC

Parrain : Aucun.

Comment avez-vous connu le forum : En participant à sa création. Oui, ça aide.

Est-ce un double-compte ? Non.

https://www.before-tomorrow-comes.fr/t231-shiori-naoki

Naoki Shiori

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Naoki Shiori

Données Spirituelles
Grade: Vice-Capitaine de la 2ème Division
Ven 9 Sep 2022 - 0:40 - Naoki Shiori

Présentation terminée !
https://www.before-tomorrow-comes.fr/t231-shiori-naoki

Naoki Shiori

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Kuchiki Haruka

Données Spirituelles
Grade: Capitaine de la Sixième Division
Sam 10 Sep 2022 - 19:17 - Naoki Shiori

Bonjour Shiori !

J'ai le plaisir de te valider au grade de Petit Larousse Vice-Capitaine de la 2e division !

Ton rang attribué est celui d'expert, ce qui te donne droit à 12 PC, 3 PB et 2600 Reiryoku à répartir librement dans ta FT. Tu disposes également de 2100 PV, sans parler les :
  • 5 techniques N1 ;
  • 4 techniques N2 ;
  • 2 techniques N3 ;
  • 1 technique N4 ;
  • 2 aptitudes (1 N1 & 1 N2).

Pour constituer ta fiche technique, je t'invite à relire plus avant le système de combat et suivre le modèle de FT dans ta zone de faction où tu pourras poster ton sujet.

Comme d'accoutumée, le bureau du Staff est à ta disposition en cas de question. Mais genre pour y répondre, du coup.

Je te souhaite à présent bon jeu sur BTC, au plaisir de te tabasser en RP !
https://www.before-tomorrow-comes.fr/t1454-kuchiki-haruka-en-cou

Kuchiki Haruka

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