Bad Spirits & Bad student [pv. Naoki]

Dans la routine de mes missions quotidiennes, je voyais passer entre toutes mes affaires plusieurs dossiers sur des profils d’individus qui pouvaient à juste raison être classés comme des potentiels dangereux. Ces derniers étaient de nature à subir des jugements qui se passaient de l’avis des tribunaux militaires pour un peu que le Nibantai le décidait. Seulement, contrairement à l’idée que l’on pouvait s’en faire, chaque décision de cette nature succédait à de longues enquêtes approfondies qui permettaient d’évaluer les risques que le Gotei 13 courait à intégrer certaines personnalités déviantes.

L’une d’elles répondait au nom de Junpei Morihei. Un homme qui avait fait forte impression dans les dojos mis sur pied à la suite de cette purge qui avait vu la tête du Seireitei proprement décimée. S’il fallait observer seulement ses qualités martiales, alors il ferait un soldat incontournable au rétablissement de nos forces. Toutefois, quelques rumeurs avaient fait état d’une histoire où le principal concerné était suspecté du meurtre d’un autre adhérent du dojo d'où le nommé Junpei s’illustra. Depuis, nous le surveillions de sorte à éviter d’attirer son attention, soit, en missionnant des indics qui ne montraient pas leur appartenance à la deuxième division.

Prudente, je préférais éviter de mettre aux fers un innocent. Un choix trop hâtif pouvait provoquer une injustice que ma morale m’interdisait. Néanmoins, comme responsable du Nibantai, je prendrais sur moi une lourde responsabilité dans le cas où des événements tragiques se passeraient alors que nous disposions de moyens d’anticiper l’incident. En effet, nous devions couramment rendre des comptes à la chambre des 46. Ce pourquoi j’étais bien obligée d’investir de sérieux efforts dans des entreprises auxquelles je ne prenais pas particulièrement de plaisir.

Récemment, le prodige intégra l’académie. Un environnement où nous manquions de personnel à même de jauger correctement sa dangerosité. En temps ordinaire, nous collaborions avec les professeurs afin de faire ressortir quelques comportements qui pouvaient confirmer nos soupçons et mener des arrestations que les regards extérieurs jugeaient alors arbitraires quand nous manquions de discrétion. Cette raison précise m’avait amenée à envoyer une missive à la septième division. J’avais identifié un nom qui prenait justement en charge ledit danger ambulant. Leur troisième siège que l’on connaissait sous le nom de Hisaishi Shumei. Ce dernier, je n’avais pas encore eu le loisir de le rencontrer. J’y trouvais une parfaite occasion de remédier à cela et d’étendre le réseau de notre toile d’araignée.

Arrivée devant son bureau, j’allais lui montrer l’apparence d’une femme qui se démarquait par deux petites cornes au front. Cette excentricité de côté, je ne possédais rien de vraiment remarquable si ce n’était mon brassard qui attestait de mon rang au sein de la division. Quelques bracelets et colliers de basse facture, que l’on pouvait parfois trouver chez des habitants des districts modestes, venaient orner mes poignets ainsi que mon décolleté. Quand je serai invitée à entrer, je me présenterais.

– Bonjour, je suis Naoki Shiori, Fukutaicho du Nibantai. Êtes vous bien l’homme à qui j’ai adressé mon message ?

À lui de dérouler son jeu en vue de se présenter et de m’accueillir comme il le faisait naturellement en cas de visite.

Il était courant que la réputation du Nibantai nous précède. De nombreuses fois, j’avais pu observer quels troubles cela jetait sur les gens d’annoncer mon titre. Une réaction bien naturelle lorsque l’on connaissait nos domaines d’attribution. Il arrivait même que des individus qui n’avaient objectivement rien à se reprocher se prenne de quelques inquiétudes à la source d’étourderies dont l’on pouvait se passer. Ainsi, rencontrais-je un troisième siège on ne peut plus tendu qui me rendait scrupuleusement le protocole d’usage que je lui avais servi.

Intérieurement, je me dis que je devrais désamorcer une tension improductive. En effet, cette nervosité m’empêchait souvent de bien apprécier la réalité du caractère de la personne devant moi. Un blocage de nature à produire des réactions telles que les informations en venaient à être on ne peut plus biaisées. Peu intéressée par ce genre de rapport, je veillais à présenter une façade accessible et bienveillante. Un air qui prendrait du temps à faire son chemin au jugé de ce que je voyais.

Car lorsque le nommé Shumei en vint à manifester une mauvaise inquiétude quant à sa gestion, je n’eus pas même le temps de le rassurer que je le vis soudain perdre son équilibre à la faveur d’un incident le voyant renverser ses assortiments à mes pieds. Une scène qui ne serait pas sans m’inspirer de la peine pour les efforts que j’avais discerné dans sa présentation. Pour cette raison, je n’attendis pas qu’il s’excuse pour me baisser et commencer à ramasser ce qui était tombé à terre.

– Hm. N’auriez-vous pas une serviette ou quoi que ce soit pour éponger cela ?

Pour un peu que je chasse le naturel, il revenait toujours au galop dès lors que des événements me sortaient du cadre courant établi par l’étiquette d’usage. Effectivement, je ne possédais guère vraiment l’éducation d’une noble, loin s’en faut. Et je n’allais pas m’apostropher pour si peu, bien au contraire. Ainsi baissée, je pouvais relever quels mets raffinés avaient été investis pour m’offrir le meilleur accueil.

– Vous ne sembliez pas avoir fait les choses à moitié. C’est dommage.

Disais-je en posant sur le bureau la carafe, les tasses ainsi que quelques confiseries. D’ailleurs, je ne pus m’empêcher de goûter l’une d’elles dans une situation digne des pouilleux qui pullulaient dans les plus bas quartiers du Rukongai. J’étais sophistiquée d’apparence, mais la force des habitudes trahissait mes origines modestes.

– Oh ! Mais c’est excellent en fait ! Décidément, vous avez beaucoup de goût !

D’une certaine manière, je cherchais à le rassurer. Je ne souhaitais pas qu’il se désespère d’investissements gâchés par la faute d’une malheureuse maladresse. Cela arrivait à tout le monde, après tout. Ceci fait, je lui souriais et me pris de l’initiative de poser ma main sur son épaule.

– Regardez-moi, là. Je ne suis pas ici pour vous manger. Faites comme moi, respirez un bon coup, coooomme ça !

Et sur ces belles paroles, je prenais une profonde inspiration que je relâchais dans un soupire propre à détendre l’atmosphère. Il ne fallait pas que ce pauvre homme s’étouffe pour la cause qu’il en oubliait de respirer. Ainsi, le flot de ses pensées s’écoulerait naturellement.

– Permettez-moi de vous rassurer. Vous n’avez rien fait de répréhensible. C’est bon ? Vous me faites confiance ?

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je souhaitais que mon vis-à-vis ait pleinement retrouvé son calme.