Un îlot de paix dans un océan de haine? [PV Noh Ran Im - Hiver 2022-2023]

Encore une journée de chasse, enfin si on peut parler de journée dans cette nuit éternelle. Ça fait bien longtemps que je n'ai plus la notion du temps depuis aussi loin que je me souvienne, malgré quelques bribes de souvenir de mon vivant. Mais mes souvenirs les plus clairs restent juste une tentative infinie et inutile d'assouvir une faim qui ne cesse jamais, saupoudrée de combats de bêtes sauvages ayant toutes le même objectif. Heureusement que j'ai ces ailes, ça me permet d'en éviter la plupart. Mais quand je me bas je ne peux pas m'empêcher de ressentir une profonde tristesse... Je me demande bien pourquoi.
Alors que je cherche une nouvelle proie, j'identifie une ombre étrange plus loin, sur un arbre de quartz. J'ai faillit le rater avec sa tenue blanche et la faible lumière de la lune. Mais quoique ce soit, ça n'a pas l'air d'être une créature sauvage, plutôt quelque chose d'humain. Serais-ce un de ces fameux arrancars dont j'ai entendu parlé? Du peu que j'ai pu glaner ce sont des hollows comme nous qui ont transcendé leur faim et leur état de bête... Que faire? Si c'est la vérité il n'aurait à priori aucune raison de m'attaquer si je ne le fais pas, et j'aurais des questions à lui poser sur cette forme. Mais en même temps ça reste un hollow, donc imprévisible et potentiellement assez sauvage, sans compter que je peux toujours me tromper sur sa nature.
En vérité j'ai trop à gagner à faire une tentative, et si jamais il est hostile je peux m'envoler au loin. Je fini par m'approcher prudemment et me poser sur un arbre non loin à sa droite.

"Salutations. Êtes-vous un arrancar? Si oui, j'aimerais si possible poser quelques questions sur cette forme."

Je ne le quitte pas des yeux, et reste prête à éviter une attaque et prendre mon envol au moindre geste brusque. Comment allait être sa réaction?

Sur ma branche, je repense à tous ces changements. Soucieuse, je dresse mon canevas mental une nouvelle fois pour mettre à jour cette section. Il faut encore pointer les défauts, ajouter ce qui a été établi entre temps, modifier les éléments futurs. Mes anciens travers refont surface. Voilà pourquoi je tenais tant à rester en retrait des affaires du Hueco Mundo. Des affaires, tout court. Hélas, je sais pertinemment qu’il est trop tard pour faire marche arrière désormais. Cela n’a d’ailleurs jamais été dans mes projets.

Le menton dans le creux de la main, je réfléchis à la stratégie à adopter lors du tournoi à venir. Dois-je perdre rapidement, en espérant obtenir l’une des dernières places, ou me donner à fond afin de grappiller l’une des plus hautes ? D’ailleurs, maintenant que j’y pense, je ne sais même plus quelles têtes ont les membres de l’Espada. Sûrement que ça a changé de visages, depuis le temps.

Un peu plus loin, j’entends une voix qui semble m’interpeller. Ou alors est-ce destiné à quelqu’un d’autre ? Par précaution, je tourne la tête et fixe mes pupilles sur un arbre à ma droite, d’où me semble provenir cette fameuse voix. Tiens, une chauve-souris ! Mais je ne vois personne d’autre à proximité. Alors, dans un premier temps, je pointe mon index vers moi-même, comme pour m’assurer d’être le bon destinataire.

— Oui, c’est ça. Hm, si je peux y répondre, aucun problème, oui.

C’est une demande pour le moins surprenante, mais si ça peut servir, pourquoi pas ? D’un signe de la main, je l’invite à rejoindre ma branche, en espérant qu’elle soit suffisamment solide pour nous supporter. Si la chauve-souris a ses ailes, j’ai rangé les miennes sous ma forme humaine.

— Qu’est-ce que tu veux savoir ?

D’ailleurs, cette chauve-souris est-elle toujours aussi polie ? Pas que ça me dérange, mais ça me remet mon âge – entre autres – en tête.

— Ah, et pas de formalités : on est pas dans un cadre officiel, et j’ai l’impression d’être vieille après ! Sauf si tu te sens plus à l’aise comme ça, bien entendu…

La jeune femme semble être ouverte à la discussion, et ne dégage pas d'intentions hostiles envers moi. J'accepte donc de prendre à nouveau légèrement mon envol et me poser à côté d'elle. Elle m'invite également à ne pas employer de formalités. C'est une bonne nouvelle, j'ai plus l'habitude devoir parler avec respect... Est-ce que je l'ai déjà eu? Peu importe.

"Très bien. Dans ce cas j'aimerais des informations sur les arrancars, ce que la transformation offre et comment y parvenir. J'ai entendu dire que les arrancars n'ont plus besoin de chasser... et ça m'intéresse grandement"

Je commence à me détendre un peu, restant tout de même sur mes gardes, car on peut se faire attaquer à tout moment, ou elle-même peut retourner sa veste à tout moment, ça n'aurait rien d'étrange. Mais si cette personne peut me mener vers une existence plus tranquille que chasser ou être chassée, je suis prête à prendre le risque pour le moment. J'en profite pour examiner la jeune femme plus en profondeur, malgré son capuchon. Je ne vois aucun signe animal. Si on exclu l'aura qui se dégage d'elle, on jurerait qu'il s'agit d'une simple humaine. C'est assez rafraîchissant dans ce désert sauvage.

Sans trop attendre, la chauve-souris s’envole et se pose sur ma branche. Bien qu’un brin tremblante, elle semble tenir, pour l’instant. Je hausse les épaules de manière brève ; nous verrons cela à l’usage. Dans le pire des cas, l’enfant peut voler de ses propres ailes. Quant à moi, la chute ne sera guère très importante également.

Mon sourcil monte d’un cran. Des informations sur les Arrancars ? La politique de forte arrancarisation est-elle toujours en vigueur, pour qu’elle me questionne ainsi sur le sujet ? Je viens de revenir de mon errance ; je me réveille de mon désintérêt pour les affaires et leurs conflits plus brusquement que je ne me l’imaginais.

— Pas besoin d’être autant à l’affût, tu sais, il risque pas de se passer grand-chose en l’état.

Quelque part, la voir aussi tendue me dérange. Comment peut-on avoir une conversation saine avec quelqu’un qui ne peut se concentrer sur l’essentiel ?

— Personne va te manger.

Parce que je suis là, c’est le premier fait. À moins d’être complètement dépourvu de bon sens, cela n’arrivera pas. Quoi que… Connaissent-ils seulement le bon sens ?

— Plus nécessaire de chasser, effectivement. Enfin, plus ou moins... Je n’ai pas d’exemples sous la main, mais j’imagine sans mal que certains puissent continuer…

Et quel plaisir peut-on bien trouver à cela, je me le demande. Mon dépit transparaît sans mal.

— Ça dépend... Qu'est-ce que tu espères avec cette transformation ?

Techniquement, si elle se montre correcte dans le monde des vivants, cela simplifierait aussi ses allers et ses retours. Je me demande également si, au final, toutes ses raisons réchauffées sont si vraies que cela. Au final, les réponses que j'imagine lui donner ne sont rien d'autre que du réchauffé,bien loin de ce que je pense désormais. Cependant, ce n’est pas mon avis qu’elle me demande. En cela, ma voix ne peut pas être autrement que morne.

— Mais oui, tu n’auras plus besoin de chasser et, à moins que tu rentres dans d’autres affaires, tu ne devrais plus trop te faire chasser non plus. Plus gratuitement en tout cas, sauf cas exceptionnels. Du reste, pour la transformation, il y a plusieurs méthodes ; deux ou trios, de tête, je pense. Là encore, tout dépend de ce que tu es prête ou non à mettre en jeu.

Ou de ses préférences en matière de violences, au choix. N’entrons pas trop dans le détail pour l’instant.

— En gros, la question, c’est surtout de savoir si t'es prête pour ce changement. Qu’en penses-tu ? T'es prête à laisser derrière toi ce que tu es ? Ce qui te caractérise ?

Et toujours cette ombre au tableau.

— Et, aussi, les raisons qui te poussent à ce changement ? Si c’est par rapport à cette histoire d’arrancarisation de masse, honnêtement, attends un peu.

Parce que cette histoire pue un peu trop à mon goût.

"Personne va te manger", c'est bien le genre de propos que j'aurais jamais cru entendre de la part d'un hollow. Elle me confirme ensuite que les arrancars n'ont pas besoin de manger, bien.

"Disons que j'en ai un peu marre de chasser et d'être chassée comme une bête sauvage. Cette façon de me battre et de survivre me déplaît au plus haut point. Je saurais pas vraiment l'expliquer mais même quand j'obtiens une victoire totale, quelque chose en moi souffre et me cri que ça ne va pas... Du coup si j'ai l'occasion d'obtenir une vie plus tranquille ou je n'ai plus besoin d’ôter des vies ou de protéger la mienne plus que de raisons, ça m'intéresse fortement"

Je respire un peu plus, oubliant presque le risque qu'elle puisse subitement décider de m'attaquer à tout moment. Je regarde vers le ciel sans étoile, me demandant d'où cela peut bien venir. Probablement du temps où j'étais vivante.

"De ce fait, abandonner ce que je suis actuellement ne me dérange pas du tout, et je n'ai pas entendu parlé d'arrancarisation de masse ou autre. Dans un cas général je reste éloignée de tout par prudence, j'ai cet avantage d'en être capable. Mais du coup quels seraient les moyen d'évoluer de cette façon?"

Je regarde un peu autour, pour être sûre que personne ne s'apprête à venir couper court à la discussion. Ce serait très dommage maintenant qu'on en est là.