Droit d'avoir et droit de paix

Au coeur du Hueco Mundo, il est des créatures qui grouillent, qui rêvent de beauté, de savoirs et de reconnaissances. Leurs mandibules ont tant bâti, tant creusé dans les profondeurs. A force de projets esquissés du bout de leurs pattes, ils ont fondé sans cesse et avec fierté bien des ruines dans ce désert. Toutefois, les choses ont changé. Avec le temps, et puis les derniers règnes des Shinigamis-Roi, la plupart de ces Hollows insectoïdes n'ont plus le goût des batailles, des rires et des conquêtes. A les voir, ils semblent aujourd'hui et pour la plupart totalement amorphes depuis la perte de leur Reine et la mutilation forcée de leurs masques. Toutefois, leurs espérances sont encore tournés vers les édifices, leurs finitions et leurs hauteurs de feu la belle Las Noches ; ils sont aujourd'hui la preuve que les monstres peuvent rêver et que les Mouches ne manquent pas de dérober l'apparat des grands rois à force de réflexion.

A croire que la Colonia serait presque pire que de simples bandits : ce qui brille par la matière ou pour l'intelligence ne manquent pas de faire frissonner leurs antennes.

Ou plutôt, d'attirer leurs regards curieux et plein d'esprit...

Ce pauvre Adamas n'a d'ailleurs pas de chance : son enclume résonne tant et si fort contre le fer qu'il fait vibrer les grains de sable. Chaque coup, chaque finition de ciselure et de patinage semblent hurler son nom et son emplacement. D'ailleurs, les murmures du clan eux-mêmes n'ont pas manqué de tomber dans l'oreille d'un sourd. C'est ainsi qu'Ava se trouve non loin de la tanière du forgeron. Elle pense bien faire, à observer davantage le nouvel Arrancar que l'on affuble du titre de..."forgeron". Sa gorge est sèche face à tant de pression spirituelle, alors elle ravale sa salive et se force à composer avec sa couverture, tapie dans les ombres et dans les murs, comme elle sait si bien le faire. Ce n'est pas la première fois qu'elle s'immisce dans l'atelier de l'Artisan-Hollow : elle le fait pour le compte de Delila, parce que cette dernière en a toujours été incapable. Trop bruyante, trop "vivante", trop pétillante à sa manière. Un comble pour un Hollow...

Patiemment, elle guette le travail d'orfèvre, avec ces petits braseros et ces braises de lave qui virevoltent, crissent et brûlent à quelques mètres. Sa main effleure sa chevelure, comme si elle brisait le silence et prenait une décision. Elle croit comprendre les teneurs de l'alliage, et rebrousse alors chemin. Tendue, sa conscience l'avait rappelé à l'ordre. Il s'en était fallu de peu. L'Espada aurait bien pu détecter sa présence, si ça n'avait pas été pour ses techniques...

Hélas, elle n'eut pas le temps d'y réfléchir à bien longtemps qu'une chose émergea du sable. Ou plutôt, un Hollow. Les secousses du séisme sont tel que ses jambes dérapent sous le poids de la gravité et qu'elle ne peut se rattraper. Quand la Hormiga relève enfin ses yeux, l'horreur saisit son estomac: la gueule béante de la créature sous terraines fond droit sur elle. Par automatisme, elle ferme les yeux, résignée. Sa fin est proche.

...

Une seconde. Puis deux. Rien n'advint, hormis le crissement d'une lame. Lorsqu'elle reprend enfin le contrôle de sa peur, elle vit son "aînée".

"Delila !
- Ava, j'apprécie tes initiatives, maiiis...Tu sembles avoir éveillé les soupçons d'un gros poisson."

D'un geste assuré, l'Abeja joint ses deux mains contre sa garde et appuie sur sa lame d'un bon coup. L'hollow sent pourtant qu'elle n'y met pas toutes ses forces, mais l'impact est tel qu'il finit tout de même par être projeté à quelques mètres. Il n'abandonnera pourtant pas. Dans sa chute et sa glisse, il se tient prêt à se remettre debout, tout de suite, maintenant. Hélas, les secondes sont impitoyables lors d'une rixe, et un clignement d'yeux ne manque pas de pourfendre sec et net toute espérance. Le visage souriant réapparait dans un Sonido propre, au dessus de lui, la lame prêt de sa gorge, prête à lui soutirer les informations nécessaires.

Et puis, territoire ou non, on ne touchait décemment pas à sa soeur sans répondre de ses actes...


Mais la Segunda Espada n'est pas de celle à tenir de grandes formalités. Une large porte claque dans un bruit plus fort encore que le bourdonnement de mille abeilles...Une épée encore dans sa main, ses yeux d'argent rencontrent l'Arrancar et, comme pour signifier que les tensions ne sont pas totalement retombé, rangent sa précieuse Maestra dans son fourreau. Son ton tranche avec la manière de se mouvoir, nonchalante.

"Bonjour, cher confrère !",, s'annonça-t-elle sa venue, sans aucune forme de timidité ou de formalisme. "J'ai cru entendre que l'une de mes jeunes Soeurs d'armes vient d'avoir un léger malentendu avec vous. Votre cadeau n'a pas été totalement à son goût, mais je l'ai personnellement trouvé très charmant ! Quoiqu'un peu provocateur."

Inutile pourtant de lire à travers ses mots : tout son ton détonne une pointe de rancoeur pour avoir attenté à la vie de sa précieuse Soeur. Pourtant, elle sait qu'ici n'est pas son territoire. La réaction de ce..."forgeron" est finalement attendu.

"Mon nom est Delila Scarlatti, Segunda Espada pour l'heure et humble membre du clan Manadas...Et vous êtes ?"

Certainement pas le Primera Espada, songea-t-elle en premier lieu.

Malgré ces mots doux et mielleux, la tension régnait dans ce fournaise infernal...

Spoiler:

Dans cet atelier, il fait chaud. Le contraste entre l'air glacial du désert et la fournaise étouffante de la salle a de quoi décontenancer sa pauvre acolyte qui, main devant sa bouche, met bien quelques secondes à s'acclimater face à la colère silencieuse mais ardente de l'Espada. Un coup d'oeil au-dessus de son épaule, l'Abeja feint l'assurance pour la rassurer. Un sourire léger, une stature bien droite, une confiance présente mais relative ; elle s'adapte mais l'intime à rester dans l'ombre afin de ne pas prendre de risques inutiles. Dans un acquiescement, la Hormiga Bala s'exécute.

Cela fait, Delila fait quelques pas en avant.

Les secondes qui suivent la laisse interdite, plongée dans l'observation tandis que le nouveau Manada martèle, et laisse échapper ce qui lui pèse sur l'âme. Un bref instant, l'Abeja a, quelque part, la sensation d'être devant un Camara. Non pas parce que le forgeron se targue de rappeler sa supériorité en brandissant des ornements trop brillants qui l'empêchent de rester aussi discrets que ne l'aurait souhaité sa véritable nature, taiseuse et intimidante, mais parce qu'il tente de négocier en empruntant directement la plus grande impasse du Hueco Mundo : le Pouvoir. Il le fait d'ailleurs si bien que la Segunda manque de cligner des yeux par inconfort face aux étincelles aveuglantes qui jaillissent de sa lame. De nouveau, une onde éclate, pour les intimider. Il lui apparait alors plus compliqué que prévu de trouver un angle d'attaque, alors elle fait le calme dans son esprit.

Aiguise des provocations seulement sous entendues.

De quoi ébranler celui qui fulmine...

"Vous m'en voyez navrée, j'ai l'habitude de faire meilleur effet. Mais Adamas, donc. Comme le métal précieux. C'est un bien joli nom, pour le Hueco Mundo..."

La minauderie lui arrache un demi-sourire. Reste maintenant à savoir si la Novena tenait plus du diamant ou de l'acier : l'un, par sa densité plus élevée, résiste mieux à la pression. Comme elle ne consent pas à lui donner le plaisir d'imposer ses règles, Delila prend naturellement place sur l'une de ces pierres vides, croise ses bras et ses jambes sans demander son reste, et s'attèle à examiner les lames tandis qu'il s'exprime. Son œil expert ne manque pas de relever la finesse d'un travail exécuté depuis certainement plusieurs centenaires...

De quoi faire pâlir un membre de la Colonia. Delila ne montre pourtant rien de ces pensées, et parlemente comme elle le fait depuis ces temps de paix.

"Ne mettez pas le clan dans le même panier. Que je sois une fidèle du Rey ou non n'a pas d'importance. Quant à ma sœur...Eh bien, considérez que pour son cas, vous traitez directement avec moi. Elle pensait bien faire en observant votre art, nous aimons nous tenir informés et....j'ai toujours eu un faible pour les choses tranchantes. Je fabrique également mes lames, à mes heures perdues."

Mais jamais n'a-t-elle pensé trouvé un concurrent. Qui plus est, de s'attirer ses foudres de sitôt. Le reste l'interpelle davantage. La demande de la Novena voit son visage se fermer, tandis qu'elle sent sa soeur sursauter face à l'outrage qu'il tente d'ordonner. La main serrée, sa manche se froisse. Sans prévenir, son verbe claque.

"Les miens ne sont pas des esclaves et vous n'êtes pas le seul à être fait d'acier."

Cette fois-ci, rien. Pas l'ombre d'une parole plaisante, ni même celle d'une minauderie : sa voix n'est teintée que d'une fermeté glaciale. Contenue. Il y a pourtant de l'impatience, aussi, à en juger ses sourcils légèrement froncés et ses doigts qui tapotent contre la manche bouffante recouvrant son bras. Plus sanguine ou plus jeune, peut-être aurait-elle déjà dégainer sa lame pour ces simples paroles. Elle se souvient pourtant qu'il s'agit là de l'un des siens ; ils sont francs et percutants. L'instant suivant, ses prunelles s'illuminèrent soudainement sous l'éclair d'un constat. L'idée ne met pas longtemps à s'échapper de ses lèvres...

"Mon cher Adamas...Faisons un pari amical pour régler ce différend. Sur une chasse, sur la plus belle création ou même dans un duel, peu importe. Vous et moi sommes des maillons de la Meute. Nos âmes répondent donc à la loi du plus fort. Si je perds, vous aurez raison. Ma soeur s'agenouillera et en prime, je m'excuserai. Si pour autant, vous pensez que cela vous apporterait trop de souci, je reste ouverte à d'autres propositions. Le choix vous revient et ma foi, la Tercera est toujours ravie de sentir sa taverne trembler lorsque j'organise des combats à Las Noches..."

Delila ment. Elle sait que la Tercera déteste le bruit et l'attention que ses bourdonnements incessants attirent. Pire encore, elle omet d'énoncer sa contrepartie. Mais le défi reste également une option qui répond à ses envies : ils ont tout à perdre, surtout elle, mais n'est-ce pas en prenant des risques que l'on se sent le plus en vie ? La Segunda ne croit pas en son titre, ni à sa réputation. Ce ne sont que des babioles pour se sentir important.

Non, Delila ne vit que pour l'adrénaline de l'instant présent.

Spoiler:

" Mais, Delila ! Tu es folle ?! C'est comme si tu jouais ta place de Segunda sur le simple caprice d'un étranger et..."

Ava vient de revenir. D'ores et déjà sur les talons de la Segunda, la blonde reste en retrait mais non loin de sa soeur : l'écho des paroles que les Espadas de l'Acuerdo ont prononcé quelques secondes plus tôt et le jeu violent de leurs Reiatsu ont attisé toutes ses craintes, tout son courage et une bonne partie de son instinct restant, au point de désobéir ouvertement et d'approcher son autre moitié d'âme par inquiétude...

- Et ? Je veux danser. N'est-ce pas clair ?
- Ce n'est pas une raison. Sauf si je me trompe, il n'a pas l'âme pour changer les men-...
- Parce que ce n'est pas son essence, Hormiga. C'est évident.
- Je ne m'agenouillerai pas, c'est hors de question.
- Mais fais-moi confiance ! Et puis qu'est-ce que ça importe ? Avec un peu de chance, il durera plus longtemps que le dernier Manada avec son malheureux tendon déchiré...Je suis attristée d'ailleurs, comment va-t-il ? Compte-t-il me défier de nouveau en prenant plus de précautions ? Je l'espère, je suis persuadée qu'il a plus de talents. Oh ! Et puis, qui t'as dit de t'immiscer dans mes décisions ?
- Pff.

Un roulement d'yeux d'une part, un soupir de l'autre. Les inquiétudes des Soeurs de la Colmena s'entremêlent avec plus de logique et d'explications que la simple recherche d'adrénaline. Oh, c'est une querelle de soeurs, à n'en point douter. Dans un dernier espoir, la main de la Fourmi ne peut que tirer sur la manche de Delila ; elle cherche désespéremment à lui faire reprendre Raison. Hélas, l'Espada se retourne vers elle, machinalement. Calmement. Toute son aura balaie alors immédiatement les doutes que la simple Fracción a fait peser sur ses propositions. C'est là qu'elle découvre dans ses yeux un éclat brillant mais lucide : la preuve que son défi ne souffre d'aucune crédulité.

Et pourtant, Delila sent son coeur se pincer quand Adamas crache enfin son mépris. Ce qu'il est réellement. Le monstre qu'il représente et qui fait écho à ce qu'elle est. S'échappe alors un rire malicieux mais cristallin ; le premier d'une longue série dans ce désert devenu pourtant si calme depuis la déchéance de Kyōaku...

Et que dire d'autres ? L'Abeille de Las Noches n'a jamais été partisane du moindre élitisme. Après tout, n'est-elle pas à l'origine une simple mouche couvert d'apparats plus nobles et royaux que les autres insectes ? La puissance est un doux rêve que seul le Savoir et la Persévérance justifient à ses yeux...Mais qu'est-ce que le réel Savoir sans prise de risques ni expériences ?

A ce sujet, Delila ne dit mot.
Ne fanfaronne pas sur ses véritables idéaux.
Elle se souvient qu'elle vit volontiers dans cette Fange qui rebute tant Adamas, et se complet à observer en silence ses failles dans l'espoir de trouver, humblement, un remède au mal qui ronge les faibles.
C'est là sa place dans la Meute ; une grande gueule à qui l'on attribue bien des facettes, sauf la bonne. Elle est un ancien monstre qui rêve de détruire la fatalité que l'on accorde à la médiocrité des plus petits.

"Vous risquez d'être déçu mais...Bienvenue au Hueco Mundo et à Las Noches ! Un endroit peuplé de tyrans, de vauriens et de rebelles, où seul celui qui ose mordre obtient ce qu'il veut. Mais nulle inquiétude ! Je peux bien briller pour une âme assombrie en mal de lumière..."

A croire que la situation amuse plus que de coutume la Maitre d'armes...Et pourtant. Plus que jamais, son âme révoltée mesure et pacifie ses idées noires. S'il touche une corde sensible, ni son visage ni son sourire ne cède face à la température ambiante.

Il veut jouer à ce jeu ?

Fort bien.

L'idée lui est venue comme ça, sur un coup de tête en entendant les murmures de sa soeur, mais Delila se réjouit de voir son vis-à-vis s'enflammer et partager cette excitation qui résonne au plus profond de leur véritable nature. De toute évidence, Adamas ne sait pas à qui il parle. Avec qui il confronte ses idées, et s'apprête à danser. Son accord sonne alors plus que jamais comme un pacte qu'il signe avec un sympathique démon qui n'est pas en accord avec les Enfers qu'il a toujours connu.

"Je suis presque ravie et flattée que tu m'attribues déjà de telle qualité, mais je te sens pressé pour un premier face à face, doux Novena : comment peux-tu déjà me différencier de ceux que tu méprises, hm ?" Elle y voit une précipitation attendrissante et charmante malgré un combat imminent. Finalement, cet Arrancar est peut-être plus sensible aux premières impressions qu'il n'y parait... "J'éprouve personnellement beaucoup de compassion pour les Faibles. Ils apportent du renouveau et portent leur voix au loin pour devenir le Fort des centenaires à venir, quand ils survivent. Ma pensée est sûrement tabou, mais nous avons tous été faibles à un stade de notre évolution. Je me souviens..."

Un silence. Elle cesse d'en dire davantage, de peur de dévoiler trop d'éléments sur sa personne. Sa dextre se porte alors soudainement sur le manche de son épée et dégaine avec autant de précision que d'amour pour son art, sa plus fidèle épée. Pointée en direction de son adversaire, son amusement est palpable. Ladite créature redresse d'ailleurs déjà ses lunettes d'un geste expert, tendre, sage de son unique main disponible, mais pourlèche ses lèvres avec gourmandise et délicatesse à la seconde suivante.

"Soit, nous danserons dans un duel d'honneur, Adamas ! Mais organisons-le plutôt d'ici quelques jours, sous l'oeil vigilant et bienveillant d'un autre membre de notre clan. Il serait dommage de saccager ta forge. La Novena contre la Segunda de notre génération...La balance n'a pas l'air très équilibré, mais je suis persuadée que ta personne recèle quelques mystères passionnants ! Quant à la foule, oh, je ne doute pas qu'elle tremblera, mais avec moi ça sera plutôt d'excitation. J'en ai déjà des frissons !"


La Segunda n'a pas l'air de prendre peur. Au contraire, à la voir sourire ainsi, elle se complait dans une forme de joie à l'idée de rencontrer la Guerre en personne. Et alors, tout s'oppose. Son regard ne quitte pas le sien : il est confiant, serein, quoique humble en dépit d'avoir déjà gagné une bataille à ses yeux. Oui, la perspective d'un véritable David contre Goliath entre dans ses croyances et ses expériences personnelles. Peut-être est-ce là tout le but de sa proposition depuis le début : après tout, s'il la bat, alors la Neuvième Espada aura su s'élever autour du Géant qu'elle représente. Il sera l'incarnation du Faible devenu Fort ; de celui qui se libère de ses chaînes. Mais si elle la vainc - ô, si elle vient à lui mettre la raclée qu'il mérite !-, alors sa Loi s'imposera.

Sur les lèvres de la majesté des mouches, une soif élégante, confiante et barbare s'impose.

Oui, Adamas sera un adversaire parfait.

Spoiler:

La patience.

Ce n'est pas un attribut que Delila embrasse volontairement ni même consciemment, mais elle conçoit bien en être capable lorsque la situation l'exige. Difficile, pour autant, de détacher son regard de la funeste silhouette de son ennemi d'aujourd'hui : il y a un quelque chose d'intimidant qu'elle ignore en tenant son nez haut et plein de défi. Ses prunelles s'éclairent tout de même d'une lueur farouche: elle sent le souffle chaud et incontrôlable de l'adrénaline parcourirent ses veines lorsque la Novena Espada vient à s'approcher trop près d'elles, mais elle le voit, le contemple à reconsidérer cette proposition pour de meilleures termes.

L'Abeja n'est pas soulagé d'avoir à reporter ce combat : ils savent tout deux que ce n'est que partie remise. Et même s'il la menace encore, elle fait mine à sa soeur, apeurée, de ne pas raviver les hostilités de cette main, qui lui fait alors abaisser cette petite lame dont le fourreau lui démange la paume. En définitive, il apparait comme une évidence que la Manada ne tient pas à tyranniser Adamas en brandissant son numéro. Il est d'autres moyens de se faire respecter. Après tout, ne dit-on pas que les enfants du Hueco Mundo apprennent mieux lorsqu'ils se brûlent le bout des doigts et pleurent à chaudes larmes ?

Si le ton et la promesse fait s'élever un sourire imperturbable, la Segunda Espada n'est pas dupe quant aux intentions d'Adamas Pourtant, ce qu'elle ne sait pas, c'est qu'elle n'est probablement pas capable d'entendre tous les arguments de son frère d'armes : leur vécu les séparent. Du haut de ces trois cents ans, Delila n'a pas vécu la Faim comme la plupart des autres Hollows. Sa Colmena l'avait rendu ainsi ; friande de défis à célébrer dans la danse de leurs coutumes et plus joyeux encore à l'idée de porter les lames de leurs anciennes Reines pour mieux prouver leur statut de princes et princesses sans couronne, favorisés par la Lune...

Une main s'effaça soudain dans sa tignasse d'obsidienne, comme pour clore ces négociations. Plus que quiconque, Delila porte donc encore l'espoir de sublimer la place des siens et ce, jusqu'au bout de la nuit...

"En ce cas, j'en suis impatiente. Je vous enverrai quelqu'un pour vous tenir au courant de l'avancé de ce défi."

A moins qu'il ne daigne passer, un jour, au Bistro Mundo.
Tout se chuchote, là-bas.

Tournant des talons, elle ne cesse pas de faire résonner le bruit obsédant de ses talons, qui tranchent le silence et l'annihilent au rang de fiction. Comme à son habitude, ses pas cheminent de nouveau vers le désert, sans se soucier de rencontrer le moindre danger.

L'instant suivant, plus rien. Le silence reprend timidement son siège après avoir été éclipsé et malmené durant cette mésentente qui n'a pourtant pas totalement pris fin.

Spoiler: