Innocent les mains pleines [PV Shiori]

La justice était probablement l’organe le plus fragile de la société. Cela, on le réalisait seulement lorsqu’on y était pleinement confronté. Que ce soit comme agent, victime ou coupable. Pourquoi ? Simplement par un phénomène que l’on pouvait résumer comme du « bruit ». Sur les bureaux s’entassaient les affaires et bien souvent, ces dernières surchargeaient le flux de traitement de telle manière à ralentir les procédures. S’acharner à suivre les règlements à la lettre n’offrait de gains que d’affecter l’efficacité de ceux qui devaient faire respecter l’ordre au sein de la Soul Society.

À mon niveau de responsabilité, j’étais lucide sur cette réalité. La plupart du temps, le Nibantai prémâchait le travail à la faveur de la gestion du Kyubantai. Aussi, lorsque je jugeais le délit trop mineur, je me prenais de l’initiative de la régler par nos propres moyens. En cela, je ne faisais que suivre une longue tradition au sein de la division des renseignements.

En l’occurrence, traînait depuis quelques jours un dossier sur mon bureau qui s’inscrivait pleinement dans cet ordre d’idée. Dans l’inventaire du grenier, quelques irrégularités avaient été relevées. Pour cette raison, j’avais placé le lieu sous surveillance avec pour simple instruction d’identifier l’origine du problème avec cette subtilité qu’aucune initiative de nature à alerter la cible ne soit menée. Après tout, la deuxième division elle-même ne pouvait se permettre d’investir des ressources trop considérables pour des soucis à la source de conséquences mineures. Un nom suffisait, et ce fut celui de Yuta qui ressortit.

Ce faisant, j’avais pris note des informations qui traînaient sur l’individu. Un membre de la onzième division arrivé récemment et disposant de capacités lui ayant permis de rapidement briguer une place de siège. À la vérité, ce shinigami n’était guère vraiment inconnu de nos services pour quelques incartades dans son parcours. Ceci dit, rien ne méritait jusque là de le classifier comme un potentiel dangereux. Cependant, suivant ce qui pouvait ressortir de cette histoire, cela pouvait bien changer.

Ce pourquoi, je décida de lui adresser une convocation dans nos quartiers sans en expliciter le motif. D’expérience, la spontanéité des charges suffisait à provoquer des réponses plus pertinentes à traduire la vérité, même dans le cas où le sujet se tenterait à quelques mensonges. Aussi, dans les jours qui suivirent, le principal concerné se rendit au point de rendez-vous sans derrière exprimer de résistance particulière, ce qui représentait un bon point pour lui. En le voyant entrer au sein de mon bureau, je demeurais assise le temps de ses présentations.

– Enchantée, Yuta. Pour ma part, je me nomme Naoki Shiori, Vice Capitaine de la deuxième division. Je vous remercie par avance pour votre coopération. Puis-je vous demander de vous asseoir ?

L’invitant d’un signe de main à s’installer devant moi, je feuilletais rapidement les documents devant mes yeux afin de me remettre à l’esprit les éléments constitutifs du dossier monté à l’encontre de ce jeune homme qui montrait une mine perdue. Le genre d’attitude auquel j’étais habituée. En réponse, je demeurais tranquille et globalement souriante. Ce qui pouvait au choix rassurer ou inquiéter davantage. Relevant les yeux, je cherchais son regard au moment de poser les raisons de sa convocation.

– Si je vous parle d'une affaire de laquelle des vivres ont été volés, cela vous évoque-t-il quelque chose ?

L’expression neutre, je prêtais à une interrogation ambiguë qui pouvait laissait penser que j’en savais plus que ce que je laissais croire. Ou alors, n’était-ce que du bluff ? Toujours était-il que je laissais à mon interlocuteur l’opportunité de se justifier par le moyen qu’il jugerait le plus favorable à son cas.

Le choix que fit mon interlocuteur serait donc celui de la prudence. En effet, il devait être de ceux à se dire que sur un malentendu, ça pouvait passer. Je ne pouvais vraiment lui en tenir rigueur. Après tout, je n’avais pas non plus brillé de coopération lorsque je m’étais trouvée à sa place voilà des années de cela. Enfin, ce n’était pas comme si les raisons de sa présence dans mon bureau étaient particulièrement gravissimes. En tout cas, ses excuses soulignaient ses tendances cleptomanes bien avant qu’il ne rejoigne les armées du Gotei 13. Des éléments de toute manière grassement consignées dans le dossier portant sur son parcours. Comme moi, il venait de districts défavorisés du Rukongai. À ce titre, les autorités avaient jugé bon de le diriger vers la onzième division.

Heureusement pour lui, je manquais encore d’expérience au sein du Seireitei et même si je l’avais voulu, le travail harassant de mes services faisait que les a priori que l’on jetait couramment chez les membres du Juichibantai n’influençaient que peu mon jugement. Plutôt que de l’étiqueter délinquant comme il était aisé de le faire, je cherchais avant toute chose à comprendre. Une volonté qui nécessiterait à un moment de crever l’abcès afin de mettre un terme à l’attitude faussement détachée qu’il me jouait.

Aussi, tandis que le nommé Yuta tournait autour du pot, je glissa le doigt sur la pochette qui contenait les documents et rapports compilés à son encontre. Il cherchait du contexte ? J’allais lui en donner. Feuilletant les papiers, j’en sortis un que je soumettais silencieusement à son attention. Ce dernier indiquait l’emplacement du forfait ainsi qu’une synthèse des manques constatés à la suite des inventaires. Ces irrégularités se trouvaient datées, de même pour la nuit où des agents du Nibantai rapportèrent l’intrusion d’un individu dont les descriptions étaient loin d’innocenter la personne se tenant assise devant moi. Enfin, le jeune homme pouvait lire que cet événement coïncidait avec des témoignages recueillis auprès du Jūichibantai et suggérant l’absence du Onzième siège dans les quartiers des officiers.

Bien sûr, ces informations seraient insuffisantes à l’incriminer. Cependant, je gardais la main posée sur la pochette, dans une posture où j’étais prête à révéler de nouveaux documents qui pouvaient bien constituer des preuves. Une éventualité plausible, car si le Nibantai avait investi suffisamment de ressources, alors il faisait peu de doutes que les résultats seraient au rendez-vous.

– Cela vous rafraîchit-il la mémoire ?

Disais-je sobrement, sans non plus sortir un ton culpabilisant. J’étais simplement factuelle. Et dans l’énonciation des faits, je laissais à apprécier une minutie méthodologique qui pouvait être dangereuse s’il me forçait à déployer plus de moyens. Une menace tacite, en d’autres termes. À présent, pour que le dialogue nous mène dans le vif du sujet, il me fallait briser la glace et me sortir de cette position inéquitable qui nous liait tous deux.

– Vous savez, je ne suis pas étrangère à la faim. Je sais comme la nourriture peut être banale à certains et précieuse à d’autres. Et nous savons tous deux où se place le Gotei 13 parmi ceux là.

D’un regard entendu, j’espérais dissiper un peu la crainte de la punition qui pouvait peser sur mon interlocuteur. Les enjeux n’étaient pas si graves et je ne cherchais pas à les grossir, loin s’en faut. Pour le souligner subtilement, j’écartais ma main de la pochette qui devait me servir s’il se décidait à se braquer.

– Je suis disposée à négocier. Mais avant d’en arriver là, j’ai besoin de comprendre. Expliquez-moi et je vous renverrai l’ascenseur.

Je sentais une juste méfiance qui pouvait même s’approcher de la défiance si d’aventure nous nous entretenions sur ce même registre qui me voyait incarner une suffisance que je ne connaissais que trop bien pour l’avoir déjà vécue. Au vu de ma position, j’étais bien la dernière personne que l’on pouvait consentir à écouter sous l’invitation de se découvrir. Qu’il manifeste plus ou moins clairement sa circonspection était à ce titre bien naturel et je n’avais pas de raison de m’en offusquer.

Sans montrer de réaction particulière, je l’écoutais admettre sa faute et la justifier en rebondissant sur mon observation. J’entendais bien quel pouvait être le sous-entendu flottant derrière le choix de ses mots. Oui, si cette injustice du Seireitei envers les couches les plus défavorisées était si évidente à mon jugement, alors ses actes ne devaient pas entraîner de mauvaises conséquences. De cela, il devait bien en douter, de quoi simplement anticiper sur l’hypocrisie que j’allais présenter à son endroit.

La certitude, c’était qu’il ne remettait pas en cause ses décisions qu’il jugeait justes. En cela, il alignait les mauvais points aux yeux d’une représentante du Nibantai. Son seul regret ? De s’être fait prendre la main dans le sac. Malgré tout, il demeurait lucide sur mon jeu. En l’état, je n’avais rien de concret contre lui. Et comme pour le confirmer, je récupérais le document que je lui avais adressé afin de le ranger parmi la foule des papiers qui ne rapportaient guère vraiment d’autres éléments permettant de conclure cette affaire. Partant de là, il me fallait décider de si j’allais au bout de la démarche ou non. À ce titre, je me faisais une bonne idée de la marche à suivre.

– Vous n’êtes pas ici au Kyubantai. Pour cette raison, je me garderai de vous juger pour vos actions. En revanche, je suis preneuse de solutions plus constructives aux intérêts de la Soul Society.

Si je n’avais pas mis en avant le Seireitei, ce n’était pas anodin. Sur le principe, la deuxième division était le bras armé de la chambre des 46 et ne vivait que pour s’affranchir de la justice du Kyubantai. En effet, la loi pouvait être encombrante aux puissants qui l’avaient écrit. Une belle démonstration du « deux poids, deux mesures » qui commandait la logique du Seireitei.

– Vous vous en doutez, je ne peux pas vous dire que le Nibantai fermera les yeux si votre implication dans ces vols devait se vérifier. À la vérité, les règlements voudraient que je prenne les mesures adéquates pour qu’a minima, vous cessiez vos larcins.

Mon interlocuteur pouvait s’étonner que dans dans le choix de mes mots, je semblais me placer à l’extérieur de mon propos. Non pas que je me dédouanais du poids de mes choix à la faveur d’une machinerie qui avait été inventée avant moi. Non. Cet axe me rappelait quelle altercation je pus avoir avec le Vice Capitaine de la troisième division. Ce dernier m’avait reproché de suivre scrupuleusement les règlements. En vérité, c’était simplement que sa requête ne valait pas la peine que je prenne le risque d’y laisser des plumes pour la raison que de hauts nobles pouvaient être embarrassés de quelques mauvaises conjonctures.

– Je veux bien clore cette affaire aux yeux des miens sans vous demander de cesser vos activités. Je puis même vous proposer quelques assistances personnelles pour éviter que le Kyubantai n’en vienne à vous pincer. Pour tout vous dire, si je devais exprimer mon jugement quant à cette histoire, c’est que vous ne faites de mal à personne en agissant ainsi, bien au contraire. Je vois d’un bon œil que vous gardiez une relation de confiance avec des laissés pour compte du Rukongai.

Sans doute, devait-il attendre quel intérêt je pouvais en tirer. Je n’allais pas prétendre que j’étais désintéressée dans l’affaire. Après tout, pour lui, j’étais une étrangère. Pire, même, la Vice Capitaine de la deuxième division. Aussi, pour le rassurer, je devais tout bonnement lui faire voir quelque chose qu’il pouvait mépriser. La confirmation d’un préjugé propre à lui faire entendre le fond du marché que je lui proposais.

– Bien sûr, ces risques, je n’escompte pas les prendre par pure philanthropie. J’attendrai de vous que vous m’informiez de la situation dans le district où vous semblez avoir pied à terre. Voilà la suite que je vous propose. Qu’en pensez-vous ?

Ainsi, il prendrait le temps de la réflexion. Je pouvais bien lui rétorquer que mon silence sur ses petites entreprises ne serait certainement pas gratuit et qu’il y avait des limites aux délais qu’il pouvait me jeter. Seulement, ce serait là le contraindre à une position où sa défiance jetterait toujours des résultats discutables sur le contrat qui nous lierait. Je prenais en tout cas note de ses réticences à jouer l’espion auprès des siens. Une position que je comprenais parfaitement et qui, pour être honnête, ne me dérangeait absolument pas. Comme si, au fond, je pouvais parfaitement me passer de cette voie de négociation.

Ce qui m’importait, en l’état, était de trouver un marché qui serait favorable à la naissance d’une relation mutuellement profitable. Ainsi seulement, nous serions à même de nous faire suffisamment confiance pour tirer parti l’un de l’autre. Bien entendu, il tiquait sur le fait qu’un membre haut placé du Gotei 13 se soucie des intérêts de la Soul Society. En d’autres termes, qu’un outil tel que moi à la solde des puissants puisse réellement agir en faveur de ceux qui importaient à mon interlocuteur. À ses yeux, nous appartenions à deux mondes différents. Là-dessus, je ne pouvais vraiment lui donner tort. Ce pourquoi je gardais mon expression de neutralité.

À ce titre, ses dernières paroles n’étaient pas sans donner une empreinte particulière à mon sourire. Étais-je amusée ? La certitude, c’était que je n’en prenais pas offense. Je n’étais pas sourde aux sous-entendus qu’il me portait. Charge à moi donc de retourner le problème.

– Hm. Vous n’avez pas tort, même si la vérité est plus grise que vous le pensez.

Je pouvais parler de mon passé et de la place ambiguë que je tenais dans les rangs du Seireitei. Seulement, ce serait pécher par imprudence. Moi-même, je ne pouvais accorder ma confiance si aisément à une personne que je venais de rencontrer. Cela, il devait bien le réaliser sans que je n’ai à lui dire directement.

– Si vous voulez mon avis, un agent n’apporte de résultats que s’il veut bien en donner. Je ne crois pas que qui que ce soit souhaite s’impliquer sans l’avoir choisi en premier lieu.

La méthode usuelle pour recruter des indics tenait à les faire chanter. Moi-même, je m’étais trouvée à utiliser ce levier bien commode. Seulement, pour l’avoir éprouvé, j’en connaissais parfaitement les limites. Et avec cet homme dont les erreurs ne méritait pas un tel traitement, je ne souhaitais pas m’engager là.

– Si d’aventure vous acceptiez de collaborer, alors vous pourrez choisir d’arrêter quand vous le voudrez. En contrepartie, je ne fermerai plus les yeux sur vos actions et vous devrez cesser vos escapades dans les réserves sur le champ. De toute manière, ce n’est pas comme si je pourrais retourner vos crimes contre vous-même pour la raison que je prendrais le risque d’être mise à jour sur des intelligences bien dangereuses pour une personne que les officiels attendent au tournant sur la base d’une place plus précaire que vous le pensez.

Je le devinais en tout cas suffisamment malin pour ne pas se contenter de prendre les coups. Ainsi, quoiqu’il arrive, le rapport qui pouvait nous lier ne se rapporterait guère vraiment à une quelconque forme de chantage. S’il ne souhaitait pas aller plus loin, alors, il mettrait un terme à ses délits et j’aurais accompli ma mission. L’un comme l’autre, j’étais gagnante, même si je préférais m’ouvrir des opportunités plutôt que de les fermer en suivant simplement le rôle que le Nibantai me vouait.

En dehors de ces considérations, je lui avais suggéré que je ne me trouvais pas tant que ça dans une position de force envers lui, bien au contraire. Je possédais de lourdes faiblesses et sans doute en apprendrait-il davantage s’il devait consentir à prendre plus de risques avec moi. Ne me restait plus qu’à sortir ma dernière carte.

– Je vous l’ai dit, je suis disposée à négocier. Alors oublions un temps la suggestion que je vous ai faite. Vous ne souhaitez pas nuire à vos amis de quelques manières que ce soit ? Très bien. Mais que me proposez-vous à la place ?

Je le laissais examiner la valeur des intérêts que je pouvais gagner dans cette affaire. Je devais probablement donner l’impression d’avoir plus à perdre qu’à gagner à emprunter ce genre de voie étriquée. Fermer les issues était le choix le plus simple à prendre dans mon répertoire. Seulement, d’une manière que je considérais évidente, je me fermais dans le même temps aux opportunités découlant d’une appréciation plus souple. En dépit des doutes qu’il m’adressait, je demeurais imperturbable dans mon attitude. J’attendais simplement de voir où le porterait son cheminement. Ma principale difficulté tenait dans l’impossibilité d’incarner un ethos tel qu’il me prêterait sa confiance.

À sa place, je réagirais pareil. Donc je me figurais bien la circonspection à la source de ses interrogations. Visiblement, il était plus réceptif à la suggestion de me donner lui-même son prix. Ce faisant, moi-même, je pouvais jauger de la valeur qu’il attribuait à mon service. Souvent, après avoir accueilli une proposition inacceptable, le négociant se prenait de formuler une contrepartie supérieure à ce qu’il aurait consenti de but en blanc sitôt la discussion engagée.

Une tendance qui semblait ici se vérifier dans une orientation qui, à la vérité, me serait plus utile que ce que je lui avais moi-même soumis. Par la même occasion, il me renforçait dans ma première impression. Il méprisait les puissants. Et s’il pouvait leur nuire, alors sans doute qu’à ses yeux, il serait doublement gagnant. Ainsi, nous approchions d’un compromis que je jugeais équitable. Encore qu’à la réflexion, cela restait inégal. Effectivement, Yuta se projetait dans un rôle plus actif et dangereux que j’aurais osé lui suggérer. Et cette inégalité, si elle pouvait m’arranger en l’état, jetterait forcément quelques formes de pression injustes qui couperait court à notre contrat.

Au vu de la débrouillardise qu’il m’inspirait, je ne pouvais croire qu’au besoin, il ne s'accommoderait pas de solutions se passant de mon soutien. Pire, je pouvais arriver dans une situation qui demanderait au Nibantai un investissement que je ne souhaitais pas vraiment initier. Ces vols n’en valaient pas la peine. Tout au plus étaient-ils assez remarquables pour craindre le bâton. Mais les risques encourus n’étaient pas franchement oppressants.

– Plus tôt, vous avez tiqué sur ce que j’avais à gagner là-dedans. Prenez simplement cela comme une méthode usuelle du Nibantai qui se doit de réunir autant d’informations que possible pour mener à bien ses missions. Cela ne veut pas forcément dire : mettre le nez dans l’œil du cyclone.

Posant un léger silence, je cherchais à rééquilibrer les termes de notre contrat en sa faveur. Je préférais des résultats modérés mais qui s’entretenaient sur le longs termes plutôt que d’autres excellents mais à usage unique. J’étais arrivée à mon poste depuis récemment. Je devais donc construire mon réseau de zéro, ou presque.

– Prendre de tels risques, nous en reparlerons quand nous nous ferons suffisamment confiance. En attendant, de simples rumeurs et observations suffiront. Plus tard, nous pourrons toujours renégocier les termes de notre contrat si vous souhaitez aller plus loin.

J’espérais par ce geste marquer quelques points. L’exercice demeurait difficile, car je le manipulais bien entendu. C’était tout l’intérêt de cette rencontre. S’il n’avait été question que de le rappeler à l’ordre, alors le Kyubantai aurait bien largement suffit. En revanche, le Nibantai incarnait une logique plus pragmatique qui considérait que le moindre mal permettait de garantir au mieux l’Ordre dans la Soul Society.

– Quant à l’orientation que prendront vos informations, j’y consens parfaitement. À la fin, vous aurez le dernier mot sur ce que vous voudrez bien m’adresser. Vous ne serez pas subordonné au Nibantai. Il n’est pas question ici de parler chantage, mais paiement.

Reprenant mon sourire, j’allais ponctuer mon propos.

– Alors, peut-on parler ?

L’affaire était donc entendue. Au final, nous étions arrivés à un accord satisfaisant où aucun ne s’engageait plus que de raison. Simplement, le lien était assuré. Et au sein des services de renseignement, c’était là l’observation la plus importante à tenir. Avec le temps, je pouvais souhaiter que nos rapports nous engagent davantage sur le chemin de la confiance. Cela dépendrait de ma gestion future. En attendant, je n’avais que mes mots. Encore que mon action de classer son dossier pouvait être vue comme un premier pas vers lui.

Ce que j’aurais à gérer bientôt, c’était les falsifications de documents et autres missives destinées à perdre les plaintes qui permettraient à mon interlocuteur d’être dûment payé dans une entreprise où au final, lui seul encourait les risques. Seulement, je le savais maintenant suffisamment malin pour éviter de s’engager dans des choix qui l’incrimineraient. Au pire, je m’arrangerais pour qu’il ne soit jugé que pour le délit momentané, faisant l’impasse sur les successions de vols qui pouvaient alourdir les charges dressées à son encontre. En cela, le service que je lui proposais possédais une valeur certaine, même si dans l’histoire, le Nibantai pouvait donner l’impression de la passivité.

Maîtriser l’information n’était pas une mince à faire. Charge à moi d’étouffer ce que je comprenais et diriger les oreilles là où j’étais davantage dans l’ignorance. Pour les quelques entretiens de membres de la onzième division passés au sein de mon bureau, je me dis que ça ne mangeait pas de pain de surveiller ce qui pouvait s’y passer. Et sur un malentendu, qui sait, le nommé Yuta pouvait me communiquer une affaire qui me ferait atteindre de grands résultats sans avoir engagé de moyens pouvant nuire à nos résultats. Un espion découvert suscitait davantage la méfiance qu’un délinquant trop curieux.

Quant à sa dernière remarque, elle eut l’effet de m’inspirer un sourire. J’ignorais alors s’il me parlait au premier ou au second degré. Force était de constater, en tout cas, qu’il serait de nature à me surprendre à l’avenir. Souriante, je lui répondais.

– Oh, vous savez ce qu’on dit. Pas vu, pas pris.

Pour un peu, cela pouvait représenter un adage fort à propos pour désigner la philosophie du Nibantai. Bien sûr, je pouvais prendre ce qu’il disait au pied de la lettre. Mais je me dis que s’il n’était pas suffisamment adroit, alors l’information de ses étourderies me tomberaient naturellement dans le bec. Si au contraire, je n’apprenais rien de ses combines, c’était qu’il était tout à fait capable d’assumer la fonction d’indic que je lui consacrais alors.

– C’est tout pour moi. Vous pouvez disposer.

Ainsi, je concluais cette échange qui m’avait vu étendre encore un peu le réseau que je m’efforçais d’établir au sein du Seireitei. Et qui sait, plus si affinité ?