Marriage Story

Les devoirs de Nozomi étaient doubles. D’un côté ceux la Capitaine de la Neuvième Division. De l’autre, ceux la cheffe du clan Tomoe. En temps normal, les premiers dominaient largement. Pourtant, à la plus grande surprise de tous, elle donnait beaucoup d’importances aux seconds depuis quelques temps, oeuvrant à droite et à gauche. Sa façon d’être avant le décès de sa mère, rejetant en grande partie le poids de la noblesse, était connue de tous. Si elle avait changé d’attitude à sa prise de fonction, il était bien difficile de chasser aussi vite le naturel.
Ce que tous ignoraient, c’était les raisons de tout cela.

Une simple idée. Une proposition ne venant pas d’elle, voilà ce qui avait initié cela. Shugoshin Akemi avait émis cette possibilité au sein de conversation des plus graves, possiblement s’en s’attendre à un retour positif.
Servir d’appât afin de ferrer un jeune noble en quête de statut social, le tout afin de résoudre le mystère d’un complot se tramant dans l’ombre du Seireitei. Situation inattendue en soi. Probablement le minimum pour que celle se définissant avant tout comme un soldat ne s’intéresse à de tels sujets.
Pourtant, depuis le moment où ce plan avait été envisagé, quelque chose l’avait dérangé.

Peu avant, elle venait de dire qu’il serait suspect qu’elle ou le Capitaine Igarashi ne manifeste leur intérêt sur l’affaire du disciple de Yamashita Tsubasa. En serait-il différent si elle allait se proposer à celui dont le nom avait directement cité au sein d’une affaire pour laquelle elle se retrouvait sous enquête ?
Tel était le problème qu’il fallait contourner. Tel était le centre de ses préoccupations en tant que matriarche de sa famille. Le tout sans laisser paraître la vraie raison de tout cet affairement. Chose n’étant pas mince affaire.
Mais les fils commençaient à se démêler et une solution lui paraissait envisageable.

Aussitôt, un message fut envoyé à la Vice-Capitaine. Une demande d’entretien, initiée au nom de la Cheffe du Clan Tomoe et non de la Capitaine de la Neuvième Division. Adressée, bien entendu, à une représentante du clan Shugoshin. Elle n’oubliait pas qu’ils restaient sous enquête, mais nul ne leur avait interdit d’oeuvrer pour leurs familles. Et était-il étrange qu’elle s’adresse à une connaissance ?
En cette soirée d’automne, les deux jeunes femmes n’allaient pas parler d’affaire du Gotei 13.
En cette soirée d’automne, l’ordre du jour serait un mariage.

Avoir été promue Vice Capitaine lui avait donné un peu d’estime de la part de sa famille. Si autrefois elle évitait de se rendre au manoir familial autant que possible, à présent elle pouvait davantage en disposer sans qu’on le lui reproche. Sa jeune sœur, favorite de la famille, n’était de toute façon pas là, trop occupée à faire ses classes à l’Académie. Quant à l’aînée, elle ne quittait pas d’une semelle l’Ogasawara qui lui avait été confiée. Sans être le moins du monde dérangée, elle pu donc y recevoir la cheffe du clan Tomoe.

Dans un salon où la décoration alliait raffinement, confort et minimalisme, Nozomi fut conduite et y trouva la Shugoshin. Cette dernière l’accueillit d’un sourire suivit d’une respectueuse inclinaison de la tête. D’un geste gracieux de la main, elle l’invita à s’asseoir, et déjà, un serviteur s’affaira à verser un thé fumant dans des tasses de porcelaine. La douce et posée Akemi attendit que son invitée de marque s’installe.

« Soyez la bienvenue chez… moi. »

Légère hésitation perceptible à la fin de sa phrase. Il faut dire que cela faisait si longtemps qu’elle ne considérait plus ce manoir comme le sien qu’il était difficile d’en reprendre l’habitude. Ses appartements au sein des quartiers résidentiels de la Huitième division remplissaient davantage ce rôle. Mais vivre ici lui rapporterait bien plus de renommée et de notoriété. Et cela lui serait probablement fort utile à l’avenir.

« Je suis ravie de vous recevoir. Les occasions de discuter en dehors de nos fonctions sont bien trop rares. De quoi souhaitiez-vous m’entretenir ? »

Un dossier sous les bras, elle arriva dans la demeure des Shugoshin. En pur respect des protocoles, elle fut accueilli comme il se devait et conduite vers son hôte. Acceptant l’invitation du geste, elle s’installa face à Akemi, posant sur le côté les documents qu’elle avait apporté. Si ceux-ci serviraient plus tard, tel n’était pas encore le moment. Un sourire tandis qu’elle notait une hésitation dans les mots prononcés, certainement signe d’un inconfort.
L’origine, elle ne pouvait la savoir. Etait-elle nerveuse à l’idée de ce que pourrait être l’objet de cette venue ? Ou bien n’était-elle tout simplement pas habituée à recevoir ? D’autant plus que, en cohérence avec sa demande, Nozomi était là tant que cheffe de clan, ayant laissé de côté le Shihakushō pour revêtir un kimono aux teintes pourpres.

>> Et je vous remercie de bien vouloir m’y accueillir.

A ce moment, elle pourrait commenter la décoration, complimenter le thé. Toutes ce genre de choses se faisant en société. Toute ce genre de choses n’étant pas de la nature de la Capitaine. Elle s’y contraignait lorsqu’elle agissait purement en tant que noble, mais ce n’était pas vraiment le cas. Aucune risque qu’Akemi soit dupe, cet entretien ayant même été annoncé lorsque de leur dernière rencontre secrète.
Observant naturellement autour d’elle, comme si en effet elle appréciait l’aménagement de la pièce, elle s’assura en vérité que nulle oreille indiscrète ne soit toujours présente. Puis, fixant de nouveau la Vice-Capitaine, une expression mêlant le sérieux de l’affaire qu’elles avaient en commun à l’aspect plus détendu de cette discussion, elle prit de nouveau la parole.

>> Comme évoqué lors de notre dernière rencontre, je pense en effet que votre idée méritait de s’y pencher. Si un mariage se prépare déjà, je pense que les Kamiyama seraient heureux d’en célébrer un autre en effet. Un point me travaillait cependant. Comme pour l’autre entretien que souhaitait notre ami commun, si je m’y présentais directement, cela ne pourrait qu’attirer la suspicion.

Malgré ses précautions, elle évitait malgré tout de parler trop directement. Elle ne doutait cependant pas qu’Akemi ne comprendrait qu’elle évoquait le Capitaine Igarashi et son idée qu’ils aillent rencontrer l’ancien second des nécromanciens. Et donc qu’elle fera le lien avec le fait que cela ne ferait qu’attirer l’attention.

>> Cela en tête, il fallait réfléchir autrement. Si l’idée d’approcher cette personne sous couvert de mariage est bonne, mais que je ne peux le faire moi-même, cela signifie qu’il faut voir autrement. Et donc que ce n’est pas moi qui dois me marier.

Un léger sourire sur le visage, elle fixait Akemi droit dans les yeux.

L’idée en question, la Shugoshin s’en souvenait très bien. Tenter une approche sous couvert d’un mariage d’intérêt avec le dénommé Kamiyama Seijuro. Pour Akemi, Nozomi était la candidate parfaite, à la tête de son clan de haute noblesse, un physique avantageux, sans parler de son grade au sein des Shinigami… Mais la belle Tomoe met le doigt sur quelques détails entrant en contradiction avec ce plan qui avait l’air pourtant si bon sur papier. La Fukutaicho ne peut même pas proposer de se rendre à l’autre entretien à sa place, parce que la Huitième division n’aurait aucune raison d’y aller. Bien qu’elle ne puisse remplacer Nozomi dans ce projet là en revanche pour l’autre ce n’est pas impossible. Cette possibilité que suggère la belle de façon subtile fait frissonner l’Immaculée.

« Vous… Moi ?! »

La Shugoshin est visiblement décontenancée. Ces histoires de mariage, elle imaginait qu’elle pourrait y échapper elle aussi. Mais en cet instant elle ne voyait personne d’autre pour tenter un rapprochement avec le Kamiyama.

« Etes vous certaine que je pourrais convenir ? Je n’ai pas autant de qualités que vous à faire valoir. Bien sûr je pourrais me vanter de ma récente promotion. Et peut-être qu’Ogasawara-Sama pourrait parler en ma faveur... »

Oui elle pourrait bien avoir une carte ou deux à jouer. L’idée ne la met pas du tout à l’aise, mais de toute façon, ce n’est pas comme si elle avait d’autres possibilités. Le seul qui pouvait l’intéresser était aussi insensible à son égard qu’une planche de bois alors rien ne la retenait. Et puis il est plutôt pas mal ce Seijuro. Ce n’est pas comme si elle devait faire la cour à un vieux ragoûtant.

« Par contre… Il va falloir que vous m’aidiez. Je ne sais absolument pas comment me mettre en valeur. »

Et même si ça ne fonctionne pas au final. Elle veut au moins avoir fait tout ce qu’elle pouvait pour cette mission afin de ne rien regretter.

Les mots de la Capitaine firent visiblement leur effet sur la Vice-Capitaine. Plus encore que ce qu’elle avait pensé en les prononçant en vérité. Sans lâcher des yeux son interlocutrice, elle l’observait réagir, évidemment bien peu à l’aise à cette idée. Mais n’était-ce pas la sienne après tout ? Il serait bien dommage de laisser tomber au premier contretemps.
Ainsi, sans perdre son sérieux, Nozomi croisa les bras, écoutant les derniers paroles de la Shugoshin avec attention avant de s’exprimer de nouveau.

>> Voyons, ne dites pas de sottises et regardez-vous dans un miroir. Nul homme censé ne pourrait résister à vos charmes, surtout si vous y mettiez véritablement du vôtre. Rien qu’un peu plus d’assurance de votre part et le monde peut-être à vos pieds.

Pour qui le connaissait depuis peu, cela pourrait sembler étrange. Parler séduction n’était visiblement pas un domaine où elle était experte. Au contraire, elle était plus à même de repousser que de chercher à plaire. Simplement, cela ne l’empêchait pas d’avoir des yeux. Et d’avoir su jouer de ses atouts par le passé.
Mais l’illusion ne peut durer qu’un temps. Ses lèvres commencent à trembler légèrement, comme voulant se tenir. En vain. Soudainement, un éclat de rire, franc et sincère.

>> Excusez-moi, c’en est trop. Je ne m’attendais pas à ce point.

Nulle moquerie n’est présente, bien que cela puisse pouvoir être interprété ainsi. L’idée n’était même pas préparée, mais venue naturellement alors qu’elle s’exprimait. Bien que la cause était des plus sérieuses, il lui était bien trop rare de parler de tels sujets pouvant paraître aussi frivoles.
Et pourtant… Et bien elle était la première à s’en étonner, mais cela faisait du bien. Au bout de quelques instants, elle reprit enfin contrôle d’elle-même, gardant un véritable sourire. De toutes évidences, cela l’avait mise de bonne humeur.

>> Vraiment désolée, l’occasion était trop parfaite. Je n’avais pas un seul instant envisagé que vous puissiez prendre aux sérieux cette idée. Surtout que, si nos cibles ont autant d’influence qu’on le suppose, elles ne peuvent ignorer votre implication dans l’affaire. Je pensais à quelqu’un d’autre.

Elle était présente lors de cette nuit, la mettant possiblement également dans la liste des suspects. Et surtout créant un lien avec la Capitaine qui pouvait faire naître la méfiance du côté de Kamiyama Seijuro. Ce pourquoi elle n’avait pas pensé à cette possibilité.
Jusqu’à maintenant du moins.

>> Que l’on soit bien d’accord cependant. Je pense véritablement ce que j’ai dit. Si vous le voulez, n’importe quel homme tomberait sous votre charme. Si vous souhaitez essayer, je pense que vous pouvez être à la hauteur de cette tâche. Cela serait risqué, mais je ne doute pas de vos capacités à vous défendre en cas de besoin.

Beaucoup plus que le nom qu’elle avait envisagé jusque là, sans l’ombre d’un doute.

Si seulement la Capitaine pouvait avoir raison. Nul homme censé ? Devait-elle en déduire que son protégé ne l’était pas ? Non, c’est simplement qu’il ne voit rien, ou pas plus loin que le bout de son nez. Faire plus d’effort, cela ressemblerait davantage à une énième humiliation pour la Shugoshin. Mais qu’importe, ce n’est pas lui qu’elle est censée séduire. Enfin, c’est ce qu’elle pense jusqu’à ce que Nozomi éclate de rire face à une Akemi stupéfaite. Elle ne devrait pas être étonnée pourtant, ce genre de chose lui arrivait assez fréquemment. Se méprendre, être trop crédule ou mettre les pieds dans le plat étaient des soucis quotidiens. Mais Nozomi ne semble pas fâchée et pas moqueuse non plus. Parfois, Akemi pouvait faire cet effet là, semant dans son sillage un vent de candeur. Alors à son tour elle sourit bien que plus timidement.

« A qui pensiez-vous alors ? »

C’est vrai qu’elle n’a pas tellement pris en compte le fait qu’elel aussi est mise en examen. Toutefois, pour qui s’intéresse de près à cette histoire, et d’après les rapports, elle n’a rien fait de mal. Au mieux, peut-on se dire qu’elle s’est trouvée au mauvais endroit au mauvais moment, ou autrement dit, affecté au mauvais groupe de mission. N’est ce pas d’ailleurs parce qu’elle est moins suspecte que les autres qu’elle a été promue malgré tout ?

« Arrivera-t-on seulement à la convaincre ? En tout cas, je reste une possibilité, un plan B. Il vaut mieux mettre toutes les chances de notre côté. »

Etre le plan B ou le plan A, peu importe. Elle est surtout curieuse de savoir qui ferait une fiancée idéale aux yeux de sa collègue. Comme elle le dit elle-même, c’est risqué et Akemi n’est pas certaine de vouloir courir le risque de mettre en danger une noble qui ne pourrait pas aussi bien se défendre qu’elle.

Parce que oui la survie et la défense, c’est un peu son job de base en tant que protectrice de Koga. Elle ne pourrait pas aussi bien venir à bout des ennemis que des combattants plus spécialisés, mais elle pourrait s’en sortir en attendant des renforts. Et puis question attaque, elle n’est pas en reste non plus. Récemment d’ailleurs elle s’est entraînée sans relâche, durant des semaines, afin de mettre au point une nouvelle technique qu’elle espère suffisamment puissante pour peser dans la balance. Son Bankai étant très offensif, elle n’a pu s’entraîner que lorsqu’elle était seule, au beau milieu de la nuit, dans la salle d’entraînement de sa division avec pour seule compagnie, la lueur de bougies. On ne peut pas dire que ce soit une technique parfaite car elle se retrouve toujours tailladée par la pluie de lames de son Bankai. Mais à présent, elle parvient à les manipuler suffisamment bien pour en concentrer une partie importante en une zone plus restreinte. Plus de chances de toucher, plus de chances de faire des dégâts.

Mais ce n’est pas le sujet de discussion actuel alors elle se gardera bien d’en toucher le moindre mot. Outre les informations sur la femme qu’elle attend, il y a d’autres points plus triviaux qu’elle aimerait aborder.

« A votre avis, quelle couleur m’irait le mieux au teint ? Je dois mettre toutes les chances de mon côté, au cas où... »

>> Bleu clair. Mettez donc encore plus en valeur ces yeux. Bien utilisés, ils peuvent devenir votre plus grande force en la matière.

Dès le début, nous étions bien conscients que cette discussion ne serait pas forcément notre point fort. Nous avions certes grandement participé à son éducation en la matière, alors qu’elle semblait être initialement un cas désespéré, mais c’était plus par devoir séculaire. Nous restions une arme et, bien que nous ne lui avouerons jamais, plus adeptes dans le domaine qu’elle appréciait plus.
Mais là… Nous étions bien au-delà de nos compétences. Et jamais nous n’aurions cru voir Nozomi, entre toutes, se mettre à discuter beauté. Cela paraissait être tellement loin de ce qu’elle était. Au sein de son âme, nous étions bouche bée. La petite soldate avait fait bien des progrès.

>> Mais je pense que travailler votre confiance en vous serait encore plus efficace. Je ne vous connais certes que bien peu malgré tout, mais vous affirmer ne pourrait faire de mal.

Cette conversation l’avait bien montré après tout. A peine l’idée avait-elle été évoquée que la Vice-Capitaine semblait avoir perdu de ses moyens. La surprise pouvait certes jouer, mais cela n’était pas vraiment une excuse aux yeux de la Capitaine. Elle restait avant tout une combattante et, dans l’action, douter de soi était la meilleure façon de marcher vers la défaite. Elle ne faisait qu’appliquer cette pensée au-delà des champs de batailles.
Elle l’avait toujours fait, mais encore plus depuis son accession. Montrer ses faiblesses lui était chose interdite, pas à quelqu’un de son statut. Le poids pesant sur ses épaules était bien trop important.

>> Je me disperse cependant. Je pensais à l’une de mes « cousines », Tomoe Shina.

A ce moment, elle prit le dossier qu’elle avait amené avec elle, l’ouvrant afin de dévoiler la première page sur laquelle figurer la photo de ladite Shina. Une jeune femme, clairement leur cadette à toutes deux.
D’un geste, elle le glissa vers Akemi afin que celle-ci puisse l’étudier au besoin. Bien sûr, il n’y avait rien de secret, simplement les informations importantes sur elle et sa proche famille. Elle prit cependant la parole afin d’exposer l’essentiel.

>> N’ayant nulle héritière, s’il venait à m’arriver quelque chose il faudrait aller chercher celle qui prendrait ma suite. Son père est l’un des principaux à s’être opposé à ce que je succède à ma mère, et son influence reste présent. Si sa fille se trouve être mariée au chef d’un clan en pleine ascension, nul doute qu’elle serait parmi les principales prétendantes, même en l’absence de Narukami.

Bien sûr, elle ne l’exprimait pas directement, mais, si cela prenait, elle comptait bien sur ça afin de tenter leurs ennemis à sortir de l’ombre pour s’en prendre à elle. Comme expliqué, sa certitude en ses propres capacités était telle qu’elle ne voyait que des avantages à servir d’appât, et ainsi avancer dans le but de déjouer ce complot.

>> Je n’ai bien entendu évoqué cette idée à personne, mais je pense qu’il serait possible de la convaincre. Même si nous nous sommes éloignées, je m’entendais plutôt bien avec elle auparavant. Et en jouant sur la possibilité de prendre la tête du clan, je pourrais même convaincre son père. Il me faudra bien entendu négocier pour réussir sans révéler le véritable but de l’opération, mais j’ai maintenant l’habitude.

Cela ne faisait certes pas si longtemps sur la vie d’un Shinigami, mais elle avait pris sa place en tant que Cheffe de Clan et parlementer avec les nobles, qu’ils soient de sa famille ou non, était devenue une tâche du quotidien. Ce serait certes l’une des plus importantes, mais de nouveau le doute n’était pas présent dans son esprit quand à sa réussite.

>> Bien sûr, cela n’empêche de prévoir votre intervention au besoin. Ou même, que l’on compte sur vous uniquement si vous préférez ne pas mêler d’autres personnes. Cela reste votre idée, je ne l’aurais personnellement pas eu, et il me semble donc normal que votre avis ait son importance.

Voilà une teinte qu’elle devrait pouvoir trouver sans problème, surtout dans sa garde robe. Entre le bleu, le blanc et le rouge de toute façon, elle n’a rien d’autre. Sans compter les motifs bien sûr. Travailler la confiance, c’est autre chose. Mais Akemi a déjà eu une expérience similaire. Jouer un rôle c’est plus facile pour elle car elle ne craint pas d’être jugée. Tout au plus, si l’on doit la critiquer, elle peut se rassurer en se disant qu’ils se forment un avis sur une personnalité qui n’est pas la sienne. Alors cela ne compte pas et ne l’atteint pas. On dit d’ailleurs que les personnes qui paraissent les plus extraverties d’apparence sont en fait les plus timides en réalité. Certainement que pour éviter d’avoir à assumer ce qu’ils sont réellement, ils préfèrent attirer le regard sur autre chose. La Shugoshin n’en est pas là, de très loin. Mais jouer la comédie ne devrait pas être un problème en soi.

« Cela devrait aller. »

Tomoe dévoile l’identité de la personne à laquelle elle pensait initialement et Akemi opine doucement. Ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier, c’est bien connu. Le fameux plan B. par contre si ce dernier ne fonctionne pas, elles n’auront pas d’autre roue de secours.

« Votre cousine est une excellente idée. Je pense qu’elle pourrait même mieux fonctionner que moi. Mais je tenterai quand même, au cas où. Parce que si nous avons la possibilité de ne pas impliquer une tierce personne, ce serait préférable. En revanche, si j’échoue elle nous sera bien utile. Je compte sur vous pour la préparer comme il se doit. »

Le reste dépendra de la capacité de Nozomi à convaincre les membres de sa famille et pour cela, Akemi ne sera d’aucune utilité. Il ne restera qu’à attendre la cérémonie, occasion parfaite pour rencontrer les personnes que l’on souhaite. Profitant de la présence de la Capitaine, l’Immaculée pose une question potentiellement déroutante.

« Comment gérez vous les critiques ? Enfin… J’imagine que vous ne devez pas en recevoir souvent, vous avez l’air si parfaite. Mais, si ça arrive, comment réagissez-vous ? »

Elle ne pensait pas réellement que cela irait en ce sens, mais elle ne pouvait nier que la pertinence. Eviter autant que possible d’impliquer des personnes étrangères à l’affaire était grandement préférable, en plus de leur faire courir des risques. Si elle avait parfaitement confiance en la capacité à Shina de jouer le jeu de l’innocence, il lui serait plus délicat de se défendre en cas de danger.
Là où Akemi était une Vice-Capitaine. Par conséquent, elle devait savoir se défendre. Si Nozomi n’avait initialement pas pris en compte cette possibilité dans ses plans, il était assez clair que la Shugoshin n’était pas autant sous le feu des projecteurs qu’elle dans cette histoire.
Comme quoi, être une moins grande figure, que ce soit de noblesse ou au sein du Gotei, avait du bon. Pendant un bref, sous le masque qu’elle arborait, Nozomi l’enviait presque.

>> Je vous rejoins, cela serait plus prudent, ne serait-ce que pour elle. Si je n’avais pas anticipé un tel déroulé, cela confirme qu’il était en effet nécessaire de vous faire part de mes réflexions. Cela reste votre idée après tout. Et là encore, votre réflexion est pertinente.

Savoir s’entourer était certainement quelque chose que Nozomi ne faisait pas assez. Même au sein de sa division, la relation qu’elle avait avec Mayuri n’était pas forcément celle que l’on pouvait imaginer entre une Capitaine et sa Vice-Capitaine, la première gardant une certaine distance, non faute pour la seconde d’essayer de la briser.
Elle en connaissait bien entendu les raisons, et continuait de considérer que c’était la chose à faire, mais n’en ignorait pour autant pas les faiblesses que cela entraînait. Surtout quand une situation comme celle-ci se présentait.

>> En tous cas, nous semblons avoir un plan. Ce qui est un progrès non négligeable. Si vous avez besoin de quoique ce soit, n’hésitez pas à me demander, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider. Et, de mon côté, je vais en tous cas commencer à faire en sorte que Shina puisse prendre le relais en cas de besoin.

Elle s’adossa alors un peu plus contre le dossier, pensive. Avoir un plan était en effet une importance avancée. Ils avaient jusque là avancé à l’aveugle, surtout lors de cette fameuse mission nocturne ayant au final plus aggravé la situation qu’autre chose. Alors savoir dans quelle direction ils allaient ?
Surtout que cela n’était qu’une partie des possibilités évoquées, même si l’autre n’avait pas encore eu d’avancée à sa connaissance. Il faudrait qu’elle ne tarde pas à se présenter à la Onzième Division au besoin, mais l’occasion ne s’était pas encore présentée pour elle.

Son attention se porta alors de nouveau pleinement sur son interlocutrice alors que cette dernière lui posait une question, assez inattendue il fallait bien le dire. Une question, et une remarque, qui firent cependant sourire la concernée.

>> Si vous saviez. Il y a une raison pour laquelle certains, dont le père de ma cousine en question, s’opposaient à ce que je prenne la tête de ma famille. Jusque là, il n’y avait en effet pas plus éloignée que moi de l’image que l’on se fait d’une cheffe de famille, et ce malgré les enseignements de mère et Narukami.

D’un coup, nous allions être encore plus attentives à la discussion. Si elle ne mentait pas, il était bien rare qu’elle aborde la question aussi directement. Au contraire même, elle avait plutôt tendance à repousser toute mention. Alors l’évoquer d’elle-même ?
Cela n’était pas forcément pour nous convenir. Et nul doute qu’elle le ressenti.

>> Cependant, de part le double statut qui est le mien, les gens ont des attentes à mon sujet. Il y a six ans de cela, j’étais la seule à pouvoir remplir l’un de ces rôles, et peut-être l’une des rares à convenir à l’autre. Il m’a donc fallu évoluer, me renforcer. Et comme il est hors de question de donner raison à ceux qui en doutaient, et encore plus de décevoir, je fais en sorte que cela arrive aussi peu que possible. Et quand c’est le cas… Et bien je prends sur moi et m’assure que cela reste exceptionnel.

Une brève et légère mélancolie fut perceptible dans son expression. Si elle croyait à ses paroles, peut-être s’était-elle tout simplement résignée à cette situation. Résignée au poids pesant sur ses épaules.

Akemi opine doucement. Deux têtes pour réfléchir valent mieux qu’une. Une troisième même aurait était la bienvenue, mais l’on faisait avec ce que l’on avait. Le plan avait pris forme mais la stratège sait que l’on peut avoir le meilleur des plans, rien ne pouvait se passer comme prévu suivant les aléas. Ces fameux paramètres imprévisibles dont on ne peut s’occuper que le moment venu. D’où l’utilité d’avoir des plans de secours.

Nozomi se livre sur son passé, sur elle-même et la Shugoshin a du mal à imaginer que cette femme qui se tient devant elle a pu être un jour ce qu’elle laisse penser. Mais après tout, elles ne se connaissaient pas à l’époque. Les gens changent plus ou moins, avec le temps et les événements marquants. Sirotant quelques gorgées de thé, elle se demande en silence si c’est pour cela que la jeune femme n’hésite pas à mettre en jeu la gestion de sa famille. Alors qu’elle l’observe en l’écoutant la conseiller, elle note les subtilités des émotions qui s’expriment sur son visage. Cela vient la conforter dans son idée. Cette position qui est la sienne doit être bien pesante. La Shugoshin n’est ni Capitaine, ni chef de sa famille. Alors elle ne peut que tenter d’imaginer la pression que cela représente, mais elle en est certainement loin.

« Prendre sur soi, oui je vois… Dans ma famille, nous avons une tradition un peu spéciale. Celle qui hérite de la tête de la famille n’est pas la première née, mais la première épousée. J’imagine que c’est parce qu’elle est la plus susceptible de perpétuer la lignée. Et aussi parce que notre rôle de protectrice peut accaparer complètement certaines d’entre nous. »

La famille… Est ce réellement une bonne chose que d’être bien née ? L’est-on jamais assez ? Parfois trop peut-être.

« Je ne vais pas vous retenir plus longtemps vous avez certainement plein de choses à voir avec votre cousine. N’hésitez pas à venir me voir pour quoi que ce soit. Vous serez toujours la bienvenue. »

Une discussion touchant à sa fin. Voilà où en était leur rencontre. Pourtant, si elle ne se livra pas autant que la Capitaine, il fallait bien dire que la Shugoshin évoqua un point d’intérêt, démontrant que même au sein de la noblesse les choses variaient selon chacun. La première épousée ? Nozomi pouvait en voir la logique. S’assurer que le nom subsiste était plus important que les prouesses ou les compétences.
Cela n’était pas ainsi chez les Tomoe. Peut-être en raison de l’importance même de Narukami. Ce nom qui était hérité semblait plus important que le reste car il était celui qui faisait perdurer l’esprit de la famille. C’était ainsi que les choses étaient enseignées, si bien que toutes finissaient par y croire.
Ainsi, même si son propre cas était particulier, étant la seule à avoir atteint le rang de Capitaine depuis bien longtemps, l’esprit guerrier était toujours présent, et justifiait l’héritage. Ce qu’elle préférait largement à l’alternative évoquée.

>> Je dois donc être heureuse que cela ne fonctionne pas ainsi par chez nous. Il aurait fallu que je trouve quelqu’un d’urgence juste pour justifier mon rang. Ce qui, je dois le dire, aurait été une bien pire épreuve que devenir Capitaine ou Cheffe de famille.

De nouveau un sourire, accompagnant un ton léger démontrant l’absence de sérieux. Bien entendu qu’elle était consciente de l’exagération de tels mots. Bien sûr qu’elle ne le pensait pas réellement. Pourtant, des trois choses, ce n’était pas pour rien s’il s’agissait de la seule qu’elle n’avait pas encore accompli.
La parfaite soldate n’avait pas envie de perdre son temps en telle frivolités. Ou elle sentait qu’elle n’était pas faite pour cela, d’où le fait d’avoir voulu une autre alternative qu’elle-même courtiser leur cible.

>> Mais je pense qu’en effet cet échange arrive à son terme. Nombreuses choses ont été dites et je pense donc prendre peu de risques à affirmer que cette rencontre ne fut ni inutile, ni désagréable.

Sur ces mots, elle se relevait afin de prendre le chemin de la sortie, n’oubliant pas de saluer au passage Akemi. Pourtant, juste avant de sortir, elle s’arrêta un instant, se tournant vers elle, un nouveau léger sourire sur son visage.

>> Je ne sais pas si vous le souhaitez, mais si oui j’espère qu’un jour vous prendrez la tête de votre famille. Et j’espère bien être invitée à la cérémonie dans ce cas.