Sahara

Sourcils toujours froncé à cause de ce qu’elle a vu se passer à la Grande Cataracte, énervée et frustrée d’avoir assisté à un si cuisant échec, elle retourne en direction de son antre, son terrier. Qui sait si les humains vont s’arrêter à cette seule victoire ? En tout cas, ce n’est que le commencement et l’Acuerdo n’en restera pas là. Pour le moment, les autres doivent panser leurs blessures et elle, est allée aux nouvelles. Un nouveau Tournoi pour rebattre les cartes. Nécessaire il est vrai, mais aux yeux de la Louve, pas suffisant. En attendant, elle n’a pas mieux à faire que d’aller voir si sa « meute » se porte bien.

Tandis qu’elle s’approche des ruines cachant l’entrée souterraine de son terrier secret, elle perçoit une présence. Les ruines ne sont pas grandioses, un tas de pierres taillées de petite envergure, marquant là qu’une ancienne civilisation s’était posé là. Temple miniature, poste avancé, maison de campagne (si l’on puis dire) impossible de déterminer ce que ces vestiges représentaient autrefois. Et c’est bien parce qu’il n’en reste presque plus rien que rares, voire inexistants, sont ceux qui s’y intéressent. Pourtant, il y a bien là un individu dont le reiatsu n’est pas familier à notre Alpha. Enfin si, elle se souvient l’avoir vaguement déjà perçu, mais ne se souvient pas encore d’où ni quand et quoiqu’il en soit, il n’appartient à aucun des Hollow qu’elle héberge et protège profondément en sous-sol.

Avec prudence, silence et discrétion, elle parvient jusqu’à lui. Cette allure, cette prestance… « Tercera. » Voilà où elle l’avait vu. Tout lui revenait en mémoire, notamment son duel contre l’ancien Primera. « Que me vaut l’honneur de votre visite ? »

Pour une fois, elle aura eu l’intelligence de parler avec un minimum de respect plutôt que de sortir un « qu’est ce que tu fous là ? » ou autre phrase du genre qui lui serait venue naturellement pour toute autre Hollow ne faisant pas partie de l’Espada. Ses mots sont polis, mais ils sous entendent clairement qu’il est sur son territoire. Et si pour le moment elle ne le chasse pas de crainte de ne pas être de taille, elle ne cache pas sa méfiance et son hostilité réprimée.

- Ma visite ?

Il sembla avoir un peu de mal à connecter le lien entre l’endroit et la voix qui venait de se faire entendre, comme si pour lui, les ruines n’appartenaient qu’au passé. Celles-ci n’avaient pas encore dévoilé leurs secrets, si elles en avaient ; il venait à peine d’arriver après tout, après avoir remarqué une forme anguleuse sous la pâle clarté de la lune. Pour lui, un vestige à explorer. Pour elle, une tanière sans doute.

Entendre son titre n’avait rien de naturel pour lui encore. Après tout il venait de passer un temps certain dans les entrailles de la terre. Un choix s’était finalement posé à lui afin d’entretenir un brin de santé mentale – s’offrir en permanence au même décor avait de quoi user même les meilleures volontés – il avait hésité entre s’enfoncer plus profondément encore, jusqu’à Los Abismos où il avait entendu parler d’une fresque, mais les descriptions de Matryona avaient parues si fantasques que cela pouvait ne rien vouloir dire du tout. Au final cela lui avait paru même n’être qu’une élucubrations sans véracité physique. Alors ce fut la surface qui eut son intérêt. La possibilité de croiser d’autres âmes également, peut-être de connues ?

Au contraire, c’était un nouveau visage. Et le souci avec ceux-ci, c’était de savoir comment ils allaient réagir, si cela allait se terminer en une rixe ou une inimitié certaine. Il semblait que pour l’heure, au moins son titre marquait une importance ici.

- J’ignorais que cet endroit était habité, ou du moins que quelqu’un y avait porté assez d’importance pour s’y établir et le considérer comme sa propriété. Car vous vous parlez de visite, c’est j’imagine que vous estimez l’endroit comme le vôtre.
Je crains fort devoir vous rétorquer que vous n’étiez pas la raison de ma venue. J’ignore même votre nom et votre allégeance, même si la localisation de votre demeure me laisse à de solides suppositions sur ce second point.
Ce sont plus les pierres que je visitais, en vérité...

Le message est passé. Il a compris que c’était chez elle, ou du moins qu’elle s’était approprié l’endroit. Il faut bien se choisir un pied à terre non ? Cela dit, ce n’est peut-être pas si évident pour lui. Les Arrancar de la Lune vivent peut-être différemment, elle n’en sait rien. En tout cas il n’a pas l’air agressif. Sa présence est pacifiste et n’a absolument rien à voir avec elle, alors elle range son hostilité et poursuit de façon tout à fait civilisée. Les membres de Las Manadas ne sont pas tous qu’un ramassis de Hollow belliqueux.

« Mon nom est Lilith, dite l’Alpha. De Las Manadas effectivement. »

Son regard se tourne un instant vers les ruines apparentes. Ainsi donc, les « recherches personnelles » dont parlait Borick lorsqu’il a fait référence à Cimériès, concerneraient les pierres. Un léger sourire étire ses lèvres. Quelle coïncidence amusante, elle aussi aime bien les vieilles pierres, ou plutôt, les secrets qu’elles renferment potentiellement. « Je comprends. » Son regard se tourne de nouveau vers le vagabond. Il dégage quelque chose d’assez puissant pour qu’elle éprouve du respect à son égard. Suffisamment, pour qu’elle ne lui demande pas de passer son chemin tout de suite. Sa prestance auréolée de mystère n’est pas pour lui déplaire. Cependant, cela pourrait vite dégénérer s’il se montre un peu trop imbu de lui-même.

« Je ne vois pas d’inconvénient à ce que vous regardiez ces pierres de plus près. Néanmoins… Le plus intéressant ne se trouve pas à la surface. »

De ses mains elle désigne le sous-sol où il pourra percevoir, en se concentrant un peu, les Hollow de bas niveau qui y sont agglutinés laissant deviner l’existence d’une série de galeries leur servant de maison. La Tercera n’a rien à craindre. S’il le voulait, s’il se sentait menacer, il pourrait tous les terrasser en un rien de temps, même s’ils sont nombreux.

« Ma meute. » Présente-t-elle alors. « Ne vous fera rien si je n’en donne pas l’ordre. » Ce qu’elle ne fera pas évidemment. En tant que Louve, elle a à coeur de protéger les siens, pas de les utiliser dans une opération suicide inutile.

« Peut-être souhaiteriez-vous voir ? » Les grottes évidemment, pas la meute, elle n’est pas idiote et sait que ces Hollow ne doivent avoir aucun intérêt pour lui.

Elle se présente en place de montrer les crocs. Se calme au lieu d’attaquer. Peut-être n’aurait-il pas à faire usage de sa lance aujourd’hui. Encore que lorsqu’elle lui indique sa meute, il s’en pose la question. Ces Hollow avaient-ils la retenue nécessaire pour se retenir d’attaquer ? Fonctionnaient-ils vraiment comme un pack, une obédience commune à l’Alpha ? Il ne connaissait pas vraiment ce principe. Il savait ce que c’était que d’être solitaire. Il connaissait aussi les bénéfices de la communauté, mais les Arrancar de la Lune avaient cela de particulier que c’était chose instinctive pour eux. Mettre en commun leurs efforts et leur connaissance. Mais c’était là s’extirper de leur condition de Hollow, ce que le Ritual de Luna semblait impliquer par un cœur récupéré.

- Ces pierres ont-elles quoi que ce soit de particulier, à vos yeux ?

Les ruines, les cavernes. Elles n’auraient pas d’intérêt s’il n’y avait rien qui détonnait, qui lui permettait de faire un lien, de trouver quelque chose de caché. Le fait qu’une meute y vive n’avait pas vocation à le rassurer sur cela, un lieu trop visité ne recelaient généralement de rien de concret, et si indices devaient y avoir, ils avaient déjà disparu depuis longtemps. Il n’excluait pas la possibilité d’y jeter un œil si nécessaire, quitte à montrer de sa puissance. Mais jusqu’à preuve du contraire, ce pourrait tout aussi bien être un guet-apens. Et l’érudit n’escomptait pas tomber dans la gueule du loup aussi facilement.

- Imaginons qu’il n’y ait rien à y voir, et que vous décidiez lorsque je me trouverai dans la pénombre de donner l’ordre qui retient votre meute. Imaginons juste que cela soit le cas. Agiriez-vous différemment qu’en m’invitant cordialement à pénétrer dans votre antre ?

Simple question, mais qui venait justifier ce pourquoi il n’avait pas esquissé la moindre volonté d’étudier les lieux plus en profondeurs pour l’heure.

Les mécanismes qu’elle a elle-même mis en place ne sont peut être pas ce qui intéresserait l’Arrancar. A ses mots, elle commence à se dire qu’il n’y a rien pour lui ici. Néanmoins, le fait qu’il recherche quelque chose l’intrigue. S’il y a quelque chose de caché dans ce monde digne d’intérêt ou utile, alors elle aimerait bien savoir quoi et qui sait, chercher aussi de son côté pour être la première à mettre la main dessus.

Mais avant tout, elle doit répondre à la question posée. Une question, qui la décontenance l’espace d’une seconde. La Louve hausse un sourcil étonné et pose ses mains sur ses hanches, comme si elle était vexée.

« Parce que je suis de las Manadas vous pensez qu’obligatoirement je n’ai qu’une envie, celle de vous tuer ? »

Pensive, elle pose l’index sur son menton et le tapote. Il n’a pas tort d’avoir ce genre d’appréhension. Manadas est presque synonyme de Belliqueux. Mais cette étiquette ne convient pas à tout le monde. L’ancienne Segunda, la scientifique, ne cherchait pas tellement la bagarre, plutôt les échanges constructifs qui auraient pu lui être utiles. Et… Et… Bah faut avouer que les autres ne sont pas tellement fut-fute.

« Mouais. Il ne faut pas grand-chose pour que mes semblables aient ce genre de pulsion. Je comprends. »

Elle croise les bras et relève le menton. L’Alastor ne lui fait pas peur, tout Tercera qu’il peut être. Il est seul contrairement à elle qui a de son côté l’avantage du nombre. Sur son territoire, il n’est pas difficile de trouver assez de courage et de confiance en soi pour se remplir d’orgueil.

« Mais si je voulais vous attaquer, ce serait déjà fait. Au mieux vous auriez pris la fuite, au pire j’aurai eu quelques renforts… Quoi qu’il en soit, je n’ai pas de raison de le faire. Vous n’avez pas l’air de me chercher querelle, ne faites que passer et il n’est pas très intéressant de combattre un Espada en dehors du cadre d’un duel officiel. »

Lilith n’est pas une accro des combats. Elle ne va pas jusqu’à chercher à les éviter, mais ne les provoque pas non plus car pour elle c’est toujours pénible et douloureux, en tout cas, ça l’est forcément si elle doit faire appel à sa Resurrección. Aux yeux de Cimériès, elle doit avoir l’air d’une bête sauvage. Elle s’en moque royalement de ce qu’un inconnu peut penser d’elle. Peut être que c’est pour cela qu’elle n’a pas d’ami. Mais il est hors de question qu’elle change pour qui que ce soit. A quoi bon chercher à se faire bien voir ? La Louve soupire.

« Bref, ces pierres là n’ont certainement rien d’intéressant pour vous. Vous chez quoi au juste ? »

- Des traces du passé...

Sa quête portait toujours sur la même chose. Et lorsqu’il trouverait quelque chose d’assez ancien, peut-être qu’il aurait l’illumination à son tour. Qu’il comprendrait instinctivement les écrits au point de faire progresser leur espèce. Comme l’avait fait Aguarès en lui greffant l’artefact qui lui permettait d’user des Manos de Dios en l’empêchant d’être pétrifié à mort. Comme Isielle qui avait offert le Ritual de Luna au monde, permettant ce que Cimériès considérait comme une franche évolution de leur espèce. Il n’avait pas relevé mais… oui, il voyait les Manadas comme des sauvages. Pareil pour les autres clans, en fait. Il avait appris à avoir un peu plus de respect pour certains de La Cámara, mais dans l’ensemble, les Hollow et Arrancar avaient tous la même tare : un besoin de vaincre, de dominer, de détruire.

Seuls les disciples d’Isielle avaient fait la paix avec cette part d’eux-mêmes et prospectait juste un avenir meilleur et paisible.

- Je pense qu’en notre lointain passé se trouvent les clés de notre avenir. Que des Hollow primordiaux possédaient une forme de savoir, une sagesse que nous avons perdue. Beaucoup ne pensent qu’à chasser, tuer. Des vôtres, en effet, mais ce n’est pas une affaire de clan. Plutôt une question de nature.

Il n’était plus le vagabond anonyme. Plus tout à fait. Il faisait partie de l’élite de l’Espada désormais, et il devait forcément composer avec le fait qu’on pouvait le reconnaître, et savoir qui il était ainsi que de quel clan il faisait partie. Rien à cacher, donc.

- Les miens ont établi domicile autour de l’un de ces vestiges d’antan. Vous devez avoir entendu parler du Ziggurat de la Lune. Alors, de source sûre je sais que de tels lieux existent. Ma quête est de les trouver, pour mieux comprendre d’où mon peuple vient.

Il n’était apparemment plus question de s’enfoncer dans cette ruine qui leur servait de demeure. Cette dernière avait perdu un peu de son intérêt d’ailleurs, comme il avait compris qu’il ne trouverait rien ici non plus. Son regard se porte un instant à l’horizon, se demandant déjà où le porteraient ses pas ensuite.

La Louve esquisse une moue dubitative. Elle croit davantage en ceux qui regardent vers l’avenir que ceux qui se focalisent sur le passé. Pour autant, elle sait que l’on peut apprendre de ses erreurs. Le chemin suivi n’est donc pas à négliger ni à complètement effacer. Cela dit, de là à chercher ce qui a disparu, il y a grand pas. Bien que ses idées ne se soient pas encore totalement arrêtées, elle penche sur le fait que ce soit une perte de temps. Et si d’aventure il trouvait quelque chose d’intéressant, alors tant mieux pour lui.

Plus il développe sa pensée, plus il explique et mieux elle comprend son intérêt. Mais il s’agit là d’une affaire personnelle, pour ne pas dire de race. Ce qui ne la concerne pas, ne risque pas d’attiser son propre intérêt. L’Alpha observe le chercheur de ruine. S’il est puissant, au moins elle sait qu’elle n’a rien à craindre de lui. Quant au fait que les clés de l’avenir soient dans le passé comme il dit, elle n’y croit pas tellement. Mais chacun ses hobbies.

« Je vois. »

Elle croise les bras sur sa poitrine et sent que déjà il semble ailleurs, prêt à passer son chemin. Ce n’est pas plus mal. Sa visite, même si non préméditée, aura été une bonne chose. Ils auront fait connaissance et à présent elle sait davantage à quoi s’attendre avec cet Arrancar dont tout ce qu’elle connaissait de lui c’était ses performances au dernier tournoi.

« Bien, j’imagine qu’on se croisera au prochain tournoi. Je vais participer pour une fois. »

Cela sonne à raison comme un au revoir. Il n’a pas l’air d’avoir envie de rester davantage et elle, elle a d’autres chats à fouetter. Il faut qu’elle se prépare un peu avant que l’on annonce enfin une refonte des membres de l’Espada.

« Tout ce que j’espère, c’est que l’actuel Primera perdra sa place. »

Peut-être n’aurait-elle pas dû dire cela et que ça pourrait l’inciter à rebondir sur ses propos plutôt que de simplement passer son chemin. Pas grave. Elle n’a rien à cacher de ses amitiés ou inimitiés. Et là pour le coup, ce n’est pas personnel. Elle estime qu’Artemio n’a pas été à la hauteur de son numéro. Mais ce n’est là qu’une opinion personnelle. Il pourrait être intéressant d’avoir celle du Tercera au demeurant.

La discussion ne semblant pas pousser vers une entente, déjà Cimériès avait porté son regard au loin, en quête de sa prochaine destination. Toutes les rencontres après tout ne sont pas vouées à porter leurs fruits, et souvent avec l’Érudit, cela se terminait comme si les deux interlocuteurs n’auraient jamais à se recroiser. Pas que l’hypothèse soit fermée, juste qu’il s’emmurait par assez dans ses secrets et sa conviction de valoir mieux que ces grossiers congénères. Ainsi sa coque était-elle dure à percer. Sans doute l’a-t-elle senti, elle qui barre désormais son buste de ses bras croisés, geste qui témoignait assurément d’une distance posée entre eux. Elle proclame qu’ils se verront au prochain tournoi, et lui n’a plus rien à ajouter. Qu’importe qui y participait ? Il n’y souhaitait que deux choses : préserver une place parmi les dix, ainsi que revoir une amie qui lui y avait donné rendez-vous…

Son plus grand défaut. Ainsi que la plus grande qualité dont il pouvait faire preuve quant à la quête qu’il s’était donné. Un jour, ce serait par cette curiosité qu’il périrait, à n’en pas douter, seule capable de lui faire abandonner toute raison si elle s’avivait par trop.

- Des choses à lui reprocher ? Une affaire personnelle peut-être ? Il n’est pas aisé d’atteindre cette position, et plus dur encore de la préserver. Je ne suis même pas convaincu que lui-même tente à tout prix de rester au sommet...

Il aurait fort à faire pour cela, et les rivaux ne manquaient pas. Même si tous les Espada se targuaient bien de se moquer de leur Numeros. Quoi de plus ironique que de voir tant d’Arrancar participer à ces tournois dans le seul but de faire savoir qu’ils ne voulaient pas vraiment une bonne position de toute manière. Cimériès avait compris, lui, les portes que cela pouvait ouvrir. Lilith elle-même n’avait-elle pas abordé cette rencontre différemment dès le moment où elle l’avait reconnu comme la Troisième épée ?

- Mais puisque tu participes, il ne tient dès lors qu’à toi de lui arracher ce titre, n’est-ce pas ?

Pas de provocation, ni d’encouragement. Il annonce cela comme un constat simple, sans trop y croire...

Etait-elle la seule à penser qu’Artemio ne méritait pas son titre ? Ah mais qu’elle est bête, c’est vrai qu’il n’était pas là lui, il n’a pas vu ce à quoi elle a assisté. Des Arrancar qui se font mettre la misère, d’autres qui prennent la fuite, qui se font capturer ou meurent. C’était franchement pas jojo. Et elle ne regrette absolument pas de n’y avoir pas participé. Cela n’aurait pas fait pencher la balance, ou pas assez du moins. Malgré les pertes, ça se voyait qu’en face ils étaient préparés. La stratégie n’avait pas été la bonne. Attaquer sur deux fronts comme le suggéra Borick aurait été mieux. Une prochaine fois peut-être, mais il faut se coordonner, s’organiser. Cela ne peut pas se faire avec juste une poignée de volontaires.

Lilith secoue la tête négativement. Puis elle détaille sa pensée. Elle est un peu étonnée qu’il pose ces questions. Est ce que les réponses l’intéressent vraiment ? Enfin bon, elle est un minimum polie, si ça ne la fait pas chier, elle n’envoie pas balader les autres et puis ce n’est pas comme si elle avait autre chose de prévu là tout de suite.

« Rien de personnel. Mais les constats que je fais ne jouent pas en sa faveur. Aussi j’estime que faute de mieux, il n’est pas un bon Primera. Un Primera ne devrait pas échouer. »

Elle secoue la tête d’un air dépité en repensant à la bataille à la Grande Cataracte.

« T’as entendu parler de la bataille qui a eu lieu contre les humains ? Un échec pitoyable si tu veux mon avis. Artemio a pris cher. Tss. Ils ont sous-estimé l’ennemi. Voilà ce que je lui reproche. Et puis la façon dont il a été nommé Primera, j’suis pas certaine que ça aurait été lui s’il n’y avait pas eu tous ces abandons. »

La Louve fait quelques pas dans le sable blanc et regarde au loin l’horizon. Pensive quant à sa dernière remarque. Lilith donne l’air d’avoir baissé sa garde. Elle, Primera ? Ce n’est pas pour ce grade qu’elle participe. Après tout, elle ne sera que l’outsider de la saison, que pourra-t-elle bien faire, face à tous ces combattants expérimentés ?

« Je ferai ce qu’il faut pour qu’il ne l’ait pas en tout cas. »

- Je peux comprendre. Même si les torts brassés peuvent dès lors éliminer chaque participant un par un jusqu’à ce qu’aucun ne soit digne du titre à tes yeux.

S’il suffisait d’échouer pour n’être pas Primera, alors qui le pouvait ? Cela manquait de substance de toute manière, dès lors que pas moins de quatre Hollow s’érigeaient encore au-dessus de cette hiérarchie. Pas un Roi, mais un conseil entier. Et eux, échouaient-ils ? Grimmjow reconnu pour sa force brutale sans commune mesure en ce monde ? Il n’était pas parvenu à devenir roi incontesté, et son parcours était semé d’échecs nombreux jusqu’à ce qu’il développe sa force actuelle. L’Ayperos ? Il avait misé sa vie sur un envahisseur Shinigami, qui avait été anéanti. Quant à Yrronos et Isielle, ils n’avaient pas d’autre ambition que de mener leur petit troupeau, de protéger leur maigre communauté. Des meneurs sans destination menaient-ils réellement ?

Il n’en dit rien pourtant, estimant que cela ne serait qu’un verbiage creux. Il avait été l’un des quatre finalistes du dernier tournoi. Adamas n’aurait pas été en état de quoi que ce soit, et aurait sans doute « échoué » rapidement. Lui-même avait abandonné également, ce n’était pas non plus une démonstration de talent. Celui qui déclare forfait n’est-il pas moins apte encore que celui qui a essayé de remporter la victoire sans parvenir à l’obtenir ? Il n’aurait resté donc que Matryona, à l’esprit fracturé. Une créature que la raison semblait avoir quitté, et qu’il n’avait jamais d’ailleurs jamais revu ni entendu parler depuis sa défaite face à Artemio.

- Quoi qu’il en soit, il est impossible de ré-écrire le passé. L’on peut par contre apprendre de lui, pour poser les bases d’un meilleur futur. Forte de cet apprentissage, j’ai donc hâte de te voir lui ravir son titre. Et puisses-tu ne jamais échouer à ton tour.

Le ton de Cimériès, naturellement distant comme s’il n’avait pas d’attache en ce monde, du moins avec les vivants, ne comportant d’aucune animosité. Ni de réels encouragements. Platement, il l’incitait donc à accomplir sa vision, défendre par les actes ses convictions. Un pas, puis un autre. Lentement, le vagabond reprend sa marche.