UN vs Acuerdo groupe #2 : installations scientifiques

Sa honte. Le souvenir vient un instant se glisser dans sa conscience. Celui de cette créature au masque brisé qu’il n’avait pu abattre et qui avait fui cette nuit. Elle ne l’avait pas attaqué comme l’aurait probablement fait cette arrancar à sa place. Non. Malgré son impuissance et sa faiblesse équivoque… elle s’était juste enfuie, blessée. Il ne l’avait jamais revu. Il ne l’avait jamais cherché non plus. Mais cette nuit avait brisé quelque chose en lui. Pourtant, il avait continué. Encore et encore.

Encore et encore…jusqu’à sa fin.

Mais à cet instant, cela n’avait plus d’importance. Ici et maintenant, tout cela n’existait plus vraiment. Elle n’était pas elle et il n’était plus vraiment lui non plus. Alors la conclusion de leur affrontement serait également différente cette fois-ci. Elle se bat. Encore et encore. Acharnée. Elle se défend, presque instinctivement, mais ne parvient finalement pas à s’esquiver à son dernier assaut. Elle s’écroule, mais lutte, vient saisir ses vêtements pour ralentir sa chute. Elle ne veut pas perdre. Pas échouer. Sa main la saisit, ralentissant sa chute avant qu’elle n’atteigne le sol. L’accompagnant pour qu’elle ne se blesse pas davantage. Sans doute. Elle n’en a pas fini…

Elle n’est pas elle.

Il l’a bien compris. Après tout, aujourd’hui, il sait ce qu’elle est, ce que sont les arrancars et ce qu’il appelait autrefois les esprits corrompus. Un amas d’âmes qui se font finalement individualité. Elle, elle possède juste une part de son âme. Silencieux, il l’allonge sur le sol alors que son apparence reprend sa forme usuelle : une femme petite, presque frêle, simplement vêtue d’une cape élimée. La ressemblance est frappante malgré ses particularités, et maintenant qu’il a compris, elles sont celles qui se révèlent le plus à lui. Il dépose son haori fait de reishi recouvrant ses épaules sur le corps blessé de son adversaire inconsciente. Peut-être par pudeur ou bien par pragmatisme.

Je te ramène à la maison Kaede. Un écho. Ancien.

Ses prunelles s’éteignent en réponse. Le souvenir est presque douloureux. Mélancolique. Une phrase qu’il avait répété, encore et encore. Sans doute aurait il accepté de la répéter encore une fois. Juste une fois.

Mais tu n’es pas Kaede et il n’y a plus de maison à laquelle te ramener.

Le forgeron se redresse, examine d’un coup d'œil les lieux. Sur son visage, le masque de neutralité a repris sa place abandonnant ces émotions qui, pourtant, tiraillent toujours son être. Silencieuses. Étouffées. Des corps et des gravats, les ennemis pour l’heure ne semblent plus là. Finalement, son regard se tourne sur la cups qui est demeurée à ses côtés pendant ce combat. Elle semble être en meilleur état qu’il ne l’est lui-même, et il se permet de prendre quelques minutes pour vérifier ses plaies. L’adrénaline du combat en atténue la morsure mais les brûlures infligées ne manqueront pas de le marquer pour les semaines à venir. Mais l’heure n’est pas encore à cela. « Qu'est-il arrivé à votre adversaire ? » Entre ses doigts, son arme demeure, malgré le sang et les blessures affligeant son corps et ses mains.

Le combat n’est jamais réellement terminé. La raison pour laquelle il ne voulait en arriver là. « Comment vont vos blessures ? »

J’assistais à une scène dont l’aspect tragique aurait pu me laisser perplexe. Il fallait dire qu’en me présentant ici, je ne me serais pas vraiment attendue à un tel dénouement. Pour autant, j’accordais à mon partenaire l’espace dont il avait besoin pour maîtriser cette arrancar. De toute manière, nous avions atteints les objectifs fixés par nos supérieurs. Inutile donc de parasiter mes pensées de détails emmerdants. Le rapport que je rendrais aux pontes ? J’allais sans doute remanier quelques points. Après tout, je pouvais m’accorder ce luxe. Surtout, il était des choses que ces vieux croulants n’avaient pas besoin de savoir.

Lorsque Katsuo se tourna enfin vers moi après avoir posé ce qui ressemblait à un linceul sur son ennemie intime, je pus remarquer son expression grave. D’évidence, ce combat le marquerait lourdement pour les semaines à venir. S’il s’inquiétait pour moi, je ne montrais guère vraiment de signes de faiblesse. Au final, ce qui m’avait le plus fatiguée, c’était cette connerie de limitateur qui décidait enfin de se désactiver.

– L’autre cruche ? J’ai menacé d’en faire de la pâtée pour chat. Son visage s’est décomposé et après quelques bégaiements ridicules, elle a simplement détalé de là en baragouinant qu’elle appellerait ses grands frères de la cité.

Si je dénaturais la vérité ? Sans doute un poil. De mon point de vue, les absents avaient toujours tort. Et pour être demeurée présente jusqu’au bout, j’avais toutes les cartes en main pour imposer mon regard. Quant à mon état, je gardais mon air insolent.

– Ne t’inquiète pas pour ça ! L’ennemi était trop occupé à se tirer des bâtons dans les roues pour vraiment représenter une menace. Juste, quelques égratignures. Rien de méchant.

Le regardant de bas en haut, je me dis qu’il devrait commencer par s’inquiéter pour lui-même. Seulement, je devinais qu’il n’avait pas la tête à ça. M’avançant de quelques pas en sa direction, je posais les yeux sur cette arrancar qui respirait encore, selon toute vraisemblance.

– Qu’est-ce que t’as l’intention de faire à propos de cette fille ? Je ne suis pas devin, mais… m’est avis qu’ils l’exécuteront sans sommation si elle devait se repointer à l’Acuerdo. Du peu que j’ai vu, il ne faut pas s’attendre à beaucoup d’intelligence de leur part.

Peut-être que dans d’autres circonstances, le forgeron aurait eu une mimique circonspecte face à la réponse de sa partenaire à sa question. Son expression pourtant demeure au contraire distante, lointaine. La seule chose qui compte actuellement, c’est que son adversaire ne soit plus présente sur ce champ de ruine. Néanmoins, ils n’ont pas de temps à perdre pour autant. Qui sait combien de temps leurs forces mettraient à revenir ici pour les achever ? Dans l’état dans lequel ils sont, ils seraient aisés pour eux de les balayer. Une simple formalité.

Mais… Pourquoi s’en préoccupe-il autant ?

La pensée meurt à peine esquissée. Il n’a pas de temps à perdre avec ces questions sans sens et les habitudes reprennent leur droit. La priorité est ici et maintenant. Ce qu’il peut faire. Ce qu’il doit faire. Un acquiescement répond à la jeune femme lorsqu’elle lui fait part de son état. Une bonne chose. Sur son visage, nul ravissement, juste un constat froid. Et puis elle s’approche, observe l’arrancar à ses pieds. Malgré lui, son regard fait de même, détaillant une fois de plus l’apparence de cette dernière.

Si ils la laissent ici dans son état, nul doute qu’elle serait rapidement tuée. Les êtres du Hueco Mundo ne sont pas des créatures indulgentes, tout du moins, peu d’entre elles passeraient à côté de cette occasion. Peut-être même que ses blessures la tueraient. Quant à l’Acuerdo… il ne peut négliger non plus cette menace, après tout, l’arrancar de feu avait semblé particulièrement vindicative à son encontre. Si elle la croisait, il ne doute pas qu’elle mettrait ses menaces à exécution.

Que compte t-il faire d’elle ? Que doit-il faire ?

Elle n’est pas Kaede. Pourtant, la laisser ici dans cet état lui paraît inconcevable. Même si elle n’est pas elle… Ses doigts sur son arme se crispent. Il aurait l’impression de l’abandonner encore une fois.

Imbécile.

Et si il l’emmenait sur Terre… Sans doute était ce sa plus grande chance de survie, néanmoins, il n’est pas sans ignorer que cela ne sera pas sans risque, pour elle comme pour lui. Devra t-il parler de ce lien distordu qui les unis ? Ou le taire pour les protéger ? Est ce qu’ils le laisseront se charger d’elle si ils en ont connaissance ? Et elle… Elle sera prisonnière. Une prisonnière enchaînée face à des humains en proie à leur curiosité. Ses paupières s’éteignent alors qu’il finit par rengainer son arme, préférant pour l’heure garder son pouvoir actif. Ne serait-ce que pour maintenir le haori de reishi. « Si nous la ramenons à l’organisation, ils l’emprisonneront et l’utiliseront. » Sa voix a perdu un rien de cette neutralité usuelle. Peut-être est-il plus doux, mais le constat demeure sans appel.

Il n’aime pas cette idée.

Non. Il n’aime pas cette possibilité. Il craint d’être pieds et poings liés. Mais quel autre choix a t-il à présent ?

Peut-être en a-t-il un autre, non moins dangereux pour eux. Peut être. Mais quelle importance au final ?

Il l’observe, s'abîme dans ses réflexions avant de se tourner sur Miyu. Il a pris sa décision. « Rassemblez les survivants et retournez à l’organisation. Je vais rester ici et surveiller leurs agissements. » Nul doute qu’ils reviendront en force pour les détruire, de cela, il en avait bien conscience. Mais si ils voulaient défendre cet endroit à tout prix, alors il fallait qu’ils soient prêt à cela et qu’ils en soient informés. Et si cela peut le servir, il n’a pas de raison de ne pas en profiter. « Je vérifierai l’état de nos installations et de nos hommes. »

Il ne veut pas risquer plus de vie. Ici, la plupart de leurs hommes n’ont que peu de pouvoir. Peu de chance de survie. Seul, il en avait bien davantage. Enfin, au final l’organisation prendra sa décision de maintenir ou non davantage d’homme ici, pour l’heure, ceux présent actuellement ne leur serait d’aucune utilité si ce n’est d’être des cibles blessées à protéger.

Quelques échanges s’ensuivent puis la cups obéit finalement. À lui à présent de trouver un endroit où installer l’arrancar et surveiller les alentours. Un lieu suffisamment abrité et en hauteur pour lui permettre de détecter l'énergie spirituelle d'ennemi potentiel. Et de panser ses propres blessures.