Jugements de valeurs

Le dojo de la Neuvième Division était étrangement calme en ce jour. Une seule personne l’occupait. Assise en tailleurs, la jeune Capitaine avait les yeux fermés, nul entraînement quelconque l’entourant.
Cette tranquillité, elle l’avait exigée, faisant passer le mot à l’ensemble de sa division que nul ne devait venir les déranger. Car, méditant, elle attendait une personne bien précise. Il était toujours particulier d’être convoqué par une Capitaine. Et cela impliquait généralement une affaire d’une certaine importance.

Surtout venant d’elle. Nozomi n’avait pas forcément la réputation d’être la plus avenante des Shinigami. Ou du moins ne l’avait clairement plus. Elle n’ignorait pas que nombre de ses hommes n’étaient pas forcément à l’aise en sa présence. Elle s’y était habituée et n’y prêtait plus véritablement attention. Ce pour quoi elle évitait si possible de trop se mêler à eux. Cela n’apportait rien de bon de briser les barrières naturelles existantes.
Pourtant, elle n’avait pas vraiment le choix. La demande venait d’en haut. Comme peu de personnes étaient à même de donner des ordres à un Capitaine de Division, cela entraînait d’office une certaine importance.
Enfin… En vérité il ne s’agissait pas d’ordre, mais plutôt d’une recommandation. Qu’elle était invitée à écouter.

Du fond de son âme, nous l’observions. Cette distance qu’elle avait mise entre elle et ses hommes afin de respecter notre accord l’avait empêchée de véritablement voir quelqu’un digne de l’assister, digne d’être son Vice-Capitaine. La situation pouvait perdurer bien, mais le Conseil Militaire lui avait conseillé de remédier à cette absence. Mieux encore, il lui avait proposé un nom.
Voilà pourquoi elle se trouvait ici en jour. Comme tout Capitaine, elle pouvait refuser. Après tout, son bras droit devait avoir son approbation. Mais, partageant son être, nous étions conscientes de la vérité. Elle voyait cela comme une opportunité. Celle de ne pas avoir à choisir elle-même. Elle jouait des apparences, mais était ravie qu’on lui fournisse un nom sur un plateau d’argent.

La raison de la convocation était claire dans l’esprit de la noble.
En apprendre plus sur celle briguant le poste de seconde de la Division. Jauger sa volonté, ses capacités. Un véritable entretien, donc. Surtout qu’elle n’ignorait pas tout de cette Shiro Mayuri non plus. Et son origine elle-même pourrait être de nature à justifier un refus immédiat de la part de la Tomoe.
Mais elle allait lui donner une chance. Simplement, si ce test était évident pour la Capitaine, elle n’avait absolument pas partagé les détails à la concernée. A ses yeux il pourrait simplement s’agir d’une simple constatation de son nouveau poste.

L'odeur du changement planait enfin autour d'elle et Mayuri ne cessait de l'humer avec envie et impatience. Bientôt 6 années qu'elle avait rejoint l'académie des Shinigamis. Bientôt 6 années qu'elle étudiait, s'entrainait et se formait pour rejoindre l'élite du Seireitei. Pour certains, cela ne représentait pas grand chose mais pour elle, il s'agissait d'environ un tiers de son existence! Si à cela, on commençait à ajouter le temps qu'elle avait probablement passé à étudier dans le monde des vivants, cela en devenait presque indécent. Il était vraiment temps de passer à autre chose. Et une solution lui avait été offerte sur un plateau. Ne restait à espérer qu'il ne s'agissait pas d'un cadeau empoisonné. Après tout, elle ne connaissait que très peu les jeux politiques qui pouvaient exister au sein de ce monde.

Vice Capitaine de la Neuvième Division, c'est ce que l'homme lui avait proposé. Il ne lui avait donné que peu de détails si ce n'est que le poste était libre, que la Capitaine de la Division avait bien besoin de quelqu'un pour l'assister et qu'il avait vu son potentiel et ne souhaitait pas le gâcher dans un autre poste. La Neuvième, la Division en charge de la Justice au Seireitei. Elle y avait fait ses classes durant ces deux dernières années et y avait appris pas mal de choses. Des bonnes comme l'enquête, la recherche d'informations, le perfectionnement des Kidō utiles à la capture de fuyards, autant que les mauvaises comme les nombreuses paperasses administratives, les plaintes sans intérêt ou les règlements souvent un peu dépassés. Enfin, chaque Division devait avoir ses bons et ses mauvais côtés.

Aujourd'hui, c'est l'occasion de découvrir de nouvelles choses! Fais bonne impression Mayuri et essaie de pas en dire trop pour une fois. Surtout si... Quelle galère!

Finissant de nouer les deux rubans noirs dans ses cheveux, elle avait pris la route pour ce rendez-vous qui l'attendait. Convocation par la Capitaine Tomoe Nozomi. Durant ces dernières années, jamais une telle convocation ne s'était produite. Elle n'avait d'ailleurs jamais croisé son chemin et elle n'avait pas non plus cherché à y parvenir. Aperçue parfois de loin mais les anciens lui avaient conseillée de l'éviter autant que possible. Non pas qu'elle était une mauvaise personne, il paraissait même qu'elle était une femme très avenante par le passé. Mais plusieurs évènements l'avaient changée et elle était devenue "distante", pour embellir certains termes qu'elle avait entendues.

Enfin, quelques minutes de marche et ses pas l'avaient amenée devant les portes du Dojo. L'endroit où sa future Capitaine lui avait donné rendez-vous. Probablement voulait-elle la rencontrer et échanger avec elle avant qu'elle ne prenne ses fonctions. Après tout, si l'inverse n'était pas vrai, il était fort improbable que la Capitaine ait entendu parler d'elle. Aussi, voudrait-elle probablement l'accueillir, la rencontrer et lui présenter ses futures attributions en tant que Vice Capitaine, rien d'anormal. Juste une étape vers cette nouvelle aventure. Une étape un peu ennuyeuse mais qu'elle ne pouvait esquiver.

Prenant une inspiration, réajustant sa tenue, tentant d'afficher une mine plus enjouée que d'habitude, elle pénétra le Dojo où se trouvait la Capitaine. Un instant surprise de la voir assise, silencieuse au milieu du Dojo, elle reprit vite contenance pour aller se placer non loin d'elle, s'inclinant respectueusement en prenant la parole

Capitaine Tomoe, pardonnez mon interruption mais je réponds à votre convocation, en temps et en heure. Je me présente, Shiro Mayuri, terminant ma formation à l'Académie, aspirante au poste de Vice Capitaine de la Neuvième Division. J'ai beaucoup entendu parler de vous et suis ravie de pouvoir enfin vous rencontrer.

Pour le moment, elle préférait ne pas en dire davantage. Mais d'ailleurs, ne venait-elle pas d'en dire déjà un peu trop? Ce serait bien son style.

Le bruit de la porte qui s’ouvrait. De quelqu’un pénétrant dans la pièce. Puis une voix, jeune, féminine, brisant le silence. Celle qu’elle attendait était donc arrivée. La Capitaine n’ouvrit pas immédiatement les yeux, écoutant les politesses prononcées par l’aspirante Vice-Capitaine. Rien de particulier, mais la preuve que cette dernière possédait bien un minimum d’éducation. Bon point, soit dit en passant. Un rustre digne de la Onzième Division lui aurait été recommandé, l’entretien aurait été rapidement écourté.
Laissant planer brièvement le silence, Nozomi ouvrit les yeux, fixant la personne lui faisant face. Même si elles ne s’étaient jamais entretenues ensemble, la raison ne s’étant à aucun moment présentée, la responsable de la division avait pu apercevoir cette jeune femme. Et jeune était justement le mot d’importance. Elle l’avait elle-même précisé. Elle terminait sa formation à l’Académie.

La noble n’était pas du genre à entretenir une notion de grande famille au sein de la division, si bien qu’elle n’était pas de ces Capitaines connaissant tout de l’ensemble des Shinigami sous ses ordres. Nombreux étaient ceux n’étant rien de plus que de parfaits inconnus à ses yeux. Lorsque le nom de Shiro Mayuri lui avait été évoqué, cela ne lui parla absolument pas, si bien qu’elle s’était renseignée.
Prodige. En un sens, c’était le mot qui pouvait le mieux la définir. Car, pour être recommandée à un tel poste à peine la formation académique terminée, il fallait bien se démarquer. Ce que beaucoup trouveraient encourageant, la récente Capitaine le prenait avec méfiance. Tout génie qu’elle soit, il y avait bien une chose qu’elle ne pouvait apprendre sur les bancs de l’école.
L’expérience. La connaissance du combat, du terrain. Les changements récents ayant placé les étudiants en fin de parcours au sein des divisions, cela était allé en s’améliorant. Mais quelles compétences réelles pouvait bien posséder une gamine sortant à peine de sa formation ? Quelle crédibilité aurait-elle à mener des hommes ? Car c’était de cela qu’il s’agissait. Le rang de Vice-Capitaine n’était nullement purement honorifique.

>> Il n’y a aucune interruption si je t’attendais, je te rassure. Je pense que tu te doutes un peu de la raison de cette convocation.

Elle se leva alors, remettant lentement en place son haori, symbole de son rang. Elle s’était habituée à porter ce dernier, même si elle avait rajouté quelques éléments rappelant l’autre statut qu’elle occupait, et surtout d’où elle venait.
Elle plongea alors ses yeux violacés dans ceux de sa jeune interlocutrice, ne les lâchant pas un seul instant.

>> Aspirer à un tel rang n’est pas rien, surtout à cet âge. Cela pourrait même passer pour de la simple prétention que de déjà se considérer au-dessus de ses pairs à peine sa formation terminée. Je suis curieuse de savoir… Qu’est-ce qui peut bien motiver une telle volonté ?

Les rapports avaient beau exister, que ce soient ceux des professeurs ou des officiers l’ayant eu à leur charge durant ces deux dernières années, rien ne valait les propres mots de la concernée. Il serait aisé de dire qu’il n’y avait pas vraiment de mauvaise réponse lorsqu’on s’interrogeait simplement sur des motivations.
Rien n’était aussi faux. Car, déjà, elle commençait à jauger si cette Mayuri avait véritablement les épaules de ses aspirations.

Silencieuse, la Capitaine n'avait point réagi à sa présentation et à son annonce. Aucune réaction, aucun mouvement. S'il avait s'agit d'une autre personne, Mayuri aurait pu se demander si elle n'était pas tout simplement endormie. Après tout, combien de fois ne lui était-il pas arrivé de s'endormir pendant un exercice similaire au sein de l'Académie ou un cours bien trop répétitif ou simpliste. Mais là, il s'agit d'une Capitaine donc il était plutôt vraisemblable qu'elle se trouvait en pleine méditation. Et donc soit elle ne l'avait pas entendue car trop concentrée, soit elle avait tout simplement décidé de l'ignorer. Une situation assez ennuyeuse.

La réponse à cette question arriva néanmoins bien rapidement puisque la Capitaine ouvrit finalement les yeux pour l'observer. Et ce fut au tour de Mayuri de demeurer silencieuse, attendant avec impatience les premiers mots de celle qui l'avait convoquée. Ne restait qu'à espérer qu'elle ne s'était pas montrée impolie en interrompant sa méditation. Sans quoi, cette première rencontre débuterait sur un très mauvais augure. Et, si les rumeurs étaient vraies, il y avait fort à parier qu'une rencontre commençant mal ne durait pas bien longtemps avec la Capitaine de la Neuvième Division.

Bien heureusement, la réaction de la Capitaine fut toute autre puisque celle-ci la rassura quant à son commentaire. Une réponse devant laquelle la jeune Shinigami ne put dissimuler une certaine marque de soulagement. Peut-être les rumeurs étaient-elles exagérées? Peut-être la Capitaine Tomoe était-elle une femme très avenante et agréable en fin de compte. A sa remarque quant à la raison de la Convocation, Mayuri se contenta de répondre

J'imagine que vous souhaitiez me rencontrer suite à la nomination qui m'a été proposée. Ou peut-être m'expliquer le rôle de Vice Capitaine si la nomination émanait de votre personne?

Un détail qui avait échappé à Mayuri. Elle ne se souvenait pas si l'homme lui avait dit que la Capitaine avait participé ou non à sa nomination. A y réfléchir, peut-être avait-il laissé entendre qu'il s'agissait de sa propre initiative, mais le doute demeurait. Alors qu'elle tentait de se remémorer cette information, la Capitaine s'était relevée et la fixait droit dans les yeux, lui expliquant plus en détails les raisons de cette convocation. Ecoutant ses interrogations, la jeune Shinagami ne put s'empêcher de se perdre un instant dans les pupilles violacées de la Capitaine et, fidèle à son incapacité à filtrer ses pensées, elle ne put éviter qu'un murmure ne s'échappe

En tout cas, la rumeur quant à la beauté de la Capitaine de la Neuvième Division était donc bien fondée...

Maudite langue qui lui jouait sans cesse des tours! Quelle galère! Il fallait rapidement qu'elle se rattrape si elle ne souhaitait pas que cet entretien finisse de façon prématurée. Sans plus attendre, elle reprit rapidement

Pardonnez-moi, je ne voulais pas me montrer irrespectueuse. Pas plus que je ne me pense prétentieuse. La proposition de venir vous assister n'est pas venue de mon propre chef, je dois avouer. Et pour être totalement honnête, il ne me serait personnellement jamais venu l'idée de demander une telle position à ma sortie de l'Académie. Mais j'avoue que l'idée m'a séduite. Ces six années d'apprentissage m'ont certes enseignée de nombreuses connaissances mais il est temps pour moi de passer à une autre étape, de découvrir des choses plus concrètes. De nouvelles expériences stimulantes. Et je serais heureuse de pouvoir mettre mes compétences à votre service, pour vous assister. Je ne sais pas si je suis supérieure aux autres, je ne me pose pas la question. Mais je sais que je me débrouille plutôt bien dans certains domaines, et j'ai envie de les mettre en pratique. Et non pas de me noyer dans une routine pesante. Et je suis persuadée qu'auprès de vous, je peux apprendre beaucoup.

Si seulement elle avait conscience. Conscience d’être aussi loin de la vérité. Conscience que c’était déjà un miracle que notre hôte ne l’ait pas directement refusée à ce poste. Son origine même était une insulte envers la grandeur du Seireitei. Accepter les cloportes du Rukongai au sein de nos rangs était l’une des pires erreurs des Shinigami. Leur seul but devait être de maintenir le cycle des âmes, ni plus, ni moins. Et seuls les êtres les plus purs se devaient d’assurer cette noble tâche.
Notre méditation était brisée, réaction à ses simples paroles. Tentant de faire entre notre voix à notre alliée, nous lui intimions un seul et unique conseil. Faire comprendre à cette idiote là où était sa place.

Au fond de son âme, elle le sentait. La colère de Narukami. Sa voix qui lui parvenait. Elle réussissait à n’en rien montrer, mais la seule mention que Nozomi puisse éventuellement être à l’origine de cette possible nomination, même en sachant que ce n’était pas le cas, suffisait à faire perdre patience au Zanpakutō.
Peut-être était-ce, car elle était en proie à une lutte intérieure pour ne pas se laisser submerger par son autre moitié, mais les défenses de la Capitaine tombèrent pendant un instant aux mots de Mayuri. Pendant un bref moment, une surprise ingénue put se lire sur son visage.

Depuis son plus jeune âge on lui avait appris à entretenir l’image de la Noblesse, ne pas laisser paraître de failles. Puis, depuis peu, s’était ajoutée l’image de Capitaine, et ce couplé avec son accord auprès de Narukami. En raison de cela, rares étaient ceux pouvant se targuer d’avoir pu voir une expression aussi naturelle sur son visage.
Expression qui ne dura heureusement pas longtemps, la réponse de son interlocutrice lui permettant de reprendre le dessus. Et, attentive, elle écouta, ignorant les pulsions au sein de son être, contenant ces dernières.
Après tout, elle était Nozomi, pas Narukami. Elle avait certes des comptes à rendre, mais elle avait encore le dernier mot.

>> Il n’y a pas d’irrespect à saisir une occasion proposée. Une telle proposition sans volonté initiale de ta part est un miracle. Nombreux sont ceux qui feraient tout pour avoir une telle chance, et qui jamais ne l’effleureront. Voyant une gamine leur passer devant, quand bien même elle vaudrait cent fois leur personne, nul doute qu’ils réagiront avec rancœur pour certains, refuseront de te reconnaître pour d’autres. Il faut certaines épaules pour encaisser cela.

Les prodiges n’étaient que rarement appréciés, les incapables devenant envieux, bien loin de comprendre la différence qui existait entre eux. Mais, tout ce que savait la Shinigami aux yeux violets de la prétendante face à elle était consigné dans des rapports. Fraîchement diplômée de l’Académie, de véritables dispositions au Kidō. Peut-être un manque d’intérêt par moment, malgré une certaine curiosité. Cette dernière transparaissant d’ailleurs dans le discours prononcé.
Mais cela n’était pas suffisant. Esquissant un léger sourire, Nozomi tourna le dos, avançant de quelques pas afin de mettre de la distance entre elles, avant de se positionner de nouveau face à la brunette.

>> Bien, montre-moi quels sont ces compétences, ces domaines dans lesquels tu te débrouilles. Montre-moi que tu sauras t’imposer face à tes détracteurs. Montre-moi en quoi une enfant du Rukongai mérite de se hisser parmi les sommets du Gotei à peine après voir posé le pied en dehors de l’Académie.

Ces dernières paroles avaient beau être dans la continuité de son discours, le sens allait cependant au-delà. Nozomi elle-même doutait que cela soit le cas. Narukami, de son côté, pestait à cette seule idée. Pourtant, quelqu’un avait cru en elle. Quelqu’un lui avait offert une opportunité.
Autant lui laisser une chance ?

Ses mots avaient visiblement touché quelque chose au vu de la réaction succincte mais perceptible de la Capitaine. Mieux encore, la réaction se rapprochait bien davantage de celle qu'elle avait espérée plutôt que celle qu'elle avait envisagée. Parce qu'au vu des rumeurs qui circulaient sur la Capitaine Tomoe, elle aurait malheureusement pu s'attendre à des remontrances, des brimades, ou tout simplement une marque de mépris. Mais non, elle avait sans nul doute été surprise, voire décontenancée par ses propos. Aucun intérêt, certains auraient probablement considéré. Mais pour elle, cela ne pouvait signifier qu'une seule chose: son interlocutrice n'était pas aussi glaciale que ce que l'on pouvait entendre. Sous la carapace, il y avait probablement encore des traces de celle que certains lui avaient décrite. Il était donc possible qu'elle puisse s'entendre avec elle. La situation lui paraissait d'un coup moins ennuyeuse.

Quant aux propos suivants, ils ne venaient que confirmer cette sensation. Représentante de la Division de la Justice, la Capitaine lui paraissait être plutôt juste dans son analyse de la situation. Elle ne lui reprochait nullement d'avoir accepté la proposition qui lui avait été faite mais lui prodiguait plutôt quelques avertissements, ou plutôt ce qu'elle considérait comme des conseils. Enfin, c'est de cette manière qu'elle les percevait. Elle haussa finalement les épaules, peu inquiète de ce qui lui était expliqué.

Je vous remercie pour ces conseils et avertissements. J'imagine que comme partout, au Seireitei ou ailleurs, il y a des envieux et des jaloux. Mais je ne m'inquiète pas vraiment. S'ils sont plus compétents que moi, cela signifiera qu'ils méritent cette place et ont raison de se mettre en colère. Dans le cas contraire, j'espère qu'ils comprendront rapidement que mon origine ou mon âge n'a que peu d'importance dans notre mission. Si non, je me ferai un plaisir de leur expliquer si vous m'y autorisez. Je n'aime pas les ennuis mais je ne suis pas du genre à les fuir s'ils se présentent. Ni à me laisser faire.

Mayuri s'était exprimée sur un ton neutre, sans aucune véhémence. Elle espérait simplement que la Capitaine se trompait. Car, d'après tout ce qu'elle avait pu lire, il y avait déjà suffisamment d'ennuis à gérer en dehors du Seireitei pour éviter de se trouver des ennemis à l'intérieur. Quelle galère si elle devait en plus se battre avec ses alliés pour conserver un poste qu'elle n'avait initialement pas réclamé. Enfin, pas la peine d'imaginer des ennuis inexistants. Mieux valait se concentrer sur les faits. Et à cet instant, sa Capitaine lui demandait de prouver qu'elle avait effectivement les compétences dont elle parlait. Mais comment? Elle regarda un instant autour d'elles avant de refixer son regard sur la Capitaine qui s'était éloignée de quelques mètres. Comment pouvait-elle montrer ses compétences en ce lieu. Elle ne pouvait tout de même pas...

Je n'ai pas de problème à vous montrer quelques unes des compétences dont je suis plutôt fière et comment je peux expliquer à mes adversaires que je ne suis plus une enfant, mais... souhaitez vous réellement que je les utilise sur vous? Je veux dire, vous êtes Capitaine et une personne de Haute Noblesse. Ai-je le droit de tout utiliser sans risque? D'ailleurs, si vous me permettez une dernière question supplémentaire. Le fait que je vienne du Rukongai est-il un problème? Je n'aurai jamais votre prestance, il est certain, et je ne m'en cache pas. Mais est-ce nécessaire pour vous assister?

La question aurait pu apparaitre comme une sorte de défiance pour certains, mais aucun ton de la sorte ne venait animer les paroles de la jeune femme. Cela pouvait sembler surprenant, voire même simpliste, mais sa question reflétait davantage une sorte de curiosité naïve. Le Seireitei l'avait accueillie dès son arrivée et ce poste lui avait été "offert" à la sortie de l'Académie. Comment envisager que, pour certains, le statut social conservait une importance toute particulière.

Timidité ? Manque de confiance ? Quelque chose faisait que Mayuri ne répondit pas immédiatement à l’invitation de montrer ses compétences. Si, jusque là et encore par ses paroles précédentes, elle semblait montrer d’une certaine détermination, d’un coup le ton était différent. Au final, n’était-ce qu’une de celle à avoir du mal à accompagner la parole par les actes ?
Pour la première fois, elle n’était pas vraiment à la hauteur des attentes. Même si la situation n’était pas gagnée d’avance, les réponses apportées avaient été des plus satisfaisantes. Une certaine humilité en apparence, mais une véritable volonté de faire ses preuves. Et l’absence de doute.
Alors pourquoi d’un coup ?

Bref soupir, légère déception sur son visage, elle ferma les yeux quelques instants. Si les interrogations posées et qui l’empêchaient d’agir n’étaient pas dénuées d’intérêts, elles semblaient bien peu appropriées à la situation. Et, surtout, elles pouvaient être perçues de bien de façons différentes. La peur de faire une démonstration face à un Capitaine qui en intimait la demande était une chose. Idiote, sans aucun doute. La façon de l’exprimer par contre…
Et la question sur son origine… Bien sûr, elle ne pouvait le prévoir, elle ne connaissait pas vraiment sa Capitaine, mais il s’agissait d’une question qu’elle aurait certainement préféré ne pas soulever, et surtout dont la réponse n’avait que peu de chances de lui convenir.
Quand Nozomi rouvrit les yeux, son regard ainsi que son expression étaient soudainement plus lourds, presque comme si elle venait de remettre un masque, celui de la Capitaine et héritière de la Noblesse qu’elle était.

>> As-tu la prétention de sous-entendre que cela peut représenter un danger pour moi ? Penses-tu manquer de contrôle à ce point pour craindre ce que tu peux faire ? Et quand bien même c’était le cas, estimes-tu ton niveau assez haut pour rivaliser avec celui d’un Capitaine ?

Le Reiatsu de Nozomi se faisait plus lourd, plus pesant. Comme pour témoigner du fossé entre eux, il s’abattait sur la pièce. Pas menaçant, simplement assez présent pour être notifié, pour qu’elle comprenne.
Cela ne dura cependant que brièvement avec que le calme ne reprenne place, et ce même sur le visage de la Capitaine qui se fit un peu plus doux, bien que le sérieux qu’elle avait adopté restait notablement présent.

>> J’ose espérer que ce n’était pas ce que tu voulais dire. Je note au moins le respect du statut que tu démontres, et qui n’est que bien trop peu présent chez ceux provenant du Rukongai. Tu me demandais si cette origine est un problème ? C’est une possibilité.
Mais, que cela me plaise ou non, le Gotei 13 est ouvert à tous. Surtout en ce moment. Et, à partir de là, les compétences prennent le dessus. Nous restons membres d’une institution militaire.

Le mécontentement de l'être au sein de son âme était palpable. Nul doute que son instructrice aurait préféré que l’occasion soit saisie pour lui refuser le poste. Pourtant, l’argument de la situation actuelle du Gotei 13 semblait également entendre grâce à ses oreilles. La Tomoe elle-même était à ce poste pour cette raison.
Au pire, il serait toujours temps de trouver plus approprié si l’occasion se présentait.

>> Donc, le seul risque qui se présente à toi, c’est que tes capacités ne soient pas à la hauteur. Tu as été recommandé à ce poste, malgré que la position de ma famille sur ton origine ne soit secrète pour personne. C’est pour cette raison que je t’ai fait venir, pour constater que tu le mérites.

A toi de le prouver maintenant.

Si ses premières paroles avaient semblé jeter le trouble sur la Capitaine, la suite de ses interrogations n'avait vraisemblablement pas le même effet. Alors qu'elle avait voulu faire preuve de prudence devant les potentiels dégâts que pouvait causer un affrontement en ces lieux, sa future Capitaine semblait avoir mal pris la remarque et avoir considéré qu'il s'agissait d'une marque de prétention, de vantardise de sa part. Son regard s'était fait plus froid, plus pesant et l'ambiance globale de la pièce avait elle-même changé, toute la pression spirituelle de son interlocutrice semblant soudain s'être installée dans les lieux. Lui rappelant la différence de niveau qu'il existait entre eux deux. Une différence dont elle n'avait jamais douté.

Pendant un très bref instant, Mayuri avait quitté le faciès neutre qui la caractérisait pour froncer les sourcils devant cette soudaine pression. Mais rapidement son regard s'était mû en un tout autre sentiment. Non pas la peur, non pas la méfiance ou même la défiance. Mais tout simplement une curiosité visible, pouvait s'approcher de l'admiration par certains aspects. Si elle avait parfois l'impression d'avoir atteint les limites de son apprentissage, ce genre de situation remettait clairement les choses dans leur contexte et lui permettait de voir l'avenir d'une toute autre manière. Une vision rafraichissante et encourageante. Ainsi, loin de se renfermer devant les paroles de la Capitaine, elle répondit avec un certain engouement peu prévisible

Mais pas du tout! A aucun moment, je n'ai envisagé pouvoir vous défaire ou même égaliser votre niveau. Je sais très bien que votre puissance dépasse de loin la mienne et, au delà de cela, votre expérience vous donne aussi un énorme avantage. Je sors tout juste de l'Académie, il me faudra probablement des années avant de pouvoir me vanter d'avoir une telle expérience. Et c'est une des raisons pour lesquelles j'aimerais devenir votre Vice Capitaine. Pour vous apporter mon aide bien entendu mais aussi pour apprendre de vous. Je ne peux qu'imaginer tout ce que j'ai à apprendre en vous observant et je dois admettre que c'est inspirant. Apprendre des meilleurs. Et je ne dis pas ça pour vous flatter mais parce que je le pense.

La suite des propos de Nozomi, par contre, n'eut pas le même effet. Si son regard s'était quelque peu éclairci en répondant aux questions de la jeune Shinigami et si la Capitaine n'exprimait pas clairement son mépris pour les originaires du Rukongai, son avis n'en était pas pour autant dissimulé le moins de monde. Simplement, elle décidait de laisser les compétences parler avant ses préjugés. Et si Mayuri ne parvenait absolument pas à comprendre pourquoi une telle différenciation, elle partageait cette vision sur la prédominance des actes. A quoi pouvait bien servir le statut social dans leur activité quotidienne?

Je vois. Ou plutôt non, je ne vois pas trop mais je vais faire de mon mieux pour prouver que je suis digne d'être votre Vice Capitaine. Je ne suis pas originaire du Seireitei. Et même si mes souvenirs de mon ancienne vie sont très flous, je ne pense pas que j'étais quelqu'un de noble non plus. Plus probablement une pouilleuse. Et qui plus est qui parle souvent trop, sans savoir tenir sa langue. Mais je ne m'en plains pas. Ca ne m'empêche pas de vouloir aider le Seireitei, d'avoir les mêmes objectifs nobles que vous, faute d'en avoir le statut. Car, j'espère ne pas me montrer insolente en disant cela, ce n'est pas mon objectif, mais j'imagine que c'est la noblesse de vos actes et de vos idéaux qui vous place là où vous êtes, avant votre statut social. Je me permets de penser que vous êtes une personne juste et bonne, en dépit de certaines rumeurs que j'ai pu entendre. Et c'est pour cette raison...

Laissant sa phrase en suspends, elle plongea son regard dans celui de la Capitaine tout en se mettant en garde. Nulle animosité, nul agacement, simplement une détermination à prouver ce qu'elle savait faire.

Capitaine Tomoe, par respect pour vous, je vais vous montrer les compétences dont je suis fière, comme vous me l'avez demandé. Vous prouver que je ne suis pas une jeune écervelée incapable de se rendre utile. Mais plutôt une jeune écervelée, mais qui sait se défendre, saura vous aider et se défaire de ceux qui viendraient remettre en cause sa position à vos côtés. Ou même stopper ceux qui fuiraient la Justice du Seireitei.

Finissant sa phrase, elle s'inclina respectueusement pour démarrer le "duel" avant de pointer d'un geste rapide son index en direction de la Capitaine. Et, sans prononcer aucune incantation, elle s'exprima calmement et simplement:

Bakudō #61, Rikujōkōrō.

La Capitaine voulait la preuve de ses compétences? Qu'à cela ne tienne, elle préférait lui montrer directement ce qu'elle savait faire de mieux. Avec un peu de chances, sa maitrise du Kidō suffirait à l'impressionner. Après tout, il s'agissait bien de ce dont elle était la plus fière. Et cela éviterait que sa Capitaine pense qu'elle la sous-estimait. Mais au cas où, mieux valait se préparer à la suite. Alors que les vaisseaux d'énergie fusaient en direction de la Capitaine, elle s'était déjà mise à incanter autre chose. Bien moins puissant certes, mais déjà de légers courants électriques venaient entourer ses pieds, espérant que cela l'aiderait contre la riposte de son adversaire, surtout si celle-ci venait à prendre à nouveau mal ses paroles précédentes.

Un peu plus et elle esquisserait presque un sourire. Peut-être gênée d’avoir mal été comprise, la prétendante Vice-Capitaine s’empressait de rectifier les choses, faire comprendre que son intention n’était pas celle qui avait été perçue. Et d’une façon permettant à Nozomi de comprendre plusieurs choses.
En premier lieu, la jeune brune était le genre à parler. Beaucoup parler. Peut-être trop. De toutes évidences elle avait du mal à s’arrêter. Lancée dans ses explications, sa défense. N’hésitant pas à exprimer tout haut ce qu’elle pensait. Que ce soit volontaire ou non, comme peu avant.
Par contre, le second point lui était grandement intéressant. En se défendant de ne pas avoir la prétention de représenter un risque pour un Capitaine, elle semblait dire qu’il s’agissait d’une question de temps. De nouveau il pouvait y avoir mauvaise compréhension, mais la Shinigami semblait avoir une foi certainement en ses compétences, et en son potentiel.
Ce qui expliquait la recommandation.

Elle aurait pu réagir à cela. Egalement à la suite, laissant penser une véritable différence de pensées entre elles. Bien entendu, elle-même issue du Rukongai, elle n’irait pas cracher sur ses origines, quand bien même cela serait mérité.
Un duel d’idéologie aurait pu se lancer, Mayuri ayant possiblement le caractère suffisamment trempé pour ne pas hésiter à s’affirmer face à une Capitaine. L’issue en serait cependant connue d’avance. Nozomi aurait très certainement mis fin à cet entretien et refusé la candidature de celle-ci, laissant ainsi le poste de Vice-Capitaine pour quelqu’un de plus digne.
Cela aurait été à l’encontre même de ce qui avait précédé. Si bien qu’elle se contenta de la laisser démontrer, enfin, ses capacités.

Ce qu’elle avait lu à son sujet était très clair. Elle avait de réelles dispositions en Kidō, ayant concentré son perfectionnement à ce domaine. Il n’était donc pas surprenant de la voir ouvrir avec un sort. Plus notable cependant, et n’étant pas indiqué dans son dossier, était le fait qu’elle était capable d’utiliser un Bakudō d’un tel niveau sans incantation.
Nozomi n’était pas un singe de la Onzième Division et connaissait donc un minimum le domaine. Suffisamment pour savoir qu’elle était incapable d’utiliser un tel sort, encore moins sans réciter. Cependant, elle savait une chose. Comment s’en libérer, c’est à dire de la même façon que toute entrave du genre. Opposant son Reiatsu à celui la contraignant, il ne fallu que quelques instants pour briser les rayons de lumière.

>> Vu tes paroles, je m’attendais à quelque chose de plus offensif. Mais si tu insistes.

L’instant d’après, elle avait son sabre à la main, bien que celui-ci soit toujours dans son fourreau. A dire vrai, elle n’avait pas forcément prévu de contre-attaquer. Elle n’avait jamais évoqué un duel, simplement une démonstration de compétences. Mais si la testée ne prenait pas les devants, celle la mettant à l’épreuve ne devait-elle pas le faire ?
Un simple Shunpô, tel qu’il était enseigné à l’académie, et elle se trouvait face à son opposante, bien que le terme ne soit pas très exact. Puis de nombreux coups. Une très légère coupure en plein milieux démontrait qu’elle venait d’utiliser par deux fois une même technique qui consistait à délivrer une pluie d’attaques au sabre.
Si son arme était dégainée, l’attaque avait beau être basique en elle-même, elle n’en serait pas sortie indemne sans défense. Le Zanpakutō dans son carcan, au mieux l’impact serait douloureuse. Mais il serait clairement décevant que cela se passait aussi simplement.

Que quelqu'un vous raconte que les Capitaines possédaient une puissance largement supérieure à la moyenne était une chose fréquente et plutôt logique à dire vrai. Après tout, s'ils accédaient à des fonctions si importantes, ils avaient forcément des capacités exceptionnelles. Mais avoir l'opportunité de le constater en vrai, qui plus est dans un "affrontement", cela relevait davantage d'une expérience inoubliable. En tout cas, de son point de vue. Car si elle s'attendait évidemment à ce que son Kidō, bien que puissant, ne puisse pas retenir bien longtemps la Capitaine Tomoe, elle n'avait pu imaginer la simplicité que ce geste représenterait.

Son Kidō avait été parfaite exécuté et elle n'avait pas le moindre doute quant à son efficacité. Les six rayons de lumière s'étaient abattus à l'exact endroit où ils devaient se trouver, autour de la Capitaine. Mais rapidement, le Reaitsu de cette dernière s'était fait ressentir, brisant sur le champ l'entrave qui venait d'apparaitre. Nombreux auraient probablement été déçus et pris de court par cette situation mais le visage de Mayuri n'affichait aucun de ces sentiments mais une admiration réelle. Comme si elle venait d'assister à un miracle, son regard pétillait de curiosité et d'intérêt. Allant même jusqu'à l'amusement. Au point qu'elle mit quelques instants à réagir lorsque son adversaire décida d'entrer dans la danse en dégainant son sabre.

Heureusement pour elle, plus que le mouvement de la Capitaine, ce fut son commentaire qui tira la jeune Shinigami de son état contemplatif. Ainsi, eut-elle tout juste le temps - peut-être grâce au Kidō qu'elle avait lancé précédemment - d'attraper son propre sabre pour contrer les premiers coups qui s'abattait sur elle avant de profiter de la position de celui-ci pour invoquer rapidement un nouveau Kidō. Le numéro 39 cette fois, toujours sans incantation. Lui permettant de bénéficier d'un bouclier pour parer une partie des coups et de bénéficier d'un court répit.

C'était magnifique. La rapidité avec laquelle vous avez brisé un de mes Kidō les plus puissants. Je suis heureuse d'avoir pu assister à une telle scène. Et je me dois donc de faire honneur à votre demande. Mais sachez que ce genre de Kidō est ma spécialité. Je préfère largement capturer mes cibles sans les blesser si j'en ai le choix. C'est pour cela que je pense avoir ma place dans votre division. Même si je savais que cela ne fonctionnerait pas sur vous.

D'un geste rapide, elle déclama un nouveau Kidō. Des plus simples, de ceux que la plupart des Shinigamis devaient connaître. Mais qui devrait faire l'affaire dans cette situation. Le tout premier de la liste à dire vrai, Shō. Dont l'objectif n'était pas d'infliger des dégâts à son adversaire et, pour une fois, pas non plus de la repousser au vu de sa puissance. Mais plutôt de se repousser elle-même de quelques mètres en arrière, la distance étant sa meilleure alliée au vu de ses compétences. Hors de portée directe de la Capitaine, elle décrocha un des deux rubans de ses cheveux en s'exprimant calmement

Pour vous remercier et puisque vous insistez, je vous offre un cadeau de ma composition. Ribon no odori.

Entamant une incantation pouvant ressembler, par certains mots, à celle d'un Kidō de niveau supérieur, elle relâcha soudain son ruban noir qui, flottant dans les airs, se nimba soudainement de flammes avant de se séparer en une dizaine de fines bandes enflammées partant dans toutes les directions. Des trajectoires aléatoires, difficiles à prédire, au point que certains se heurtaient pour s'annuler dans une explosion de flammes. Pourtant, au delà de ces distractions pouvant au mieux détourner l'attention d'une cible pendant quelques secondes, il était clair que certaines de ces bandes atteindraient indubitablement la Capitaine si elle ne réagissait pas. Pas suffisamment pour la blesser grièvement mais assez pour lui montrer qu'elle-aussi pouvait attaquer si cela était nécessaire.

Elle était douée. Notre porteuse s’en rendait compte. En vrai, même nous ressentions ce fait. Non pas douée au point d’être un danger pour notre alliée, mais elle était vraiment telle que qualifiée dans les rapports. Un prodige. Sa maîtrise des sortilèges de Kidō était véritable, elle ne se vantait pas sans raison en affirmant qu’il s’agissait de sa spécialité. En fait, sur ce point précis, elle était sans aucun doute plus capable que l’héritière de notre pouvoir, cette dernière n’ayant jamais véritablement cherché à se perfectionner en la matière.
Elle en fit d’ailleurs la démonstration à l’assaut de la jeune fille. Une incantation pour un simple Seki, repoussant certaines des bandes enflammées, nous utilisant nous pour contrer d’autres, les dernières parvenant à l’atteindre, sans pour autant générer de dégâts majeurs. Mais une chose restait à noter.
Elle avait été touchée.

Nozomi baissant la tête sur sa tenue, balayant son haori de sa main gauche, tant pour retirer les éventuelles traces de l’assaut que pour constater les dégâts. Elle ne resta qu’un instant ainsi avant de viser de nouveau son assaillante. Puis, pas un bruit, un simple instant de flottement tandis qu’elle réfléchissait.
Puis, toujours sans prononcer le moindre mot, elle leva son Zanpakutō, toujours dans son fourreau, devant elle, un léger sourire sur son visage. Puis, un simple mot.

>> Bien.

À ce moment-là, elle retourna son arme, laissant celle-ci lame vers le bas avant de replacer celle-ci au niveau de sa taille, et surtout rattachant le fourreau à sa ceinture. Et, ainsi, elle marquait la fin de cette démonstration. Après tout, pourquoi faire inutilement durer la chose ? Elle avait vu suffisamment de Shinigami à l’œuvre pour être capable de tirer les conclusions adéquates de ce qu’elle venait de voir.
La seule étape supérieure qu’elle pourrait imaginer impliquerait d’y mettre un peu plus de son côté, et certainement libérer son Shikai. Ce qui dépassait de très loin le cadre du simple test qu’elle avait en tête.

>> Utilisation de Kidō élevé sans incantation, et sans perte de puissance. Bonne réactivité face à une attaque adverse. Et également des sorts personnels des plus intéressants. Je vais être franche, même en ayant eu des rapports à ton sujet, je ne m’attendais pas à autant.

La très grande majorité des Shinigami étaient tout simplement incapables d’atteindre un tel niveau, et ce même après des dizaines et des dizaines d’années d’expérience. Pour elle, il lui suffisait de sortir de l’Académie pour être capable de pareilles choses ? Son avertissement précédent risquait fortement de trouver du sens à l’avenir. Nombreux allaient être ceux qui allaient la jalouser.

>> Il ne reste qu’une chose à voir. Si tu en as véritablement les épaules. Les paroles et les compétences martiales sont une chose, mais elles ne suffisent pas à prétendre diriger les autres, vu que c’est ce qui t’est proposé.
Et pour cela, il n’y a qu’un seul moyen de véritablement l’apprendre.

A ce moment, l’expression de la Capitaine s’était véritablement adoucie. Pas au point d’exprimer un sourire chaleureux, ce n’était pas son genre, mais il était possible de voir qu’elle était vraiment satisfaite de la situation.

>> Es-tu prête à me le montrer, Vice-Capitaine Shiro Mayuri ?

Si elle avait observé avec attention la réaction de la Capitaine devant les rubans de flamme qui fusaient dans sa direction, c'est à nouveau avec une admiration non dissimulée qu'elle avait noté la simplicité avec laquelle elle s'en était protégée. Une simplicité peut-être un peu trop poussée cette fois puisqu'un des rubans était parvenu à l'atteindre, sans toutefois lui causer des dégâts importants. Pendant une seconde, le visage de Mayuri afficha une mine réjouie - atteindre un Capitaine n'était assurément pas un fait à la portée de n'importe qui - avant que celle-ci ne transforme en une méfiance visible quand la Capitaine pointa son arme dans sa direction.

Je n'aurais peut-être pas dû...

Un murmure qu'elle avait prononcé pour elle-même, réfléchissant déjà à toutes les possibilités qui s'offraient à elle, non pas pour contrer l'attaque de son opposante mais simplement pour s'en protéger et limiter les dégâts liés à la vengeance de la Capitaine. Pourtant, ses craintes n'eurent l'occasion de se réaliser, elle avait bien mal jugé la situation. Sa Capitaine venait de rabaisser son arme et la rattachait à sa ceinture. Etait-ce un sourire qu'elle venait d'apercevoir sur son visage? Sa démonstration avait-elle été suffisante? Difficile d'en être certain au vu du caractère de son interlocutrice.

Même lorsque cette dernière avait repris la parole pour décrire ses compétences, elle ne pouvait se convaincre totalement que le résultat était celui escompté. Bien sûr, elle était persuadée que sa maîtrise du Kidō avait effectivement impressionné la Capitaine de la Neuvième mais était-ce suffisant pour devenir sa Vice-Capitaine et passer au delà de son appréhension étrange pour les gens du Rukongaï? Seuls les propos suivants parvinrent enfin à dissiper les doutes de la jeune Shinigami qui ne put dissimuler un petit cri de joie avant de rapidement se reprendre. Mais les derniers mots résonnaient en boucle dans sa tête... Vice-Capitaine Shiro Mayuri. Cela sonnait plutôt bien!

Je vous remercie pour votre confiance, je ferai de mon mieux pour vous assister et ne pas décevoir vos attentes Capitaine Tomoe! Je suis persuadée que nous allons faire une équipe du tonnerre! Nous pourrions vêter ça en... Marquant une courte pause, elle se reprit rapidement, consciente de sa nouvelle boulette Pardonnez moi, je ne voulais pas dire ça, c'était déplacé. Je suis persuadé que j'apprendrai beaucoup à vos côtés.

Néanmoins, un petit détail la dérangeait. Elle n'était pas certaine d'avoir compris le dernier commentaire de sa Capitaine. Un seul moyen de véritablement l'apprendre? Le lui montrer? De quoi parlait-elle exactement. De l'expérience? Sans certitude et convaincue qu'elle risquait de faire une nouvelle bêtise et de braquer Nozomi, elle répondit finalement

Vous parlez d'une expérience sur le terrain j'imagine? Auriez-vous une mission à me confier?

Cette Mayuri avait un véritable don pour une chose en particulière. Plus encore que ses Kidō. Sa capacité à rappeler à quel point elle était en vérité jeune. Si l’âge était quelque chose de très relatif dans un monde où l’on pouvait vivre des centaines d’années, Nozomi elle-même se situant vers les deux-cents ans, l’attitude de celle qu’elle venait de reconnaître comme sa Vice-Capitaine rappeler qu’il était possible d’être, en certains sens, toujours une enfant. Cette proportion à laisser ses pensées s’échapper de ses lèvres. Sa façon d’exprimer sa joie.
Tant d’attitude qu’on ne retrouvait que rarement vers les personnes véritablement adultes. Etait-ce véritablement une bonne idée de confier de telles responsabilités à quelqu’un pareil ? Une certaine voix en elle, qu’elle identifiait sans aucun mal, avait tendance à dire que non. Qu’il était nécessaire de rétracter ses paroles et de lui annoncer qu’elle n’aurait finalement pas le poste. Une certaine voix qu’elle fit taire.

Si, jusque là, la Capitaine avait gardé une certaine distance, comme elle le faisait si bien, dans toute son attitude, même dans les moments les plus calmes, cette fois elle se laissa aller à une expression réellement amusée. Cela ne la surprenait pas réellement, mais Mayuri n’avait pas exactement compris les paroles prononcées, et le léger défi, si l’on pouvait appeler ça ainsi, qui lui avait été lancé.

>> Une mission de la plus grande importance, qui va durer, je l’espère, très longtemps. Tu seras en permanence sur le terrain, jusqu’à la fin.

Fait qui pouvait être étrange aux yeux de ceux-là connaissant un minimum, mais elle était véritablement en train de s’amuser de celle qui allait maintenant la seconder. Sans faire transparaître la moindre once de méchanceté, puisqu’il n’y en avait pas une seule en elle à ce sujet.
Elle ne pouvait prédire la façon dont elle le prendrait, si elle s’en rendait réellement compte. Cela, en un sens, faisait également partie de cette mission, si mystérieuse pour l’une, si évidente pour l’autre.

>> Il s’agit simplement d’être digne de ce rôle, jusqu’au bout. En un sens, c’est un combat de tous les jours dans lequel tu te retrouves engagée. Il faudra le prouver à moi, mais également aux hommes de notre division.

Après tout, même si elle n’en dit rien, nul n’était irremplaçable et, si cela s’avérait nécessaire un jour, elle n’hésiterait pas à faire en sorte d’avoir un Vice-Capitaine plus compétent. Mais elle espérait ne jamais avoir à en arriver là, car, finalement, cette petite était plutôt sympathique.

>> Mais je ne t’aurais pas laissé ce poste si je pensais que tu n’en étais pas capable. Et, à part si tu as d’autres questions, je pense que tu pourras commencer dès maintenant. Ce n’est pas le travail qui manque à la Neuvième...

Même si elle s'était sentie forcée de se rattraper après sa proposition de fêter sa nomination au poste de Vice Capitaine, elle n'avait pas abandonné. Intérieurement, elle espérait que le Capitaine allait rebondir sur cette idée et allait lui offrir une telle opportunité. Bon, elle se doutait que les chances étaient très faibles mais cela ne l'empêchait pas de garder espoir! Un espoir évidemment déçu? Pas exactement. Car si, dans les faits, Nozomi n'avait rien proposé de tel, elle semblait s'être fortement détendue et, contre toute attente, n'était-ce pas une pointe d'amusement qu'elle pouvait percevoir dans son regard?

Renforcée dans ses convictions de par cette réaction plutôt inattendue, Mayuri ne put s'empêcher d'afficher un sourire franc et décidé, validant intérieurement une idée qui lui avait déjà traversé la tête depuis le début de cette rencontre: en tant que Vice Capitaine, son premier objectif serait donc d'aider Nozomi à se rapprocher des gens! Les rumeurs avaient certes une part de réalité mais il était maintenant totalement clair pour elle que derrière cette carapace se cachait une bonne personne. Et elle parviendrait tôt ou tard à la faire apparaître aux yeux de tous, que cela prenne quelques semaines, des mois ou même plusieurs années! Rien de tel qu'un bon défi pour casser l'ennui lorsque celui-ci se présente à vous.

Au commentaire mystérieux de la Capitaine quant à sa mission importante, Mayuri avait repris un faciès plus sérieux, se demandant de quoi il pouvait bien s'agir.

Quelle que soit cette mission, je mettrai tout en oeuvre pour la mener à bien et ne pas vous décevoir Capitaine Tomoe. Vous pouvez me faire confiance!

Néanmoins, ses paroles suivantes la déboussolèrent un instant alors qu'elle réfléchissait, s'assurant d'avoir bien compris ce que sa Supérieure venait de lui dire. Elle n'avait pas rêvé? Elle venait de la faire tourner en bourrique pendant quelques instants? Un mince sourire amusé s'afficha à nouveau sur ses lèvres, fière de ce moment qui, pour elle, sonnait comme un premier instant de complicité avec sa Capitaine. Se mordant légèrement la lèvre pour se retenir d'avoir une réaction trop naturelle - même si de bonne humeur, il valait mieux éviter d'abuser de la patience de la Capitaine - elle attendit la fin des explications pour répondre. Réfléchissant un instant

Je vous remercie, je vais me mettre rapidement au travail! Une seule question me vient en tête si vous m'y autorisez. Afin de bien me préparer à accompagner les Shinigamis de notre Division, auriez-vous quelques conseils ou commentaires à me donner à leur sujet. Y a t'il des membres de la Neuvième Division sur qui je peux particulièrement compter ou bien au contraire que je dois surveiller?

Malgré ses deux années d'étude au sein de la Division, elle n'avait eu l'occasion de connaitre chacun de ses membres. Et elle préférait de ne pas se fier aux simples rumeurs. Preuve en était, celle sur la Capitaine qu'elle venait de briser en quelques minutes.

Cette entrevue, ou ce test puisque cela en avait été un, touchait à son terme. Les choses étaient réglées et elle avait dorénavant une Vice-Capitaine. Enfin les instances supérieures allaient la laisser tranquille sur cette absence de nomination jusque là, alors qu’en plus elle n’était même pas la seule. Bien sûr, elle n’avait pas accepté la gamine pour cette raison. Elle avait véritablement perçu un potentiel intéressant et se disait que cela pouvait valoir le coup de la surveiller.
Surtout que sa volonté était clairement présente. Déjà elle faisait preuve de motivation, posant des questions afin de remplir au mieux cette nouvelle responsabilité. Question qui, déjà, pouvait présenter une très légère difficulté pour celle ayant quelque peu délaissé le relationnel au sein de sa Division. Fouillant dans sa mémoire, un nom lui vint à l’esprit.

>> Il y a bien une personne qui pourrait convenir, pour les deux points. Furihata Tetsu, Dixième Siège. Plein de bonne volonté et sérieux, il est du genre à ne pas lâcher les choses. Et il n’est pas mauvais. Par contre, il occupe ce siège depuis quelque temps, car il a tendance à, comment dire… Se laisser emporter dans ses théories.

Façon bien simple et polie de dire qu’il en faisait beaucoup trop et que cela lui attirait parfois des ennuis. Ce qui était dommage, sans cela nul doute qu’il ferait véritablement une recrue de choix et mériterait un siège plus élevé.
Mais, alors qu’elle terminait ses explications, la Capitaine s’éloigna quelque peu afin d’aller prendre en main une petite plaque de bois posée dans un coin. De nouveau elle s’approcha de Mayuri, se retrouvant alors juste devant elle.

>> J’avais failli oublié un point important. Le symbole de ton rang. A arborer fièrement, c’est le privilège des Capitaines par rapport aux sièges en dessous après tout.

Un symbole, important par son sens plus que par l’objet. Il s’agissait en quelque sorte de ce qui officialisait véritablement cette promotion et prouvait son grade à ceux qui pourraient la croiser. Nozomi elle-même n’ayant jamais occupé cette position avait eu l’honneur de le porter, mais elle n’avait pas souvenir d’un seul Vice-Capitaine ne le faisant pas.

>> Je pense que cela clôture cette entrevue. Tu vas bien sûr avoir un peu de temps pour prendre tes marques et il ne faudra pas hésiter à poser des questions, mais je compte sur toi pour être opérationnelle dès que possible. Ce n’est pas les tâches qui manquent après tout.

Un air plus sérieux et solennel s’était installé sur son visage, ces dernières paroles étant véritablement la supérieure qui parlait à son nouveau bras droit. Il fallait maintenant que ce dernier prouve être digne de cet honneur, et surtout de cette confiance.

Si cette première rencontre touchait à sa fin et si elle s'était extrêmement bien passée compte tenu de ce qu'elle avait pu envisager, l'idée de savoir sur qui elle pouvait compter au sein de la Division était une étape importante de son apprentissage. Parce qu'au final, la Capitaine avait raison. Elle avait beau savoir utiliser le Kidō avec une efficacité redoutable, cela ne faisait pas d'elle une meneuse d'hommes, ni une personne importante au sein de la Neuvième. Il allait donc falloir rapidement qu'elle sache sur qui elle pouvait s'appuyer pour avancer. Ou même qui était susceptible de vouloir lui rendre la vie difficile...

Ainsi, sortit elle rapidement un petit carnet pour noter les informations que sa Capitaine lui offrait

Furihata Tetsu. Sérieux et très motivé. Réfléchissant un instant, elle ajouta Excessivement. A rencontrer rapidement.

La Capitaine étant face à elle, elle avait pris sur elle de ne pas écrire le "Potentiel emmerdeur" qui lui était passé par la tête mais avait simplement noté la version édulcorée. Libre à elle de rectifier cela un peu plus tard. Et même mieux encore, d'aller le vérifier d'elle-même. Car après tout, cette rencontre était une preuve flagrante que les rumeurs étaient bien souvent infondées. Réfléchissant un instant sur la possibilité qu'elle ait déjà rencontré cet homme par le passé, elle fut interrompue par le Capitaine venue lui remettre quelque chose.

Mon insigne de Capitaine...

Des mots qu'elle avait prononcés avec émerveillement alors qu'elle observait l'objet au creux de ses mains. Un si petit objet mais si un grand symbole. Il ne lui fallut pas longtemps pour s'empresser de l'attacher à son bras, faisant écho aux paroles de Nozomi qui l'enjoignait à le porter fièrement. Entendant d'une oreille sa Capitaine déclarer que leur entrevue était ainsi terminée, elle répondit avec engouement

Je vais me mettre de suite au travail, je ne vous décevrai pas! Et ne vous inquiétez pas, je ne manquerai pas de revenir vers vous très rapidement avec de nouvelles questions puisque vous m'y encouragez!

Pleine de motivation, elle avait fait quelques pas en direction de la sortie mais s'arrêta pour revenir devant la Capitaine et s'incliner respectueusement

Je vous remercie pour cette entrevue Capitaine Tomoe. Ce fut très instructif. Je ne vous dérange pas plus longtemps.

Se retirant solennellement sur les premiers mètres, elle ne put cacher son excitation bien longtemps et accéléra, toute guillerette, prononçant pour elle-même, mais assez fort pour que la Capitaine l'entende

Nous allons faire une équipe du tonnerre, c'est certain!