Toi, t'es ma Queen... Si ?

- Nan, tu déconnes ?

Le mec qui l'accompagnait se mit à rire en voyant la réaction de Diamond. Faut dire que là, il l'avait quand même bien choqué. Le mec, qui appartenait au Coin mais comme simple "intervenant", lui expliquait qu'une Quincy avait intégré il y a quelques temps leur groupe. Si cela n'était pas quelque chose de spectaculaire en soit, c'était la description qu'il en avait fait qui avait intrigué le manipulateur de cartes.

- Genre une vraie poupée ? Avec un chapeau d'merde et tout ? Wooooow, j'veux la voir. Nan sérieux, j'veux la voir.

Comment la discussion avait débuté, il ne s'en souvenait pas et cela n'importait pas d'ailleurs. Deux choses avaient retenus son attention : la nana avait 19 ans. Et elle s'habillait comme une pute. Euh, une poupée pardon. La classe à Vegas ! Les locaux, il les connaissait évidemment. ce n'était clairement pas la première fois qu'il venait ici, ayant d'ailleurs rencontré le maître des lieux par le passé. Il aimait ce coin. Les Coins. Enfin voilà, vous avez compris.

Et visiblement, la chance lui souriait car le bonhomme qui l'accompagnait lui donna un coup de coude, montrant ensuite de l'index la Quincy au loin. Putain, les yeux de Diamond s'écarquillèrent. Une vraie poupée en effet. Bon, le chapeau puait la honte mais au final, cela n'avait pas trop d'importance.

- T'as dit qu'elle s'appelait comment déjà ? Syphilis ?

L'homme poussa un simple soupir. Exaspéré par l'humour abruti du bonhomme. Il était pas méchant. Mais le terme "beauf" lui collait un peu trop à la peau.

- Sibylea... Liesith.
- Ah ouais, comme dans le dernier des Jedi. Tu l'as ? nan ? Hey, reviens !

Son pote s'était éloigné sans demander son reste. Pas grave, il avait désormais un nouveau projet. Faire connaissance avec une Quincy. Et c'était clairement pas quelque chose de fréquent en réalité. Doucement, après avoir plaqué une mèche rebelle sur son crâne, il s'approcha d'elle. Ce qu'elle faisait, aucune idée. Prenant sa plus belle voix, il s'adressa alors à elle :

- Bonjour. J'peux te déranger une petite seconde ? J'suis Mickaël, section Scientifique. Enchanté de faire ta connaissance. J'passais dans l'coin trankilou Gilou et j't'ai vu. Comme c'est la première fois que j'vois une vraie Quincy - ouais ouais on m'a parlé de toi en speed t'as vu - j'me suis dit "Diamond, y'a pas à tortiller du cul pour chier droit, vas t'présenter". Bah voilà. J'suis super intimidé !

Petit clin d'oeil dans sa direction.

#pasdanslarue. Ou plutôt, pas dans les couloirs là. Ouais, ça serait bien. Faudrait peut-être demander aux boss si c’était possible. Ou même, encore mieux ! « Interdiction aux lourds ». Top, c’était une idée qu’il me fallait noter. Je suis sûre que ça pourrait plaire !
Par contre, pour le coup, ça m’aidait pas. Pas le choix, fallait que je le gère. Qui ça ? Le gros lourdingue qui venait me causer. D’accord, j’étais trop mignonne, c’était une évidence. Mais quand même. Il avait l’air tellement vieux ! Et pas soigné. Surtout ça en fait.
Bordel, j’allais devoir m’en débarrasser.

La Quincy était dans les couloirs de l’Arcānum, réfléchissant à des choses d’une importance capitale. Comme « Comment faire payer aux abrutis de la dernière fois ? ». Les abrutis en question étant tout simplement les gardes l’ayant empêché d’en savoir un peu plus sur ce qui lui revenait de droit.
Bien sûr, elle savait qu’elle pourrait y aller à la méthode directe. Se ramener face à eux, leur offrir un petit Gift et ils seraient à terre dans le seconde. Elle s’était préparée à cela. Jusqu’à ce que, finalement, elle se dise qu’il s’agissait certainement d’une mauvaise idée.
Etonnant venant de sa part, mais cela pouvait arriver malgré tout.

Et donc, voilà qu’elle se trouvait tranquillement perdue dans ses réflexions qu’une voix se fit entendre. Et une vision dont elle se serait passée se fit voir. Elle le regarda – hélas – en écoutant ses paroles – encore plus hélas. Et, dans une grimace de désapprobation, elle prit la parole.

>> Bien sûr qu’on t’a parlé de moi, pourquoi cela ne serait pas le cas ? Par contre, j’ai jamais entendu parler de toi. Section scientifique tu dis…

Je le détaillais. Y avait vraiment un truc qui n’allait pas. Peut-être avec les cheveux coupés, la barbe taillée, une bonne douche… Et puis surtout, d’autres vêtements ! Sérieux, c’était légal ce manteau et ces gants ?
Pourtant, je savais qu’il y avait des gens avec du goût à cette époque. J’y avais passé assez de temps. J’avais vu Shibuya. Lui clairement il n’y avait jamais mis les pieds.
Ah moins que… Mais oui !

>> Ah mais je sais ! Tu es un mendiant qu’ils ont récupéré pour faire des expériences. Cela explique le manque d’éducation. Par contre, pourquoi tu te ballades tout seul…

Bras croisés, en pleine réflexion, la Quincy millénaire n’avait même pas cherché à répondre à ses paroles. Qu’il y avait-il à dire de toutes façons ?
Elle aurait certes pu l’envoyer chier. Elle aurait certainement dû.

- Yes, c'est ça ! Les sciences, ma belle ! Les sciences. Si tu veux, j'te montrerai mon labo.

Petit jeu de sourcil bienvenu. Il lui avait répondu du tac au tac, pas même surpris un seul instant par la confiance qui se dégageait d'elle alors qu'il s'était approché et l'avait accosté de manière si soudaine. La suite eut néanmoins le mérite de le faire sourciller alors qu'elle le détaillait comme une sorte de morceau de viande. Avarié, à en croire son visage et les propos suivants.

Vraiment, un mendiant ? Il ne comprenait pas la remarque. Sa dernière douche remontait à ce matin - normal quoi - et il se trouvait plutôt propre sur lui. Bon on pouvait faire mieux niveau "barbe mal rasée" mais ça lui donnait ce petit style baroudeur qui plaisait tant. Il leva simplement son bras et huma vite fait vers son aisselle. De toute première fraicheur. Pas une odeur de transpiration, rien. Puis il comprit. Il baissa doucement la voix, pour ne pas rendre la discussion plus inconfortable qu'elle n'était déjà. La pauvre.

Prenant son air le plus compatissant, il fit une légère moue. N'osant pas encore tenter le rapprochement tactile, il planta simplement son regard dans celui de la Quincy.

- Oh merde, j'comprends. T'as tes règles et ça t'fout de mauvaise humeur ? J'connais ça, t'inquiète. Ma soeur, elle était pareille. Dès que les Anglais débarquaient, elle devenait un véritable monstre. J'connaissais pas les Hollow à l'époque mais j'peux t'dire qu'ils seraient passés pour des bébés chiens face à elle. D'ailleurs, j'la trouve débile cette réplique de "les anglais débarquent". Pas toi ?

Puis il se mit à se marrer. Le prendre pour un clodo, nan mais quelle idée. Après il savait de source sûre qu'il intimidait la gente féminine. Et le mécanisme de défense élémentaire, primaire, c'était évidemment les insultes mesurées et repousser l'autre. Pauvre petite bichette. Un peu froide quand même. Mais il avait de quoi la réchauffer.

- Bon par contre, j'peux pas te donner tort sur les expériences. J'suis pas un natif moi. Pur produit Ultima Necat. Sauf ça. Tu vois ce visage de demi dieu grec là, bah j'peux t'dire qu'il cache un cerveau "Triple A".

Hey ouais ma belle, alors, impressionné. Et tandis qu'il parlait, ses mains s'activaient. Difficile pour lui de ne pas s'occuper même en pleine discussion. Sans qu'il recherche réellement à faire quoi que ce soit, une carte était apparue dans sa main, l'homme s'amusant simplement à la faire passer d'une main à l'autre avec une dextérité propre à celle d'un magicien. Pour le coup, il ne faisait pas ça pour impressionner les filles - dans les bars oui - mais vraiment par réflexe.

- T'as pas envie que j'te paye un verre vite fait ? Histoire qu'on discute tranquillement ? Même pas à l'extérieur hein. Ici, ça m'convient très bien aussi. Tant qu'il y a une jolie femme comme toi, qu'importe l'endroit, ce sera magnifique.

Loveur loveur. Il s'arrêta un instant de jouer avec sa carte qui, sommes toute, avait disparu.

- Alors ? Qu'est-ce que tu risques de toute façon à part de passer un bon moment. On fera connaissance.

Et plus si affinité. Car il sentait bien l'affinité là.

Je… Quoi ? Nan mais…
Un instant. Il fallait que je reprenne un peu mes esprits.
QUOI ? Sérieux ? Je rêve hein ? Ou plutôt c’est un cauchemar. Oui, c’est ça. Un cauchemar. Seule explication logique. D’un instant à l’autre je vais me réveiller et jamais ce début de conversation n’aura eu lieu.
C’est IMPOSSIBLE qu’il en soit autrement. Un mec comme ça, ça n’existait pas. Ou peut-être dans les films ou autres romans débiles. Mais en vrai ? Ouais, non.
AUCUNE chance.

Difficile pour elle de réellement réagir à la réponse donnée. Elle s’était attendue à certaines réponses. Qu’il s’énerve, qu’il parte, littéralement, la queue entre les jambes. Mais ça. Et le coup de vérifier son odeur ? Une telle réaction était au-delà de ce qu’elle aurait pu imaginer.
Et puis, sa réponse. La notion de décence était immédiatement oubliée. Et, s’il eut le temps de continuer à déblatérer ses inepties, la réponse fut sans appel.

>> Un cerveau « Triple A », pour peu que cela veuille dire quelque chose, comprendrait que son approche et son apparence négligée puisse être plus responsable d’une telle réaction qu’une quelconque mauvaise humeur. Voir être la cause de cette dernière !

Car en vrai, elle commençait à l’être, de mauvaise humeur. Pas pour les raisons qu’il avait évoqué, bien entendu, mais presque par la simple existence de cet individu. Elle pourrait bien entendu se contenter de reprendre sa route et d’ignorer ce malotru, mais il l’avait quelque peu énervée.
Une princesse agacée aimait à le faire savoir. Et, sur bien des égards, Sibylea avait le comportement d’une princesse. Ainsi, ce n’était pas la différence de taille entre eux qui allait l’intimider. Se dressant légèrement sur la pointe des pieds, attitude habituelle de certaines personnes voulant paraître plus grandes qu’elles ne l’étaient vraiment, elle écrasa son index droit sur le torse du magicien de pacotille, ne prêtant nulle intention quant au fait de déranger son tour de passe-passe.

>> Aucun style vestimentaire. Aucun soin de ton apparence. Tellement peu sûr de ton odeur que tu es obligé de vérifier tel un chien. En effet, il y a eu ressemblance avec un dieu grec. Mais pas Apollon. Héphaïstos !

Sa voix monta quelque peu en prononçant le dernier mot, mettant l’accent sur ce dernier comme une conclusion évidente.
Son habituel air souriant et joueur, limite enfantin par moment, laissait place à une pseudo-colère guère plus mature. Surtout lorsqu’elle reposa bien les talons au sol, croisant les bras sur torse mais sans arrêter de fixer de haut, au sens figuré bien entendu, le soi-disant scientifique.

>> Ce que je risque ? Tout simplement d’être vue avec toi et que cela n’entache mon image. Comme si une femme censée accepterait sciemment qu’on l’aperçoive avec un tel rustre…

Cette fois, la dernière phrase fut prononcée de façon un peu plus basse, comme destinée à elle-même uniquement, bien que parfaitement audible.

Bon, elle avait clairement du tempérament. Et visiblement, tout ne s'expliquait pas par ses règles. Et en vrai, il adorait ça. Pas de se faire engueuler comme ça devant tout le monde, ça il pouvait s'en passer. Mais que la nana puisse ne pas se laisser faire, ça promettait du lourd au pieu ça.

- Franchement, t'abuses meuf !

Il ne sentait franchement pas mauvais, elle déconnait grave à ce sujet. S'il n'avait rien contre le fait de s'envoyer des piques - c'était là le jeu de la parade amoureuse après tout - il n'était pas disposé pour autant d'accepter les mensonges éhontés de sa p'tite Quincy. Quant à son apparence, il avait plutôt l'impression qu'elle fondait pour lui mais qu'elle refoulait ses sentiments. Normal, trop de charisme. Pauvre petite bichette.

D'ailleurs, quelle meilleure preuve que le fait qu'elle ne puisse pas s'empêcher de le toucher ? Alors que son doigt touchait son torse, il lui adressa un simple clin d'oeil, sans pour autant écouter ce qu'elle avait à dire. Pas mal de conneries dans les faits mais ça l'amusait de jouer à ce petit jeu. Il avait quoi son style sérieux ?

- J'peux pas prendre mal les réflexions sur mon style vestimentaire d'une gonzesse qui ressemble à une poupée, avec un chapeau à chier. M'enfin, pas grave. Les goûts, les couleurs, toussa. Franchement, on s'posera plus la question une fois qu'on sera tout nus toi et moi, dans ta piaule !

Il se marrait bien à dire vrai et pour le moment, il ne se braquait pas encore. Pas sur que ça tienne jusqu'au bout toutefois mais pour l'heure, ça allait. Puis faut dire qu'elle avait visé juste. Héphaistos. Dieu du vin. La classe en vrai. S'il pouvait ne serait-ce que posséder la moitié des pouvoirs qu'on lui prêtait, ce serait déjà excellent.

- En vrai, t'as pas vraiment refusé mon invitation hein. Du coup, on va s'le boire ce verre ? Ensuite, on avisera, héhéhé. Puis comme t'aimes gueuler, y'a moyen qu'on trouve une activité commune où tu pourrais t'en donner à coeur joie. Si tu vois c'que j'veux dire, ma Belle !

On ne pouvait pas lui retirer une chose : sa détermination. Le mec croyait en ses chances mais d'une force.

Meuf ? Ma Belle ? Il pensait qu’on avait élevé les cochons ensemble ? Au mieux il aurait justement été rangé parmi lesdits cochons d’ailleurs.
Chapeau à chier ?! Non vraiment, c’était une chose de montrer qu’il n’avait aucun goût vestimentaire juste en osant se montrer en public ainsi, mais appuyer ainsi la chose était presque malaisant. Je pourrais presque avoir de la peine pour lui. Presque étant le mot important. Il ne méritait pas une telle considération après tout.
Mais le pire, de trèèèèèèèèèès loin, c’était sa dernière remarque. Je n’étais pas conne, j’avais vécu dans ce monde. Peut-être même que je connaissais plus que lui ses pires bassesses d’ailleurs. Je comprenais donc ce qu’il entendait par ses dernières paroles.
Et il y avait des choses qui définitivement ne passaient pas.

Elle était toujours les bras croisés, le regard assassin. Chaque instant qui passait, son humeur empirait. Pourquoi était-elle toujours ici ? En vrai, elle-même ne saurait le dire. Quelqu’un d’un minimum réfléchi aurait préféré couper court à cet échange qui, décemment, ne pourrait mener nulle part. Et surtout pas où l’homme espérait que cela aille.
Il fallait cependant avouer que la jeune femme n’était pas forcément l’individu le plus réfléchis qui soit. Surtout dans certaines circonstances. Surtout lorsqu’elle pouvait faire une scène. Ce qui était plus ou moins ce qui était en train de se dérouler. Et ce qui, bien entendu, ne faisait qu’empirer les choses.
Il lui aurait simplement suffit de continuer son chemin et rien ne serait arrivé. Peut-être se le dira-t-elle plus tard…

>> Nan mais vraiment… Dans quel monde tu vis ? Allô, ici la Terre, tu peux redescendre. On dirait que t’as pris un truc pas net sérieux.

Et là, l’illumination. Aussi soudaine que inattendue, alors que cela lui paraissait être l’évidence même dorénavant. Il n’était pas clean et sous l’effet d’une substance. Tout collait. L’apparence, la désillusion complète.
Pendant un bref instant, son regard laissa paraître cette compréhension soudaine alors qu’elle tapait la paume de sa main droite de son poing gauche, comme pour appuyer ce fait.

>> Mais oui c’est ça ! C’est pour ça l’apparence, les paroles dénuées de sens. A tous les coups tu dois même comprendre d’autres mots que ceux que je prononce. T’es complètement drogué !

Les méfaits des substances, elle les avait bien trop vus. Et il s’agissait simplement des classiques trouvables dans la rue. Pas des produits expérimentaux que devaient concocter les têtes pensantes de cette organisation. Section dont il faisait visiblement partie, même en tant que cobaye. Ce qui lui donnait possiblement accès à certaines choses. En plus, vu son précédent tour avec les cartes, elle ne serait que peu surprise que ce soit un voleur.
Dans la tête de Sibylea, tout s’alignait de façon logique.

>> Par contre, j’ai clairement autre chose à faire que perdre mon temps avec un junky. Allez ouste, tu devrai plutôt t’inquiéter de récupérer ta dose. Même si tu ferais mieux d’arrêter bien sûr. Après, ce qui te sert de cerveau a l’air bien trop profondément atteint pour pouvoir être guéri… J’en aurai quelque chose à faire de toi je pourrais presque être triste que de savoir que tu vas rester simplet toute ta vie. Heureusement, je m’en moque complètement !

Vaste sourire sur son visage. Il pourrait très bien mourir dans un caniveau que ça ne l’affecterait en rien. Au mieux, elle serait heureuse d’apprendre que le monde était débarrassé d’un rebus. Si elle se souvenait de lui. Ce qui n’était nullement garanti.